Justice sociale face au marché total, Alain Supiot, Friedrich Hayek, esprit de Philadeplhie, économie de marché, France, élections, effet Matthieu, assurance vieillesse, assurance chômage, droit de l'environnement, droit social, Cour de justice des communautés européennes, Reagan, Tatcher
Né en 1949 à Nantes, Alain Supiot est un grand juriste français spécialisé dans le droit du travail, de la sécurité sociale, de la théorie du droit. Il fonde entre autres l'institut français d'études avancées de Nantes. Depuis sa nomination au collège de France en 2012, il enseigne dans cette grande institution française la chaire qui le spécialise et dont il est titulaire, État social et mondialisation : analyse juridique des solidarités. Alain Supiot prend comme base de tout, pour suivre son analyse, la première déclaration internationale des droits à vocation universelle, proclamée le 10 mai 1944, celle de Philadelphie. C'est la marque de la volonté des hommes de reconstruire un nouvel ordre mondial, fondé sur le droit et la justice.
[...] Ainsi l'injustice sociale se base sur des différences plutôt que sur des facteurs socio-économiques (les problèmes dans les banlieues, c'est à cause, non pas du chômage, de la déficience des services publics, mais de l'origine des habitants). La question de la justice est déplacée du terrain de l'avoir vers celui de l'être. Il est nécessaire d'ériger pour Supiot des limites, qui nous protégeraient de l'utopie d'un monde sans frontière, ou de celle où tout le monde se barricade. Cela permettrait aussi de mettre le commerce international au service de la justice sociale. [...]
[...] C'est de ce dogme qu'est née l'OMC, affichant comme une « fin en soi » l'augmentation d'indicateurs économiques quantifiables, l'accroissement de la production et du commerce de marchandises. Le contraste avec la Déclaration de Philadelphie est saisissant, l'humain a disparu ainsi que toute référence à sa liberté, dignité, sécurité économique . Là où l'esprit de Philadelphie envisageait des règles commerciales en accord avec les principes sociaux, l'OMC ne s'en soucie pas et ordonne une ouverture des frontières sans en analyser les effets. C'est un « culte » de l'avantage comparatif. Ainsi, le droit est sur le marché aussi considéré comme un produit en compétition à l'échelle internationale. [...]
[...] Ainsi ils estiment que le Marché peut être régulé par le marché. Mais le problème c'est de réglementer, pour organiser. Autrement dit, il faut renouer avec l'esprit de Philadelphie qui voulait placer l'économie et la finance au service de la dignité humaine et de la justice sociale. La validité des lois est forcément relative. L'idéal démocratique veut que chaque peuple choisisse les règles qui lui sont les mieux adaptées. Ainsi, un régime de droit s'inscrit dans une diversité de territoires soumis à des lois différentes. [...]
[...] la globalisation a fait apparaître de nouvelles techniques de quantification pour mesurer la valeur de ces biens non marchands (on parle de scoring). Mais confondre la mesure et l'évaluation condamne à perdre le sens de la mesure. Pour évaluer, il faut conférer à la mesure un sens. Il faut donc que le marché, sphère de calcul, soit référé à une norme qui échappe au calcul pour fonctionner sans quoi on assiste à une perte de contact avec la réalité. Le chiffre devient un but. [...]
[...] C'est en droit du travail que l'effet Matthieu est le plus manifeste. Les besoins du marché ont détruit les protections là où elles sont les plus nécessaires, les grands patrons se sont octroyé des revenus vertigineux. Pour faire du marché un principe général de régulation de la vie économique, il faut faire comme la terre, le travail, la monnaie, étaient des marchandises, alors que ce n'est pas le cas. Sans droit de l'environnement ou droit social, on ne pourra pas protéger la nature ou les ressources humaines. [...]
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