« Les marchés financiers […] ont une part de responsabilité dans la situation actuelle », c'est ce qu'a pu déclarer Jean-Yves Capul évoquant la crise que nous traversons aujourd'hui. Mais plus encore que les marchés en eux-mêmes, il apparaît plutôt que ce sont deux phénomènes - l'ouverture des marchés et la globalisation financière - qui ont une part de responsabilité dans la crise.
Notons d'emblée que le terme de crise sera entendu ici dans un sens plutôt large, à la fois celui de crise boursière et de crise bancaire et de change, car il apparaît que même si la crise actuelle est apparue inattendue, en réalité elle est une crise de la globalisation et elle présente les mêmes caractéristiques qu'un certain nombre d'autres crises ayant eu lieu depuis le début des années 1980.
Ainsi, il est intéressant de s'interroger sur le paradoxe suivant : comment expliquer que la constitution d'un marché mondial intégré des biens et des capitaux qui répondait initialement à un besoin de l'économie réelle pour améliorer la croissance ait pu tenir un rôle de premier plan dans le déclenchement des crises depuis le début des années 1980, en particulier dans celui de la crise que nous traversons depuis 2008 ?
[...] Il apparaît finalement que sans renier les avantages tirés de la constitution d'un marché mondial intégré à l'échelle internationale, il faut avouer que les processus qu'une telle évolution structurelle a induit tiennent un rôle de premier plan dans le déclenchement des crises dites de la globalisation et en particulier dans la crise actuelle. Et si de tels processus ont pu toucher des économies développées, il faut noter que le risque de leur éclatement est accru dans les pays émergents du fait d'un processus de libéralisation financière qui ne s'est pas accompagnée de la mise en place d'un cadre qui permettrait de stabiliser effectivement le secteur bancaire et financier. [...]
[...] Autrement dit, l'interdépendance induite est aussi fonctionnelle. Pour reprendre la typologie de Bourguinat, le deuxième D est celui du décloisonnement. La globalisation financière a induit l'interconnexion de tous les marchés d'actifs celui du change, valeurs mobilières . - et le développement d'une multitude d'opérateurs financiers qui menacent de transformer la moindre défaillance en une crise généralisée : c'est le risque systémique. Désormais les différents agents financiers peuvent donc agir sur plusieurs compartiments des marchés financiers en plus de pouvoir miser sur plusieurs places géographiques. [...]
[...] Or, ces nouvelles pratiques issues de l'ouverture des marchés rendent la compréhension des relations économiques et financières plus opaques : c'est un nouvel argument qui peut être vu comme responsable de la crise. D'ailleurs, le troisième D décrit par Bourguinat est celui de la désintermédiation. Cela consiste en le recul des intermédiaires financiers traditionnels, les banques, dans le financement global de l'économie. De plus, cela a été le corollaire d'un processus de multiplication des innovations financières qui vont entraîner une très forte opacité des marchés, car en multipliant les outils et les opérations, l'on ne sait progressivement plus qui s'est engagé. [...]
[...] En effet, la banque peut tenter de gagner sur les deux tableaux : recevoir des intérêts et si l'entreprise fait défaut recevoir la totalité de la somme de la créance grâce à l'assureur. L'affaire de la banque Golden Sachs et des obligations grecques montre que ces CDS peuvent même servir à spéculer contre des États ! Mais en plus de mettre l'accent sur la complexité des opérations, cette dernière affaire montre à quel point il est difficile d'avoir une idée concrète des relations existants entre les différents acteurs. [...]
[...] Ce phénomène a par exemple joué lors du déclenchement de la crise thaïlandaise. En effet, si les entrées de capitaux y ont atteint des sommes faramineuses, c'est du fait d'un enthousiasme excessif envers ce pays qui était alors l'incarnation du miracle asiatique En outre, le même phénomène a joué lors de la crise mexicaine de 1994:à partir des années 1990 on a pu assister à l'affluence de capitaux étrangers, car l'ouverture accrue de la sphère économique et financière mexicaine a pu faire croire aux investisseurs à des perspectives heureuses sur le territoire mexicain. [...]
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