Suzanne Berger, professeur de sciences politiques au Massachussetts Institute of Technology de Cambridge, place dans cet ouvrage le processus de mondialisation actuel dans une perspective historique afin d'en identifier les enjeux et les conséquences.
Retraçant le développement de la mondialisation qui a eu lieu à la fin du siècle dernier, l'auteur s'efforce, à travers une comparaison entre cette époque et la notre, d'éclairer et de relativiser les transformations que connaît aujourd'hui le monde.
[...] Si les Etats trouvent leur compte dans le processus de mondialisation, les syndicats et des mouvements de gauche, à l'époque dominés par une idéologie révolutionnaire n'y sont pas totalement opposés : ils condamnent les mouvements de capitaux, accusés de servir l'impérialisme européen, mais arguent généralement que l'accroissement des échanges est à même de faire baisser le coût de la vie pour les ouvriers, et surtout de faciliter l'instauration d'une fraternité ouvrière internationale. Dans l'ensemble, la mondialisation n'a donc pas fondamentalement transformé l'ordre international de l'époque, n'a pas influé sur les alliances politiques, les idéologies, et n'a que peu joué sur le cadre institutionnel de chaque pays. [...]
[...] La création d'empires coloniaux par les pays d'Europe occidentale étend le champ des échanges internationaux. La mise en place de l'étalon- or, qui supprime les risques de change, encourage également les échanges. La promotion des échanges au moyen de législation minorant les droits de douane et autres barrières à l'échange accentue cette tendance. Enfin, l'établissement de structures institutionnelles telles que la société par action favorise les mouvements internationaux de capitaux. Ainsi, en 1907, les investissements à l'étranger représentent 40% de la richesse nationale britannique. [...]
[...] Cet effacement des Etats et cette paralysie de leurs moyens est aujourd'hui l'argument majeur des opposants à la mondialisation. Il est de fait incontestable que la mondialisation économique provoque un certain estompement des frontières. Ohmae, fervent partisan contemporain de la mondialisation, va jusqu'à dire que l'économie est en train de s'abstraire totalement des frontières politiques. En réalité, la mondialisation des échanges n'a joué qu'un rôle marginal dans les bouleversements qu'a connus l'ordre international de l'époque Loin d'avoir subi passivement une mondialisation qu'ils ne pouvaient contrôler, les Etats ont été protagonistes de la première mondialisation. [...]
[...] En effet, le phénomène d'internationalisation qui s'amorce dès le milieu du 19e engendre déjà de nombreuses craintes. Les importations de marchandises et les exportations de capitaux étaient déjà soupçonnées de grever l'activité nationale et d'entraîner une convergence internationale des prix et des salaires pouvant s'avérer défavorable aux populations européennes. On redoute également, en vertu des principes qui inspireront plus tard les théorèmes Heckscher-Ohlin-Samuelson, que les travailleurs des pays européens soient menacés par les échanges avec les colonies ou avec des pays moins bien dotés en capital. [...]
[...] Il est abusif de soutenir que la mondialisation bride totalement les marges de manœuvre des Etats, ou même de la prétendre totalement inéluctable et irréversible. Les renforcements des contrôles aux frontières américaines suite au 11 septembre 2001 montrent bien que la mondialisation est partiellement réversible, et que les tensions internationales peuvent aujourd'hui encore conduire à une contraction de l'intégration économique internationale. La plupart des clameurs qui s'élèvent contre la mondialisation proviennent des milieux de gauche qui, contrairement à leurs aînés, redoutent davantage la perte des acquis sociaux du 20e et la disparition des emplois des pays industrialisés qu'une baisse de pouvoir d'achat consécutive à une régulation accrue des échanges. [...]
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