Les pays européens mènent des politiques de rigueur budgétaire et monétaire, dites de désinflation compétitive, dont le coût involontaire et obligé est le chômage. Celui-ci serait un moindre mal auquel il faut consentir parce qu'il serait un investissement sur l'avenir. En réalité ce raisonnement permet de justifier l'échec des politiques menées, flagrant sur la question de l'emploi : faire du chômage une caractéristique structurelle des économies contemporaines revient à esquiver une remise en cause des actions menées, alors que les politiques de rigueur sont la cause même de la subsistance du chômage. Ainsi est-ce en France que le chômage a connu la plus forte progression depuis le début des années 1990 alors que la politique budgétaire et monétaire de la France était l'une des plus restrictives d'Europe. De plus, un chômage d'apparence structurelle introduit un sentiment d'impuissance qui a pour conséquence de marginaliser toute politique qui ambitionnerait de résoudre le problème du chômage. La crise actuelle semble dès lors plus grave que les précédentes : à sa durée s'ajoute un sentiment de résignation face à la précarisation ou à l'absence de travail.
[...] Selon le discours dominant, la crise ne connaît qu'une solution, qui est précisément la politique suivie. En effet, l'inflation n'est pas une alternative au chômage. Cependant, quitter la politique actuelle ne signifie pas mener une politique inflationniste (une politique monétaire trop restrictive finit par être inflationniste) mais une stratégie de plein emploi. Depuis sa mise en œuvre en 1983, la politique de désinflation dite compétitive a fait l'objet d'un consensus pour permettre le rétablissement de la profitabilité des entreprises et l'accroissement de leur compétitivité. [...]
[...] Le vrai choix n'est pas entre le libre-échange et le protectionnisme : il s'agit en fait de savoir quel est le degré optimal de protection pour un pays, compte tenu de sa situation économique. Ainsi l'apparition de nouveaux partenaires demeure toujours favorable aux pays industrialisés. La cause première de la crise réside dans le niveau record des taux d'intérêt depuis plus de 15 ans. De forts taux d'intérêt mesurent une forte préférence (ou une urgence) pour le présent, et surtout une dépréciation du futur. Les taux d'intérêts varient en France autour de 5 à (à comparer à dans les années 1960 et 0 à dans les années 1970). [...]
[...] D'où alors une prime de risque importante qui maintiendrait des taux d'intérêt élevés (ceux-ci étant fonction des anticipations des agents), comme au début des années 1990, ce qui serait contre-productif. Le débat sur la stabilité a donc un coût économique. Faudrait-il pour autant se refuser à l'ouvrir ? Probablement pas, si l'on veut bien considérer que le débat caractérise le système démocratique (lequel ne serait pas économiquement rationnel, à moins que le coût du débat constitue un investissement) et que le débat sur les choix économiques est justifié politiquement par les effets possibles de ces choix, qui dépassent le cadre de la seule économie (chômage, inflation, etc.). J.-P. [...]
[...] A contrario, l'analyse de l'auteur se veut multidimensionnelle. Il n'est pas sûr qu'elle le soit vraiment. En effet, J.-P. Fitoussi semble sous-estimer l'ampleur de la crise commencée dans les années 1970, caractérisée par une inflation importante qu'entretenait la " spirale prix-salaires Il était prioritaire alors de s'affranchir de ce phénomène qui peut certes apporter une amélioration temporaire, mais dont on connaît les dégâts à long terme. Il est vrai que la même politique restrictive a été poursuivie jusqu'à aujourd'hui, où l'inflation n'est plus très menaçante. [...]
[...] Dans le Débat interdit (1995), J.-P. Fitoussi tente d'élaborer de nouvelles réponses à la crise, redonnant du poids au volontarisme politique, plus précisément aux théories keynésiennes et aux politiques de relance. Thèse de l'ouvrage Les pays européens mènent des politiques de rigueur budgétaire et monétaire, dites de désinflation compétitive, dont le coût involontaire et obligé est le chômage. Celui-ci serait un moindre mal auquel il faut consentir parce qu'il serait un investissement sur l'avenir. En réalité ce raisonnement permet de justifier l'échec des politiques menées, flagrant sur la question de l'emploi : faire du chômage une caractéristique structurelle des économies contemporaines revient à esquiver une remise en cause des actions menées, alors que les politiques de rigueur sont la cause même de la subsistance du chômage. [...]
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