"La Révolution industrielle est ainsi double, pour le moins. Révolution au sens ordinaire du mot, emplissant ses mutations visibles de temps courts successifs, elle est aussi un processus de très longue durée, progressif, discret, silencieux, souvent peu discernable" affirme F. Braudel dans Civilisation matérielle, économie, capitalisme (1979)
Ainsi, le concept même de Révolution industrielle semble sujet à débat : peut-on n'utiliser qu'un seul terme, un seul concept pour étudier cette double évolution caractérisée par F. Braudel ? Est-ce un phénomène que l'on peut modéliser, c'est-à-dire dont les étapes ont été les mêmes pour tous les pays aujourd'hui industrialisés ? Et doit-on plutôt considérer la période historique s'étalant entre 1780 et 1880, marquée par le "décollage" de la croissance des actuels Pays Développés à Économie de Marché (PDEM), ou un processus plus long, marqué par des évolutions démographiques, culturelles et agricoles, précédant un mouvement d'industrialisation sans précédent ? Deux théories économiques semblent pouvoir incarner chacune ces deux approches. En effet, si W. Rostow établit, en s'appuyant sur le phénomène britannique, un "modèle" de Révolution industrielle en 5 étapes, se focalisant sur l'étape du décollage, du "take-off", économique, c'est-à-dire sur une période historique relativement restreinte, Marx postule de la Révolution industrielle comme un changement de mode de production, marquant l'apparition du capitalisme moderne, surtout permis par d'importantes évolutions socio-culturelles. Il faut alors remarquer que si ces deux analyses divergent par leur approche, elles étudient toutes deux la place des innovations techniques.
Définissant alors la Révolution industrielle comme une longue période de transformation du système productif qui a affecté la plupart des pays d'Europe entre 1780 et 1880, marquant le démarrage d'une croissance d'un type nouveau, associé à des innovations techniques, on doit remarquer que les "résultats" de cette Révolution industrielle potentielle sont différentes en France et en Grande-Bretagne : si la population française passe de 27,5 millions en 1780, à 37 millions en 1880, et 39 millions en 1900, la Grande-Bretagne voit les effectifs de sa population exploser entre 1750, où l'on recense 7,5 millions d'habitants, et 1900, où l'on recense 40 millions d'habitants. De même, si en 1860, 22% de la population active britannique travaille encore dans le secteur agricole, ce chiffre s'élève à un peu moins de 60% en France à la même période, et encore 45% en 1900. Ainsi les Révolutions industrielles de ces deux pays voisins semblent différer, au moins de par leur évolution démographique respective, et par l'évolution de la structure de leur population active. Pourquoi alors, le modèle de Rostow, s'appuyant sur l'étude de la Révolution industrielle britannique, peut-il être pertinent pour comprendre l'industrialisation française ? (...)
[...] On va alors montrer en quoi le contexte institutionnel et politique de la Grande- Bretagne doit alors être pris en compte, notamment à travers le mouvement des enclosures, mouvement qui peut renforcer l'explication que donne Rostow de cette forte croissance industrielle, et expliquer pourquoi, alors cette forte croissance n'a pas pu prendre place pareillement en France. Le mouvement des enclosures comme une des origines principales de la croissance industrielle en Grande- Bretagne L'analyse de la Révolution industrielle, qui marque un changement de mode de production pour K. Marx, repose principalement sur le mouvement des enclosures. [...]
[...] Enfin, c'est grâce à cette nouvelle classe de prolétaires, trop inorganisée pour faire valoir ses intérêts, que va s'enrichir la classe des bourgeois, à travers l'extorsion de la plus value. Cette analyse de la Révolution industrielle par Marx n'invalide pas le modèle de Rostow, qui postule d'évolutions agricoles nécessaires pour le take off, mais cela peut être une piste de recherche afin d'expliquer la divergence du cas de la France. Pourquoi ce mouvement n'a pas eu lieu? Quelles évolutions sociales, culturelles, institutionnelles ont pu influer sur le développement de l'industrie, au XIXème? [...]
[...] Le modèle en cinq étapes de W. Rostow s'appuyant sur l'exemple britannique, et sa portée heuristique Ainsi, comme on l'a précisé auparavant, le modèle de la Révolution industrielle de Rostow décompose cette phase de croissance sans précédent en cinq étapes. Avant la phase d'industrialisation massive, la société est traditionnelle (l'agriculture prédomine . puis, le démarrage marque une phase où cette société dépasse le stade d'auto-subsistance, l'épargne et l'investissement apparaissent, les conditions nécessaires à l'étape suivante se mettent en place ( hausse de la productivité agricole, mise en place d'infrastructures . [...]
[...] La Révolution Française, et le contexte institutionnel, comme frein à une Révolution industrielle française? En effet , comme, d'après les analyses suivantes, on a vu que la révolution agricole semblait être une condition nécessaire (mais non suffisante) au développement de l'industrie, on doit remarquer l'influence qu'ont eu les bouleversements politiques de la France du XVIII sur la répartition des propriétés terriennes. Après la Révolution, les terres sont en effet, en France, partagées en de nombreux petits exploitants agricoles. Jusqu'en 1908 la structure agraire dominante des exploitations) est une parcelle de moins de 10 hectares, ce qui n'encourage pas la modernisation, trop onéreuse pour ces petites propriétaires terriens. [...]
[...] et libéralisation du marché agricole) sont les préliminaires de la Révolution industrielle et de la révolution démographique. En effet, ces transformations de l'agriculture, ont permis la hausse de la productivité agricole, donc l'augmentation des rendements et la libération d'une partie de la main d'œuvre pour l'industrie. L'augmentation des rendements a alors permis la révolution démographique, phénomène qui a conjointement permis l'augmentation des effectifs de la main d'œuvre industrielle, et la la stimulation du marché intérieur industriel. Ce modèle semble alors pertinent pour rendre compte de la Révolution industrielle britannique : l 'agriculture britannique connaît de profonds changements au XVIII ème siècle (système Norfolk de rotation des cultures . [...]
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