Une évolution récente du secteur viticole bordelais : Les vins de garage

Résumé du document

S'il est une évolution majeure qui a marqué le secteur viticole bordelais au cours de la dernière décennie, c'est bien l'apparition en force d'un nouveau type de vinification : les vins de garage. Ces micro-cuvées sont apparues dans le bordelais comme les start-up dans l'informatique et Jean-Luc Thunevin, celui qui a osé bafouer la tradition viticole, peut aujourd'hui se vanter du battage médiatique entourant son désormais très connu mode de production. Les vins de garage, en deux mots, sont la recherche de la qualité optimum aux désavantages du rendement, parfois quatre fois plus faible que d'ordinaire

Extraits

[...] Cette année, ce sont les vins dits de garage collectionnés plus que bus, mais vendus à prix d'or, qui font l'objet de son attention : le métier des grands vins à long terme est incompatible avec le lucre C'est assez dire le mépris énervé des grands seigneurs de la rive gauche vis-à-vis de ce phénomène des micro-cuvées, plus propre à la rive droite. Pour mieux comprendre, il faut imaginer le paysage ; rive gauche, c'est le Médoc, entre la Gironde et l'Océan Atlantique, un relief plat et où les vignobles sont vastes. Une région bâtie au XVIIIème par de grands propriétaires terriens, comme les Ségur (qui possédaient, entre autres, Latour, Lafite ou encore Calon-Ségur). Ici règne le classement de 1855, établi par les courtiers et négociants. C'est le château - la marque qui est classé et non la surface. [...]

[...] Robert Parker est en effet loin d'être apprécié par tous sur la place de Bordeaux ; celui-ci fait et défait les réputations ce qui offusque de nombreux vignerons : les bouches commencent à s'ouvrir et les dents à grincer ; jusque là Robert Parker était unanimement encensé et plus craint que la grêle, le mildiou et le phylloxera réunis. Pour obtenir de bonnes notes (90/100), des producteurs vont même jusqu'à vinifier leurs cuvées au goût du critique américain. Effet pervers : on élabore non du Saint- Emilion, du Pomerol ou du Saint-Estèphe, mais du 90/100 Parker. Des professionnels du milieu dénoncent les conséquences de ces agissements : la typicité des Bordeaux en prend un coup. Certains producteurs sont navrés de cette situation. Le 2 mai dernier, le Château Bouscaut fait paraître un encart publicitaire dans Sud-Ouest. [...]

[...] Il est clair que la rareté en est la cause. Quant au Château de Valandraud, impressionnant par sa richesse, sa complexité et son harmonie pour reprendre les termes de l'œnologue américain, on est déjà dans les grands Margaux mais il faut attendre pour savoir comment il se situe par rapport à Château Palmer et Château Margaux. Pour un prix de revient de 100 francs, chacune des bouteilles annuelles, qui part de la propriété autour de 500 francs, se retrouve très vite sur le marché de Londres négociée entre 2000 et 3000 francs, pour des clients américains et japonais. [...]

[...] Nul ne sait encore comment le vin de garage, volumineux et mûr, vieillira et s'il est assuré d'un futur confortable ou bien si, au contraire, il est seulement un phénomène de mode qui passera avec le temps. Bibliographie Les revues et journaux : - Le Figaro, des 2 et 3 décembre 2000 : vin de garage : la F1 de la viticulture - La revue du Vin de France de février 2001 : Thunevin au piquet - Libération du 23 septembre 2000 : Mon vin de garage - Challenges de septembre 2000 : les garages bousculent le monde des châteaux - L'express du 16 mars 2000 : Et si l'effet Valandraud se reproduisait ? [...]

[...] Les héros des années 90 sont déjà parfois fatigués ; il serait bien étonnant que dans dix ans tous ces petits crus 2000, vendus au prix du caviar, soient aussi frais qu'un Château Margaux auquel cependant, ils sont comparés aujourd'hui. Les critiques Comme nous l'avons déjà remarqué, il existe des anti-vins de garage comme il existe des anti-mondialisation Certains considèrent en effet que les prix des vins de garage n'ont guère de sens puisque ces vins sont introuvables. Le 99 du Château Valandraud est sorti en primeur à 850 francs hors taxes, mais seuls quatre ou cinq négociants en ont eu à ce prix-là. Ce sont des vins qui se revendent en cascade. [...]