Ses travaux ne se situent pas dans une dynamique historique analysant l'évolution des droits et les liens entre l'accumulation, le pouvoir et leur répartition. Sen n'analyse pas non plus comment la démocratie se construit par des luttes. Mais il a posé les grandes questions de notre temps, celle du chômage déguisé, de la pauvreté, de la famine, des choix sociaux et des conflits entre la liberté et l'équité. Il a apporté des réponses fondées scientifiquement et situées éthiquement
[...] La liberté individuelle se compose tout d'abord d'une liberté positive et d'une liberté négative. La première représente ce qu'une personne, toutes choses prises en compte, est capable ou incapable d'accomplir. La deuxième est la capacité ou l'incapacité d'accomplir un acte qui ne serait pas dû à des entraves à la liberté d'accomplir. A partir de là, Sen rappelle la tradition utilitariste qui privilégie les résultats accomplis sur la liberté d'accomplir et les théories de Rawls qui donnent une priorité à la justice individuelle comme base de l'(in)égalité par rapport à la distribution des biens premiers qui permettent de poursuivre librement les objectifs. [...]
[...] Le bien-être pour Sen n'est dans ce sens pas matériel comme certains auteurs l'avancent, mais bien plus philosophique puisque chaque être est unique et qu'il a en conséquence des besoins et des attentes uniques. Pour satisfaire ces attentes, il ne s'agit donc pas d'augmenter les biens matériels des individus, mais leur capacité capabilité à les obtenir, à obtenir ce qu'ils désirent, et ce, quel que soient leurs (degrés de) désirs. C'est là certainement l'idée fondamentale de ces deux essais puisque comme le montrera l'auteur, cette prise en compte des capabilités influencera la gestion publique des ressources. [...]
[...] Sen Amartya, l'économie est une science morale I. Amartya Sen : économiste du développement et théoricien du bien-être Né à Santinikitan, au Bengale, en 1933, Sen a été l'élève, à Trinity College, de Dobb, Sraffa, Robertson et Joan Robinson. Il a été influencé par la lecture des grands auteurs, tels Smith et Marx. En revanche, Keynes est très peu mobilisé dans ses travaux. Sen, et c'est là sa particularité majeure, a une conception normative de l'économie, conçue comme une science qui doit être guidée par la morale. [...]
[...] Comme l'indique le titre de l'ouvrage, l'économie devient une science morale. En ce qui concerne les deux essais ici présents, leur apport est fondamental en cela qu'ils apportent un regard nouveau sur des notions comme la liberté. Habitué à connaître cette notion sous l'angle du libéralisme économique, là, Sen l'applique et la transforme en ce que l'on pourrait appeler un libéralisme social ; c'est à dire que la liberté n'est plus celle économique d'entreprendre par exemple, mais c'est la liberté comme fondement de l'individu et de la société. [...]
[...] Pour Sen, la pauvreté est en fait un manque de capabilités plus qu'un manque matériel. Par exemple, un homme vivant à Harlem (USA) aura moins de chances d'atteindre 40 ans qu'un homme vivant dans un Bengladesh affamé ; et pourtant, l'homme d'Harlem est plus riche, mais sa liberté positive est réduite. Pour ce qui concerne le cas des famines, c'est à dire l'incapacité des individus à pouvoir acquérir de la nourriture, le problème soulevé par la famine de 1974 au Bengladesh fait ressortir non pas un problème d'approvisionnement en nourriture mais un problème de droit d'appropriation de la nourriture que les groupes vulnérables peuvent faire valoir. [...]
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