Les auteurs montrent que la force du capitalisme est de savoir se servir des critiques qui lui sont proférées en les intégrant dans ses fondements : « la capacité du capitalisme à entendre la critique constitue sans doute le principal facteur de la robustesse qui a été la sienne depuis le XIXe siècle. » C'est grâce à la récupération de la critique artiste dont l'expression majeure est mai 68 que le capitalisme s'est revivifié, intégrant des éléments qu'il refusait du temps de l'apogée fordiste
[...] A l'heure actuelle on constate un renouveau de la critique du capitalisme s'appuyant sur les préjudices causés par le libéralisme, la mondialisation ou la marchandisation de la société. Parmi les acteurs de ce renouveau, on pouvait compter Pierre Bourdieu comme un des intellectuels de référence portant son regard sur la société actuelle et les maux engendrés par les politiques néo-libérales. Il manifestait la volonté de créer un mouvement social européen1 capable de lutter à armes égales avec la rhétorique libérale invariablement admise et qui s'impose de plus en plus en Europe par l'intermédiaire de gouvernements inspirés par le social-libéralisme et qui n'ont de social que le nom. [...]
[...] Les institutions internationales libérales ont compris que pour maintenir leur influence, elle devait investir dans des opérations de relations publiques. Certains signes peuvent laisser penser que le phénomène de récupération est déjà en marche comme la mise en place de marché de droits à polluer pour satisfaire les attentes écologistes de certains ou encore l'hypocrisie de la démocratie actionnariale dénoncée par Frédéric Lordon5. Pour cela la critique (et non les critiques) devra s'attacher à affronter le capitalisme dans ses fondamentaux, c'est à dire partant de sa définition minimale définit par les auteurs : exigence d'accumulation illimitée du capital par des moyens formellement pacifiques en posant la question de la légitimité de cette accumulation au regard des misères sociales. [...]
[...] Sur le fond, ces différentes volontés peuvent être rattachées à la critique sociale décrite par les auteurs du nouvel esprit du capitalisme C'est en effet la face la plus visible et la plus active de la critique du capitalisme. La critique artiste est plus effacée du fait de son intégration historique par le nouvel esprit du capitalisme. Néanmoins on observe dans certains milieux, à commencer par celui de la culture, des voix s'élever contre le fonctionnement actuel et futur de la société et en particulier de l'économie. [...]
[...] Mais les contestataires sont désunis. Les ouvriers se méfient des étudiants, ainsi la CGT et le PC, très hostile au gauchisme, préfèrent à l'inconnu le maintien du pouvoir en place. Les Français se lassent du désordre général engendré par la révolte et le font s'avoir aux législatives de juin 68 en donnant une écrasante majorité à la droite (plus de 75% des députés). On constate ainsi la divergence des deux critiques qui n'ont pas su s'unir pour faire effectivement entendre leurs revendications. [...]
[...] C'est grâce à la récupération de la critique artiste dont l'expression majeure est mai 68 que le capitalisme s'est revivifié, intégrant des éléments qu'il refusait du temps de l'apogée fordiste. La critique artiste a été absorbée tout en étant transformée. Ses tenants demandaient la délivrance d'un système ou d'une situation d'oppression, il y a bien eu une meilleure autonomie mais au prix d'un renforcement de l'autocontrôle, du contrôle informatique et surtout d'une détérioration de la sécurité de l'emploi. Un nouveau capitalisme, connexionniste, va alors se mettre en place, organisé en réseau, mobile, flexible, avec des salariés autonomes, créatifs et internationalisés. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture