Pour l'opinion publique, le processus de délocalisations des firmes et unités de production nationales représente une grande menace pour l'emploi. Les médias et la classe politique s'emparent de ce phénomène et n'hésitent pas à en faire « une cause majeure du chômage et de la désindustrialisation » (Michalet, 2007). Le phénomène de délocalisation devient un véritable enjeu politique et donne lieu à des séries de lois et de mesures visant à lutter contre le départ des firmes.
Cependant, les délocalisations sont-elles réellement coupables de ce qu'on les accuse ? Peut-on réellement regrouper tous les phénomènes de désindustrialisation, investissement direct à l'étranger, division internationale du travail et concurrence des pays émergents sous le terme de délocalisations ? Mesurer l'impact réel des délocalisations est un exercice difficile. En effet, aucune donnée officielle directe ne permet de mesurer l'ampleur du phénomène. Au sein même de la discipline économique, les avis divergent quant à la définition du phénomène de délocalisations et de ses impacts sur l'emploi. Cependant, la plupart des économistes s'accordent pour dire que, malgré la menace qu'il représente pour l'emploi non qualifié, le phénomène ne présente que, à l'heure actuelle, des effets limités. Les progrès rapides des technologies de l'information et de la communication ainsi que la libéralisation du commerce international de services, ont engendré un nouveau phénomène : les délocalisations de services.
[...] Il apparaît cependant que les délocalisations, après avoir représenté une menace pour l'emploi industriel et non qualifié des pays développés, touchent actuellement de plus en plus les activités à haute valeur ajoutée et l'emploi qualifié. La mondialisation affecte certainement l'emploi dans les pays développés. L'opinion publique, les politiques et certains économistes insistent sur les destructions d'emploi qu'engendrent les délocalisations. Qu'en est-il réellement ? Certaines études montrent qu'une augmentation de l'emploi des grandes firmes à l'étranger conduit aussi à une augmentation de l'emploi et de la production dans ces mêmes firmes dans le pays d'origine. En outre, la France est aujourd'hui la principale destination de l'investissement direct à l'étranger en Europe. [...]
[...] Cette approche, aussi originale soit-elle, présente de nombreuses limites. Selon un autre rapport de l'OCDE (2007a), la signification très relative du mot potentiellement la méthode d'évaluation et les différences d'appréciation des pays quant à l'évaluation du contenu en TIC d'une catégorie d'emploi par occupation, empêchent une évaluation empirique de l'impact potentiel des délocalisations sur l'emploi. En outre, nous ne pouvons en conclure que les emplois susceptibles d'être affectés par les délocalisations seront effectivement délocalisés. De nombreuses forces jouent en sens contraire, comme la qualité du service fourni, le respect de la propriété intellectuelle, la facilité à arbitrer les différents commerciaux devant les tribunaux, (Fontagné et Peeters, 2007). [...]
[...] Il apparaît cependant, à la vue des résultats de leur étude, que les délocalisations au sens strict en France ont un impact direct relativement faible sur l'emploi. Aubert et Sillard (2005) soulignent un autre phénomène important, qui vient à l'encontre des idées reçues : légèrement plus de la moitié des délocalisations françaises sont dirigées vers d'autres pays développés. Il semble en effet que près de 53% des emplois délocalisés soient relocalisés dans les pays du Nord, principalement l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne. [...]
[...] Tandis que les pays émergents sont spécialisés dans les activités manufacturières, les pays du Nord se tournent vers les activités tertiaires à forte valeur ajoutée qui nécessitent une main-d'œuvre hautement qualifiée. Cette spécialisation devrait, à terme, profiter à toutes les économies du Nord et du Sud puisqu'elles bénéficient d'un avantage comparatif, d'après la formule de Ricardo. La théorie économique prévoit qu'à long terme, au fur et à mesure que les économies flexibles s'ajusteront, chaque économie devrait tirer profit de la mondialisation et de la spécialisation qu'elle engendre (OCDE, 2006). [...]
[...] Ces délocalisations à l'envers créent aussi des emplois (Martin, 2004). Une mesure de l'impact réel de la mondialisation et des délocalisations sur l'emploi semble difficile à mener. Rendre les délocalisations responsables du chômage est un exercice facile, en particulier parce que les chiffres sont rares sur le sujet (Martin, 2004). Cependant, les études récentes menées sur les nouvelles tendances de délocalisations remarquent l'émergence d'un phénomène nouveau et inquiétant pour les pays du Nord : les délocalisations de services et d'activités à forte intensité de connaissances. [...]
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