Eric Maurin, X-ENSAE et docteur en économie, est chercheur au Centre de recherches en économie et en statistique de l'INSEE (CREST). Il est l'auteur de nombreux articles sur l'emploi et les politiques sociales. Parmi les changements profonds de la société française depuis vingt ans, certains n'ont pas encore été vraiment analysés et compris alors qu'ils apparaissent essentiels. C'est tout particulièrement le cas de l'identité au travail et des relations d'emploi dans l'entreprise. La fragilisation et la personnalisation croissantes de ces relations ont conduit au brouillage d'une appartenance politique et sociale autrefois largement définie par le travail autour de la classe ouvrière notamment. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Le monde du travail fournit de moins en moins de repères, alors même qu'il continue d'être à la source de nombreuses inégalités dans la société. La compréhension du contexte et des enjeux autour de ces questions commande d'aller bien au-delà des imprécations habituelles et des constats désabusés sur « l'individualisation de la société » ou « la fin des classes sociales » ; il s'agit de décrire scrupuleusement les mécanismes à l'œuvre et d'en donner à lire le sens profond. C'est ce que propose cet ouvrage tout en esquissant les contours d'une nouvelle société française dont « l'égalité des possibles » pourrait devenir l'horizon.
[...] En moyenne des CDD sont transformés en contrats permanents si l'on enlève du calcul les contrats saisonniers de très courte durée. Ces transformations représentent de fait un facteur majeur de créations d'emplois permanents. Dans le cadre institutionnel français, les contrats temporaires sont à la fois la première source d'embauche dont bénéficient les chômeurs mais également la principale voie d'accès aux emplois stables au sein des entreprises. Quel est l'effet propre de la législation sur les contrats de travail et sur les inégalités entre chômeurs et salariés ? [...]
[...] Les réduire, c'est contribuer à réduire l'injustice intrinsèque du système économique. Cette façon de caractériser les classes sociales est pertinente, mais incomplète. Elle laisse le côté le second ingrédient caractéristique des classes sociales : les enfants des personnes appartenant à une classe sociale donnée ont objectivement une chance (ou un risque) bien plus important que les autres d'appartenir plus tard à cette même classe sociale. C'est cette propriété qui achève de faire en sorte que les inégalités entre classes sociales sont injustes. [...]
[...] En se focalisant sur la condition ouvrière et en n'accordant pas toute son importance au déplacement des emplois les plus modestes du monde des ouvriers vers celui des employés, on fait l'impasse sur une évolution sociologique cruciale. En effet, les deux types de métiers correspondent à des contextes de socialisation très différents. En passant des ouvriers aux employés, on passe de contextes où les salariés représentent tous un même facteur de production, à des univers où les salariés représentent chacun dans leur travail une personne spécifique, définie dans un rapport spécifique à une autre personne. De façon significative, le métier ayant connu la croissance la plus spectaculaire au cours des dernières décennies est celui d'assistante maternelle. [...]
[...] Beaucoup cherchent ainsi à donner consistance à la figure de la classe moyenne La crise de la représentation serait en partie due à l'incapacité à prendre acte de ce que la classe ouvrière a disparu. Ce diagnostic est problématique parce que les ouvriers restent une catégorie sociale numériquement très importante, faisant face à des problèmes de condition de vie et de perspectives sociales ni plus ni moins difficiles qu'autrefois. L'enjeu d'une représentation politique des ouvriers n'a pas diminué. Mais pour être en mesure de les représenter, il est nécessaire d'aller au-delà du simple constat de leur importance numérique. [...]
[...] On peut constater aux Etats-Unis un affaiblissement du lien entre la rémunération des salariés et leur ancienneté dans l'entreprise au cours des deux dernières décennies. De plus, les différences de rémunération entre salariés anciens et récents sont plutôt plus faibles dans les secteurs de haute technologie que dans les secteurs industriels traditionnels. En France, où la structure des salaires est moins flexible qu'aux Etats-Unis, les évolutions de valeur des différentes composantes du capital humain se traduisent traditionnellement en évolution des risques relatifs de chômage plutôt qu'en évolution des inégalités de rémunération. [...]
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