Comment sont pensées les relations entre marchés et morale ? Quelles connexions existent-il entre ces deux champs conceptuels ? Un élément de réponse est apporté par la Wildlife Works, entreprise étatsunienne, qui vend des t-shirts sous le slogan « des produits aussi bons pour la planète que pour ta conscience ». En luttant contre la déforestation par l'intermédiaire du programme REDD des Nations Unies, la Wildlife Works propose des produits exclusivement « carbon neutral ». Cet exemple, qui s'inscrit dans une logique contemporaine plus vaste (agriculture biologique, commerce équitable, etc.), ne représente pas un recul du marché face à une injonction morale de protection de la planète : la Wildlife Works n'est pas une association à but non lucratif, mais bien une entreprise qui vise au profit, via des arguments de vente faisant appel à des critères moraux de respect de l'environnement.
[...] L'argumentaire décroissant peut également constituer un recours : quand bien même le marché s'approprierait efficacement des mécanismes de protection de l'environnement, le productivisme qui lui est inhérent mènerait nécessairement un jour ou l'autre, sauf avancement technologique permettant des modes de production intégralement durables (usage d'énergies intégralement renouvelables et obtenues grâce à des matériaux intégralement recyclables), à l'épuisement des ressources de la planète. Au-delà de ces arguments, les tenants de la vision du marché destructeur estiment de toute façon que la généralisation des marchés et leur extension à des biens communs, publics, ou moraux, a des effets destructeurs. Dans le cas qui nous intéresse, le marché du carbone, des stratégies opportunistes ou effets pervers sont généralement dénoncées. L'exemple de la Wildlife Works se prête parfaitement à cette analyse. [...]
[...] Ils achètent sans contrôle des forêts à travers le monde pour échanger des crédits carbones forestiers sur la bourse du carbone dite volontaire. Une difficulté des projets qui sont encore des projets pilotes de la REDD, est qu'il faut établir que ces forêts sont réellement menacées, et s'assurer que la conversation d'une forêt n'entraîne pas l'accélération de la déforestation d'une forêt voisine. Une autre, qui rejoint l'analyse en termes d'effets pervers évoquée plus haut, est celle du flou juridique qui entoure la propriété privée dans de nombreux pays du Sud, faisant des communautés locales les premières victimes de ces achats de forêt. [...]
[...] Les défenseurs de la vision du marché civilisateur peuvent répondre que les problèmes résultent essentiellement d'un cadre juridique trop flou, alors que les règles du marché doivent être claires pour un fonctionnement optimal. Noémie Bisserbe, Les chasseurs de carbone Revue XXI, N°16/2011. REDD est l'acronyme anglais pour Reducing emissions from deforestation and forest degradation, en français Réduire les émissions de CO2 provenant de la déforestation et de la dégradation des forêts Voir http://wildlifeworks.com/ A ce stade de la crise écologique, nous sommes bien face à une à une injonction morale, de responsabilisation, non de survie. [...]
[...] La Banque Mondiale estime le marché des crédits carbone à près de 100 milliards d'euros en 2010. Le marché européen de permis pèse pour plus de 83%. Il est de loin le plus important, mais il existe également de nombreux marchés volontaires peu réglementés, où les entreprises achètent des crédits carbone simplement pour soigner leur image, ou en espérant les revendre plus chers. Le protocole de Kyoto vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre par des mesures concrètes. [...]
[...] Morale et marchés : les crédits Carbone forestiers au Kenya Comment sont pensées les relations entre marché et morale ? Quelles connexions existent entre ces deux champs conceptuels ? Un élément de réponse est apporté par la Wildlife Works, entreprise étatsunienne, qui vend des t-shirts sous le slogan des produits aussi bons pour la planète que pour ta conscience En luttant contre la déforestation par l'intermédiaire du programme REDD[2] des Nations Unies, la Wildlife Works propose des produits exclusivement carbon neutral Cet exemple, qui s'inscrit dans une logique contemporaine plus vaste (agriculture biologique, commerce équitable, etc.), ne représente pas un recul du marché face à une injonction morale de protection de la planète[4] : la Wildlife Works n'est pas une association à but non lucratif, mais bien une entreprise qui vise au profit, via des arguments de vente faisant appel à des critères moraux de respect de l'environnement. [...]
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