Paru en 1998, ce livre apparaît comme une synthèse des principaux débats sur l'emploi à l'aube du XXIème siècle. Béatrice Majnoni d'Intignano pose un problème simple : 'de quel charbon l'Europe en général et la France en particulier alimentent-elles leur usine à chômeurs', alors même que les potentialités dont elles disposent sont énormes ? Synthèse et commentaire critique
[...] Béatrice Majnoni d'Intignano évoque ensuite le problème du SMIC français, qui est passé de 40 à 50% du salaire moyen depuis 1975, alors que dans le même temps le salaire minimum américain a suivi une progression inverse, passant de 50 à 38%. D'un salaire minimum bas et d'un emploi facile, on est passé à un salaire minimum plus élevé et à un emploi beaucoup plus difficile. Y aurait-il une corrélation entre les deux termes ? Le privilège du fonctionnaire protégé tend à accréditer l'idée selon laquelle il existe bien une "exception française", au moment où l'emploi de l'ouvrier ou du cadre est de plus en plus précaire. Le privilège des grandes entreprises enfin contraste avec l'éviction des PME et des PMI. [...]
[...] Plutôt qu'une critique tous azimuts, l'ouvrage s'appuie sur des données chiffrées en tenant compte des comparaisons internationales pour dresser un bilan, avant de dénoncer les fausses solutions professées par les nostalgiques de l'étatisme et de l'Etat keynésien, pour enfin proposer son schéma d'explication. En somme, l'usine à chômeurs constitue une approche originale d'un phénomène qui nous est familier, et il offre un éclairage intéressant sur la manière dont l'appréhendent nos sociétés européennes. Enfin, il ne devrait pas manquer d'alimenter le moulin des pourfendeurs de la "pensée unique" . [...]
[...] Cependant quelques points méritent réflexion. le systématisme de certaines affirmations La thèse d'une Europe exception mondiale quant à l'existence d'un chômage structurel et statique tend à être relativisée. "Pourquoi la croissance reste-t-elle forte aux Etats-Unis et dans le reste du monde s'interroge l'auteur. Or ce que l'on appelle aujourd'hui la crise asiatique remet en cause -partiellement il est vrai- le schéma optimiste développé par l'auteur : le Japon revoit sa croissance à la baisse et fait l'expérience amère de la montée du chômage et d'une contraction de la demande liée à la perte de confiance en l'avenir. [...]
[...] Protection sociale mais chômage, contre emploi mais pauvreté. Cependant l'auteur réfute les manichéismes dans ce domaine : la pauvreté n'est guère plus importante aux Etats-Unis qu'en Europe contre alors que le chômage y est deux fois moindre. Ce choix européen n'est pas le bon choix pour l'auteur, lequel rappelant que la sève économique de la nation étant l'activité, quelle qu'elle soit. Or depuis 1970, la population française s'est accrue de 6 millions, l'emploi de seulement 1 million, le nombre de chômeurs de 2,5 millions et le nombre d'inactifs de 3 millions : ainsi le revenu de plus de 6 millions de personnes supplémentaires doit être assuré par un emploi privé constant. [...]
[...] Béatrice Majnoni d'Intignano estime que les critères démographiques ne doivent pas être négligés dans la compréhension de la situation européenne. Là porte en effet l'un des points essentiels de la critique de l'auteur : elle s'érige contre les courants de pensée d'inspiration malthusienne (que ce soit d'un point de vue démographique ou économique) véhiculés par de plus en plus d'économistes qui se fondent sur le mauvais exemple des PED (leur situation ne peut en effet se calquer sur la nôtre). [...]
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