A la fin des années 1970, les analyses de la crise économique dans les pays développés ont mis en évidence la rigidité de l'organisation du travail salarié fordiste. Dès les années 1980, la flexibilité apparaît comme un nouvel enjeu du capitalisme moderne. Est apparu en effet un nouveau régime économique : le néolibéralisme. Le néolibéralisme peut être qualifié de renouveau du libéralisme, tant au niveau de la pensée, que de la pratique de la politique économique qui s'est affirmée depuis la fin des années 1970. Les « nouveaux économistes » développent une critique radicale du keynésianisme et de façon plus large de l'intervention de l'Etat. Au niveau des politiques salariales, il en existe deux : Allègement des charges salariales et flexibilité accrues de l'emploi.
La remise en question de la pertinence des protections et des droits des travailleurs (issus des Trente Glorieuses) a commencé lors de la crise des années 1970-1980. Faisant face au chômage et à des déficits budgétaires, les gouvernements des pays industrialisés commencèrent à appliquer les recettes du néolibéralisme : la flexibilité du marché du travail et la diminution des coûts de la main d'œuvre. Les droits et protections apparaissent en effet comme un obstacle à l'emploi et à la création de richesses.
Les multiples conquêtes ouvrières ont permis l'affirmation du monde du travail, mais surtout la consolidation de la condition salariale. Celle ci, grâce aux luttes sociales, est à l'origine de l'émergence de la société salariale. Cette consolidation s'appuie sur des institutions collectives telles que le droit social, les conventions collectives, la protection sociale, que les acteurs du rapport salarial (entrepreneurs et salariés) font fonctionner sous la houlette d'un Etat social. La crise de la société salariale qui se perpétue depuis les années 1980 paraît liée avant tout à des objectifs politiques : « affaiblir le pouvoir du monde du travail en laminant les institutions collectives sur lesquelles prend appui son affirmation anticapitaliste » (R. Sobel, Crise de la société salariale : comment résister ?) Ainsi, le travail salarié actuel s'organisant sur le mode de la précarisation et de la flexibilité de l'emploi semble induire que le travailleur dit flexible gérerait lui même sa carrière. Mais, derrière ce semblant de liberté, le contexte de dérégulation actuel nous ramène à l'existence précaire que connaît le travailleur.
Dans quelle mesure le régime salarial néolibéral apparaît-il comme une solution à la crise du fordisme ? « Comment une majorité de membres de notre société démocratique pourrait elle continuer à vivre concrètement sa citoyenneté tout en étant reléguée dans des situations de précarité ? » (R. Sobel)
[...] Finalement, rien ne garantit que la flexibilisation des salaires soit favorable à l'emploi. En croissance fordienne, la flexibilité s'avère plutôt défavorable car elle amplifie aussi bien les augmentations que les réductions d'emploi et qu'elle risque d'aggraver la variabilité de la conjoncture. D'autre part, quand la croissance est basée sur le commerce extérieur, elle amortit les effets défavorables qu'ont sur l'emploi les contraintes s'exprimant au niveau de la demande effective. Le problème posé n'est alors plus de savoir s'il convient ou non de mettre en place une politique de flexibilité, mais d'établir le degré et la forme de flexibilité à retenir suivant l'objectif de politique économique recherché. [...]
[...] Ainsi, l'inemployabilité de certains OS dans les tâches plus polyvalentes est dans certains cas la conséquence de la persévérance des gestionnaires dans une stratégie de non qualification. Par contraste, le maître mot est alors celui de la polyvalence de la main d'œuvre. C'est une version moderne de l'ouvrier proudhonien. (Le salariat intérimaire : La flexibilité se mesure aussi à partir de la faiblesse des contraintes juridiques régissant le contrat de travail et en particulier les décisions de licenciement. Cette acceptation met l'accent sur les aspects institutionnels tenant au droit du travail ou aux clauses des conventions collectives. [...]
[...] L'individualisme chez les salariés se développe tout en les forçant à coopérer. L'enquête conditions de travail de 1991 confirmée par l'enquête techniques et organisation du travail de 1993 a montré que de plus en plus de salariés se voyaient imposer des contraintes de rythme dans le travail. Il y a une recrudescence des accidents du travail dans le BTP, les intérimaires sont bien souvent plus exposés que les autres salariés aux pénibilités et aux nuisances car ils occupent plus souvent des postes d'ouvriers, et des postes plus dangereux. [...]
[...] Les marchés financiers dictent donc la norme d'efficacité économique à atteindre tant aux actionnaires, qu'aux chefs d'entreprises et aux salariés. La concurrence est donc rude et il s'agit d'y faire face ; les agents de la sphère productive doivent donc se conformer aux attentes des marchés financiers. Le dilemme existant entre le respect de la norme ou la perte de l'emploi (tant pour les salariés que pour les cadres intermédiaires des sociétés productives) prend donc tout son sens au travers du régime néolibéral. [...]
[...] Par ailleurs, les CDI ne garantissent en aucun cas un emploi durable depuis que l'autorisation administrative de licenciement fut supprimée en 1987. En fait, le licenciement n'est quasiment soumis à aucune restriction (hormis le paiement d'indemnités). Tous les plans sociaux constituent de réels moyens pour flexibiliser les salariés en place. Moins de 76% des emplois salariés en France en 1995 sont des emplois appelés typiques en raison de la stabilité et de la sécurité que leur ont conférées la croissance fordiste et les avancées de la législation du travail. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture