Comment s'inscrit la réalité du système monétaire international dans l'âpreté des débats théoriques qui le sous-tendent ? Cinquante ans après Bretton Woods, dans quelle mesure le système monétaire international apparaît-il encore rationnel et efficace ?
Cinquante ans après la signature des accords de Bretton Woods, il peut être utile de comparer le système monétaire international qui en sortit à celui qui est en vigueur actuellement : la photographie du SMI actuel nous montre un système qui s'est radicalement transformé. En quoi le SMI issu de cette transformation peut-il être analysé comme l'exact contrepoint de son homologue de 1944 ? Pour répondre à cette question, il est nécessaire de resituer le SMI contemporain dans l'histoire économique récente et de clarifier le vocabulaire qui lui est spécifique. Ce rappel permet alors d'analyser les caractéristiques du SMI actuel et de les comparer avec celles de Bretton Woods.
[...] Le SME a donc démontré qu'une discipline commune pouvait contribuer à la convergence des économies et à la diminution des fluctuations entre les monnaies des pays membres. Parallèlement, ses crises survenues en 1992 et 1993 ont souligné l'impossibilité d'assurer, à long terme, un ancrage purement nominal des monnaies s'il ne s'accompagne pas de la convergence réelle des économies : ce constat justifie la démarche graduelle retenue pour l'union économique et monétaire. Enfin, la maîtrise de la communication s'est révélée indispensable pour démontrer aux marchés la crédibilité de la coopération entre les autorités monétaires. [...]
[...] La notion même d'ordre est floue, car elle dépend en réalité de présupposés théoriques et presque idéologiques : pour les libéraux, en effet, l'absence de règles institutionnelles obligatoires et contraignantes laisse place à un ordre naturel qui, guidé par une main invisible est censé dessiner le cadre le plus efficace dans lequel doivent s'inscrire les rapports entre les monnaies. Au contraire, d'autres insistent sur la nécessaire institutionnalisation de ces liens pour améliorer l'efficacité du système. Comment s'inscrit alors la réalité du système monétaire international dans l'âpreté des débats théoriques qui le sous-tendent ? Cinquante ans après Bretton Woods, dans quelle mesure le système monétaire international apparaît-il encore rationnel et efficace ? [...]
[...] Les crises du SME en 1992 et 1993 sont un bon exemple de ce phénomène. Plus largement, les expériences passées ont montré que l'efficacité de la coopération monétaire en général est subordonnée à des conditions précises. Pour J.Frankel, l'intervention des autorités monétaires doit surprendre les marchés lorsque ceux-ci doutent de la véritable valeur d'une devise et qu'ils acceptent d'être guidés par les autorités. Elle doit être aussi concertée entre les banques centrales afin de réunir des ressources plus importantes, et être rendue publique afin que les marchés comprennent clairement les intentions des autorités monétaires et puissent les amplifier le cas échéant. [...]
[...] L'apparent désordre du système actuel exige donc des corrections qui passent par un certain retour à la logique de 1944, repensée et adaptée aux mutations intervenues depuis vingt ans : son enseignement majeur était de souligner que la coopération monétaire internationale est indispensable pour tendre vers un équilibre économique et financier optimal. Il reste aujourd'hui à définir précisément les contours que doit prendre cette coopération : la coopération monétaire apparaît certes indispensable pour rendre au SMI l'efficacité qu'il a vocation à incarner, mais c'est aujourd'hui la seule certitude d'un système en perpétuelle mutation et qui se construit de façon encore incertaine. [...]
[...] L'idée de redessiner l'architecture du SMI dans une fidélité à l'esprit de Bretton Woods par une forme de retour aux changes fixes pour promouvoir une meilleure stabilité risque d'être difficilement applicable. En fait, ni le système de Bretton Woods, ni le système actuel de changes flottants ne sont pleinement satisfaisants et adaptés au système monétaire international contemporain : l'instabilité des changes aboutit davantage à anéantir qu'à renforcer l'efficacité des politiques monétaires, ce qui met au jour la nécessité de coordonner ces dernières afin d'en accroître l'efficacité. [...]
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