Joseph Stiglitz présente dans cet ouvrage une vision très critique de la mondialisation telle qu'elle a été conduite jusqu'ici par les institutions financières internationales. En suivant l'idéologie libérale dominante et en l'appliquant aveuglément dans leurs interventions dans les pays en développement, elles ont échoué dans tous les domaines où elles sont intervenues : développement, gestion des crises et transition vers le capitalisme. Elles ont entravé la croissance mondiale et favorisé les intérêts de la finance occidentale au détriment de la stabilité et du développement des régions les plus pauvres. On trouve là l'intérêt principal de l'ouvrage : il fournit un témoignage de l'intérieur, et éclaire en toute connaissance de cause les mécanismes qui ont amené à la faillite des institutions internationales.
[...] II) La critique des institutions internationales Le FMI est pour Stiglitz l'institution la plus emblématique des dérives du système actuel et des trahisons au modèle originel. Pensé par Keynes, le FMI était censé coordonner une action collective mondiale qui corrigerait les dysfonctionnements du marché, assurant la stabilité mondiale en surveillant la situation macroéconomique des pays et en prêtant des liquidités aux pays pour mener une politique budgétaire expansionniste en cas de crise. On a assisté depuis à un retournement : l'institution créée pour corriger les déséquilibres chroniques qu'entraîne le marché est maintenant dirigée par des fanatiques du marché qui ont peu confiance dans les institutions publiques et croient en un marché autorégulateur. [...]
[...] Les échecs du FMI ne sont donc pas des accidents, mais résultent de la façon dont il a compris sa mission et qui l'amène à quitter son mandat d'inspiration keynésienne. Stiglitz dénonce aussi le changement officieux de mandat du FMI : cessant de prendre pour seuls objectifs ceux qu'a définis son mandat initial (renforcer la stabilité mondiale), il cherche aussi à servir les intérêts de la communauté financière, et se fixe dès lors des objectifs contradictoires. Sous cet angle, on peut alors expliquer de nombreuses décisions autrement incohérentes : ainsi, les banques occidentales tirent profit d'un assouplissement du contrôle sur le marché des capitaux en Amérique latine et en Asie (nouvelles possibilités d'investissement) qui fait souffrir ces régions quand les capitaux spéculatifs s'en retirent (devises effondrées et système bancaire affaibli), de même que les prêts massifs pour maintenir le taux de change au début de la crise russe de 1998 sacrifient le budget russe pour permettre aux capitaux des fonds spéculatifs de sortir en limitant leurs pertes. [...]
[...] Pourquoi la mondialisation, cette dynamique qui a fait tant de bien, est-elle aujourd'hui si controversée ? La réponse de Stiglitz est claire : parce que ses bienfaits ont été moindres que selon ses partisans et le prix à payer plus lourds. Ces réactions de plus en plus virulentes marquent un changement, en focalisant la critique sur l'aspect économique de la mondialisation et sa gestion par les institutions internationales, ainsi que sur l'hypocrisie des pays occidentaux. Ce sont les deux axes principaux de la critique de Stiglitz. [...]
[...] Selon lui, ce sont les politiques erronées menées par les institutions économiques internationales qui sont à l'origine des défauts de la mondialisation. Si le FMI et la Banque Mondiale avaient à l'origine des domaines d'intervention distincts, le FMI s'assurant de la stabilité macroéconomique du pays et lui fournissant les liquidités nécessaires pour sortir d'une éventuelle récession et la Banque Mondiale donnant des pistes pour le développement du pays, les missions de deux institutions commencent à s'entremêler dans les années 1980 avec l'élaboration progressive du consensus de Washington et l'extension du rôle du FMI. [...]
[...] Fiche de lecture de La Grande désillusion de Joseph Stiglitz Dans La Grande désillusion, Joseph Stiglitz présente à la fois son désenchantement pour les institutions internationales qu'il a côtoyées durant ses années à la Banque Mondiale et la colère des pays en développement contre ceux qui promettent la richesse et conduisent à la ruine. Universitaire de tendance néo-keynésienne enseignant à Columbia, prix Nobel d'économie en 2001 pour son apport aux théories sur les conséquences du manque d'information sur les marchés, Stiglitz prend pour base dans son ouvrage son action politique comme membre du Council of Economic Advisers du Président Clinton de 1993 à 2000 et surtout comme vice- président et économiste en chef de la Banque Mondiale de 1997 à 2000 où il a géré la transition russe vers le capitalisme et la crise asiatique. [...]
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