Dans ce mémoire, nous nous sommes intéressées à l'impact des délocalisations dans les économies de la zone euro. Mais qu'entend-t-on par « délocalisation » et à quoi correspond l'appellation « économies de la zone euro » ? La délocalisation peut être définie comme « la fermeture d'une unité de production en France, suivie de sa réouverture à l'étranger, en vue de réimporter sur le territoire national les biens produits à moindre coût et/ou de continuer à fournir les marchés d'exportation à partir de cette nouvelle implantation » (définition donnée dans le rapport de L. Fontagne et JH Lorenzi Désindustrialisation, délocalisations). Quand aux pays appartenant à la zone euro, il s'agit de l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, l'Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, l'Irlande, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal et la Slovénie. Lors de la campagne référendaire en France en 2005, le phénomène de délocalisation a souvent été dénoncé comme le symbole du climat d'insécurité sociale dont souffre le pays. L'Allemagne n'a pas non plus été épargnée, le débat portant davantage sur les pressions que subit le « modèle allemand », avec des « réactions hostiles aux prises de participation étrangères dans le capital des entreprises » (rapport F. Sachwald). Ainsi, au-delà des spécificités conjoncturelles nationales, ou aux arguments de campagne électorale, les délocalisations soulèvent une polémique acharnée au sein de la zone euro, au point qu'on en oublierait presque qu'on peut d'abord les analyser –ainsi que leur impact -comme un phénomène économique.
[...] Cependant, si l'on se réfère au tableau qui s'appuie sur la délocalisation de firmes allemandes dans les PECO, on comprend que la productivité du travail dans les filiales des entreprises allemandes implantées en Europe de l'Est est bien supérieure (de 20% à à cette productivité moyenne dans le pays domestique Cela peut s'expliquer par une importation de technologies et de capital qui permet un gain de productivité ou bien par un effet de sélection dans la mesure où les secteurs où ont lieu les investissements directs à l'étranger sont les secteurs dans lesquels les pays de destinations ont un avantage comparatif, et donc pour lesquels le différentiel de productivité, et donc pour lesquels le différentiel de productivité est moindre que la moyenne Daniel Cohen conclut ainsi que le coût unitaire pour les entreprises qui délocalisent est en baisse de 40% à 70%. Cette remarque est d'importance, car elle permet de donner une explication rationnelle des délocalisations sans ignorer le facteur travail. Cependant, abstraction faite de toute manipulation médiatique, l'adéquation entre logiques économique et sociale ne va pas de soi. [...]
[...] Le coût d'ajustement s'estime par les distorsions de main-d'œuvre qu'il implique. En effet, l'indemnité a plusieurs conséquences, qu'elle prenne la forme d'une indemnité chômage ou d'une assurance salaire. Les graphiques rendent compte de la faiblesse des taux de retour à l'emploi, témoignant qu'une perte d'emploi se traduit facilement par une cessation d'activité. Enfin, si la réinsertion ne va pas forcément de pair avec une perte de salaire, mais plutôt avec une stagnation ou une amélioration des salaires et si les pertes de salaires touchent en moyenne des personnes réinsérées, la synthèse de ces données incite plutôt à penser que les travailleurs victimes de suppressions d'emplois dues aux échanges risquent davantage une perte de salaire lors du retour à l'emploi que les autres travailleurs victimes de licenciement. [...]
[...] Enquête auprès de 100 entreprises moyennes, Assemblée des chambres françaises du commerce et de l'industrie, Novembre 2005, p61. et 4 Sénat, session ordinaire 2003-2004, Rapport d'information n°374, par M. Francis Grignon, p Daniel Cohen, Les effets du commerce international sur l'emploi dans les pays riches in Délocalisations, normes du travail et politiques d'emplois. Vers une mondialisation plus juste Ed. La Découverte, Paris Raymond Torres, L'accompagnement social de la mondialisation : atout ou aspirine ? , in Délocalisations, normes du travail et politiques d'emplois. [...]
[...] Du reste, l'innovation en rapport aux délocalisations est un point très sensible. L'innovation comme moteur d'une destruction créatrice ne vaut que si elle s'applique dans le pays qui délocalise. Le danger se fait voir à partir du moment où c'est l'innovation elle-même qui est délocalisée. En effet, il faut moins craindre une délocalisation par le bas de la production banalisée ou faiblement rentable qu'une délocalisation par le haut, concernant directement les domaines de recherche et développement, ou ladite fuite des cerveaux hors de la zone euro. [...]
[...] Les difficultés liées à l'évaluation de l'impact des délocalisations sur les économies de l'ensemble de ces pays résultent de l'absence d'une situation contrefactuelle, c'est-à-dire ce qui se serait passé si les délocalisations n'avaient pas eu lieu. En outre, l'impact perçu par les populations diffère souvent de l'impact réel, ce qui appelle à une évaluation des gains présumés impliqués par les délocalisations notamment pour la compétitivité des entreprises européennes et la hausse du chômage pour les populations qui en découlerait automatiquement. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture