La mondialisation a mis en exergue un monde profondément inégalitaire, qu'il s'agisse d'accès à la santé, à l'éducation ou à un travail décent. Inégalités fragrantes entre pays en développement et pays développés, mais aussi au sein même de ces pays, une minorité d'actionnaires s'enrichissant toujours davantage en captant la valeur ajoutée aux dépens des travailleurs. Dans cette tourmente, un processus a pris une importance croissante et profondément choqué nos concitoyens par sa violence : il s'agit des délocalisations qui conduisent des entreprises à déménager leur outil de production, parfois en l'espace de quelques jours, dans des pays à bas salaires. Ce phénomène, ignoré avec obstination par les économistes, est le résultat d'une course effrénée au moins-disant social et fiscal désormais réalisée à l'échelle mondiale et pour chaque segment de la chaîne de la production. Ainsi des pièces d'usinage pour l'automobile peuvent être réalisées en République Tchèque, assemblées en Chine, pour finalement être vendues en France, tandis que la comptabilité et l'informatique de l'entreprise ont été externalisées en Inde. Apparaissent ainsi des « entreprises sans usine ». Les délocalisations figurent parmi les inquiétudes majeures de nos sociétés. Faute d'accepter des droits sociaux et des revenus dévalués, les salariés des pays avancés seraient, selon une perception largement partagée, condamnés à voir leurs emplois émigrer vers des régions à faible coût de travail, du lointain géant chinois jusqu'aux voisins d'Europe de l'Est.
Cette tendance apparaît d'autant plus implacable qu'elle résulte de la volonté d'acteurs puissants et bien identifiés : les marchés financiers. Les actionnaires imposeraient aux dirigeants des objectifs irréalistes de rentabilité financière à court terme, que ces derniers s'efforceraient d'atteindre coûte que coûte en mobilisant pour cela les moyens les plus expéditifs, dont les délocalisations.Les délocalisations sont elles une fatalité, un passage obligé de la mondialisation ?
La réponse à cette question passe par l'étude des délocalisations en tant que symptôme d'une mondialisation dérégulée (I) avant de nous pencher sur les remèdes à la délocalisation (II).
[...] La lutte contre le dumping social Les délocalisations sont en effet principalement motivées par le différentiel de coût salarial dans des activités à forte intensité de main- d'œuvre. Une approche strictement arithmétique conduit naturellement les multinationales, dont les actionnaires réclament toujours plus de bénéfices, à établir pour chaque segment de la chaîne de production une étude comparative par pays des coûts et à transférer leurs usines dans des pays émergents où les niveaux de salaires sont très bas, la protection sociale quasi inexistante et les droits fondamentaux souvent bafoués. [...]
[...] Si la BRI prend comme exemple le Japon, chacun a en tête les nombreux cas d'entreprises allemandes (Siemens, Daimler Chrysler ) qui ont réussi à négocier des réaménagements d'horaires ou de salaires sans autre contrepartie que l'abandon d'un projet de délocalisation. Tout cela dans un pays souvent présenté comme un modèle en matière de relations sociales. Enfin, sans même être brandies comme une menace, les délocalisations concourent à alimenter un climat anxiogène au sein des entreprises, qui incite les salariés à ne plus demander de revalorisations salariales et érode leur foi en l'avenir. [...]
[...] De façon plus générale, par leur caractère brutal, les délocalisations mettent à mal tout notre édifice social. Elles dégradent les finances publiques, empêchant par là même la conduite de politiques publiques ambitieuses visant à la réduction des inégalités ou à la réalisation d'infrastructures de qualité, et remettent en cause la pérennité de notre système de protection sociale. Leurs effets sont concentrés sur les travailleurs les moins qualifiés, qui, faute d'avoir bénéficié d'une formation suffisante et en raison souvent d'un âge avancé, n'ont guère de chance de pouvoir retrouver un travail ou de se reconvertir notamment lorsque plusieurs plans sociaux se succèdent dans le même bassin d'emploi, situation hélas qui tend à se banaliser. [...]
[...] Cette tendance apparaît d'autant plus implacable qu'elle résulte de la volonté d'acteurs puissants et bien identifiés : les marchés financiers. Les actionnaires imposeraient aux dirigeants des objectifs irréalistes de rentabilité financière à court terme, que ces derniers s'efforceraient d'atteindre coûte que coûte en mobilisant pour cela les moyens les plus expéditifs, dont les délocalisations. Les délocalisations sont elles une fatalité, un passage obligé de la mondialisation ? La réponse à cette question passe par l'étude des délocalisations en tant que symptôme d'une mondialisation dérégulée avant de nous pencher sur les remèdes à la délocalisation (II). [...]
[...] L'exploitation des hommes se double aussi d'une exploitation de l'environnement : la Chine n'hésite pas à accueillir des usines polluantes, en permettant à certains grands groupes de continuer à produire à bas coût et de s'affranchir des nouvelles normes environnementales en vigueur dans les pays occidentaux ; résultat : le tiers du territoire chinois est désormais soumis à des pluies acides. Enfin, il n'est pas possible de considérer comme certains que les délocalisations sont le prix à payer pour la croissance des pays en développement. [...]
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