Que l'on parle de « paradis fiscal », de « port » ou « havre fiscal » (tax haven en anglais) ou encore d'« oasis fiscal » (steueroase en allemand), il ne faut pas se laisser tromper par l'image traditionnelle de petites îles exotiques abritant des banques en marge du système financier international. S'inscrivant aussi bien dans une dimension financière que dans une dimension productive, les centres financiers offshore participent pleinement à la dynamique actuelle de la mondialisation, à entendre ici dans son acception de mutation de l'espace mondial caractérisée par une intensification des échanges internationaux de biens et services autant que d'hommes et de capitaux.
Il convient d'éclairer précisément la relation qui lie les notions de paradis fiscal et de mondialisation. Y a-t-il une relation de cause à effet entre le processus actuel d'accroissement des échanges et le développement des centres offshore ? La mondialisation que nous connaissons aujourd'hui résulte-t-elle de l'apparition de ces acteurs sur la scène internationale ? Si tel est le cas, aurait-elle été possible sans leur concours ? Si les paradis fiscaux ne sont pas à la source de la mondialisation, en revanche, le processus a-t-il au moins bénéficié de leur émergence ? Les paradis fiscaux sont-ils eux-mêmes le produit de la mondialisation, et les deux phénomènes se sont-ils alors nourris l'un l'autre ?
Pour tenter de déterminer comment s'articulent espace mondial et paradis fiscaux, nous nous proposons dans un premier temps de souligner le rôle essentiel joué par les paradis fiscaux dans l'organisation de l'espace mondial actuel. Dans un second temps, nous nous efforcerons d'analyser les liens historiques entre le phénomène de mondialisation et celui du développement des paradis fiscaux pour tenter de faire la part de chacun dans la forme prise par l'autre.
[...] Il convient d'éclairer précisément la relation qui lie les notions de paradis fiscal et de mondialisation. Y a-t-il une relation de cause à effet entre le processus actuel d'accroissement des échanges et le développement des centres offshore ? La mondialisation que nous connaissons aujourd'hui résulte-t-elle de l'apparition de ces acteurs sur la scène internationale ? Si tel est le cas, aurait-elle été possible sans leur concours ? Si les paradis fiscaux ne sont pas à la source de la mondialisation, en revanche, le processus a-t-il au moins bénéficié de leur émergence ? [...]
[...] Conclusion Le modèle de développement d'un territoire en paradis fiscal est né et s'est diffusé dans un contexte de mondialisation. En retour, les centres offshore ont contribué à l'intensification des échanges internationaux en consacrant la mobilité des capitaux. Si bien que mondialisation et paradis fiscaux sont aujourd'hui inextricablement mêlés : les acteurs confrontant leurs stratégies au niveau international ont pleinement intégré à leurs calculs les avantages, les risques et les inconvénients qu'offrent les paradis fiscaux, et s'efforcent d'en tirer le meilleur parti. [...]
[...] D'abord, les paradis fiscaux peuvent servir les intérêts d'acteurs étatiques. D'une part, ils répondent bien sûr à la stratégie de développement de leur propre territoire. Il faut cependant noter que le profit retiré de ce choix n'est pas évident : la richesse ne contribue pas à la réduction des inégalités profondes régnant au sein de ces pays, et la dépendance de ces économies à un seul type d'activités est problématique. Seules les plus grosses places financières semblent aujourd'hui tirer leur épingle du jeu. [...]
[...] Troisièmement, l'activité doit être tournée vers cet extérieur, c'est-à-dire ouverte sur le monde et intégrée aux circuits internationaux. Quatrièmement, la fiabilité est indispensable : une infrastructure de technologie de l'information de haut niveau, une bonne image de marque ainsi qu'une stabilité économique et politique sont autant d'éléments essentiels au territoire. Ces critères mettent en évidence la diversité des acteurs se partageant le marché des services financiers offshore. Les quelque 80 territoires généralement reconnus comme paradis fiscal couvrent ainsi une gamme s'étendant des grandes places financières (Londres, New York et Tokyo), représentant du marché, aux places exotiques très peu coopératives (par exemple les Bahamas, les îles Marshall et Cook) ou relativement coopératives (par exemple le Liechtenstein, les Bermudes et les îles Caïman), représentant du marché, en passant par les pays développés à réglementation attractive (Pays-Bas, Irlande, Suisse, Luxembourg), représentant du marché[4]. [...]
[...] Divers instruments juridiques sont à la disposition des entreprises soucieuses d' optimisation fiscale Une pratique courante consiste par exemple en la manipulation des prix de transfert auxquelles les différentes entreprises d'un même groupe se vendent biens et services. Les institutions financières, banques, assurances et fonds d'investissement, profitent de même des avantages que leur procurent ces centres financiers. Enfin, les paradis fiscaux confrontent également des acteurs individuels. D'un côté, ils comptent comme clients les personnes fortunées souhaitant réduire leurs impôts. De l'autre, ils permettent que se déploient les talents des professionnels du droit et du chiffre sans lesquels nul ne pourrait tirer parti de la mécanique complexe de ces centres financiers. [...]
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