Cet ouvrage très récent (avril 2002) propose une traduction inédite de quatorze productions de Keynes élaborées entre 1925 et 1937. Si ce recueil peut déconcerter par le caractère éclectique des textes qui la composent, il présente pourtant au moins un triple intérêt : il témoigne à la fois du climat de confusion régnant autour et parmi les économistes confrontés à la récession engagée dès 1929, du détachement progressif de l'orthodoxie classique de l'auteur, et de sa volonté d'y substituer un modèle théorique alternatif à même de comprendre les dynamiques économiques à l'œuvre et de permettre une action politique efficace
[...] Comme nous le verrons par la suite, le capitalisme semble pour Keynes le seul système capable de conduire l'humanité à l'abondance, éludant de manière définitive le problème posé par la subsistance alimentaire. Si Keynes se livre à de telles prophéties, c'est bien la preuve de sa foi indéfectible dans ce système. On aurait pourtant évidemment tort d'y voir là une admiration béate du système. Keynes est trop bon observateur de son temps pour ne pas comprendre les profonds dysfonctionnements dont souffre le capitalisme, et dont la crise de 1929 offre l'exemple le plus aigu. [...]
[...] Si un ralentissement de cette croissance est possible, il n'en reste pas moins qu'il s'agit là d'une tendance lourde laissant présager des évolutions évoquées précédemment. Une fois résolu ce problème économique Keynes prophétise que pour la première fois depuis sa création, l'homme sera confronté à son problème véritable et permanent : quel usage faire de sa liberté, une fois dégagé de l'emprise de ses préoccupations économiques ? Au risque de paraître excessif, peut- être est-il possible de voir dans cette dernière prophétie la préfiguration des thèses particulièrement en vogue à la fin du siècle de la fin du travail Pour finir, voyons de quelle manière Keynes dans Quelques conséquences du déclin de la population analyse-t-il le ralentissement, voire l'arrêt de la croissance démographique que vont rencontrer de manière quasi-certaine les économies développées au siècle. [...]
[...] Suivant le même cheminement de pensée, Keynes tente d'expliquer l'apparition des bulles spéculatives. Celles-ci proviennent de l'incapacité des marchés financiers à coordonner des décisions sur l'avenir comme l'épargne et l'investissement. Ceux-ci ne possèdent pas en effet les informations sur le futur qui auraient permis des anticipations sur le long terme. On voit donc que le problème posé par la relation et plus particulièrement par la coordination entre ces deux variables constitue l'ossature du nouveau modèle théorique proposé par Keynes. Dans sa démarche d'analyse macroéconomique, Keynes propose de ne plus raisonner en terme d'équilibre sur les marchés, mais de tenter d'expliquer dans une perspective dynamique les variations des grandeurs agrégées de l'économie. [...]
[...] Ce travail de refonte théorique est donc pour Keynes le préalable nécessaire pour sortir de l'impuissance manifeste des politiques économique menées alors. Des 1931 dans son Analyse économique du chômage, il affirme que la reprise ne pourra venir que d'une relance massive de l'investissement, lequel est déterminé d'une part par le niveau des taux d'intérêt à long terme et d'autre part par la confiance des producteurs dans les perspectives futures de profits. Si cette dernière variable est difficilement maniable en temps que telle, une baisse des taux d'intérêt à long terme est tout à fait réalisable et doit dès lors constituer la tâche prioritaire des gouvernements. [...]
[...] Il s'ensuit dès lors une baisse de la production et du niveau d'emploi, qui enclenchent un processus de dépression, qui ne peut être enrayé que par une reprise de l'investissement (difficile compte tenu des anticipations des producteur face à une demande faible), ou plus probablement par la restauration d'une plus forte propension à consommer. Quelles leçons tirer de cette fable ? Tout d'abord, Keynes montre bien qu'une hausse de l'épargne n'a aucune raison de créer une hausse similaire des dépenses d'investissement. Or, dans le cas de figure où la hausse de l'épargne excède la hausse des dépenses d'investissement, l'excédent d'épargne trouve son débouché financier dans la couverture des pertes des producteurs, que cet excès d'épargne a lui-même engendrées. [...]
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