Les réformes politiques économiques et sociales en Arabie Saoudite depuis 2001

Résumé du document

Résumant rapidement les notions que nous pouvons avoir sur l'Arabie saoudite, cette citation que nous avons choisie pour introduire notre sujet est tout à fait symptomatique de la difficulté d'approcher ce pays. Pour beaucoup, les experts y compris, l'Arabie saoudite est un vaste désert regorgeant de pétrole, dominé par des bédouins fanatiques de la religion. En effet, il est difficile d'aborder l'Arabie saoudite sans tomber dans la redondance : pétrole, terrorisme, bédouinisme. Souvent décriée pour son rôle supposé dans le soutien au terrorisme international, pour le chantage au pétrole, ou encore pour son peu de considération des droits de l'Homme et surtout de la Femme, l'Arabie saoudite est encore plus ignorée.
En quelques chiffres, l'Arabie saoudite c'est : un quart des réserves pétrolières mondiales, le 22ème produit intérieur brut (PIB) mondial, environ 22 millions d'habitants, et 15% de chômage. Néanmoins, on ne saurait résumer un pays à des statistiques. L'Arabie saoudite c'est aussi un Etat vieux de 70 ans. C'est aussi une géographie variée, des côtes de la mer Rouge rappelant les pays méditerranéens, aux montagnes du centre, du désert de sable fin au Sud, aux plateaux centraux. C'est une vieille histoire, enrichie par l'entremêlement des peuples, entre conquêtes, commerce, et développement culturel. Comment comprendre l'Arabie saoudite ?

Passons rapidement sur la formation de l'Etat entre 1920 et 1973, si ce n'est que pour rappeler quelques faits marquants. L'Etat est très vite lancé sur la voie de la modernisation avec un appareil administratif fort par la création d'une perception des impôts, la DZIR, le développement d'institutions modernes, et la mise en place d'un Etat providence chargé de la redistribution et de la régulation des inégalités sociales (la Sécurité sociale est établie en 1963). C'est un Etat islamique dans la forme, mais modéré dans les faits par l'idée d'acclimatation « imtizâj hadhâri ». Durant les années 1960, l'Arabie saoudite emprunte beaucoup à l'Occident pour se moderniser, sous l'impulsion de Faysal « le réformateur ».
Un évènement fondamental qui va bouleverser durablement le pays est le « boom » pétrolier de 1973. Sous l'afflux des pétrodollars (on passe de 4,5 milliards de dollars de recettes du pétrole en 1973 à 116 milliards en 1979), l'appareil étatique est mis à mal par le clientélisme, la facilité, et la corruption. On se lance dans des grands projets, autoroutes géantes, champs irrigués au milieu du désert, l'ère de l'opulence est celle de la démonstration. Démonstration au peuple de la puissance des Saoud, démonstration au monde de la force des Saoudiens. A la politique des grands projets on ajoute une défiscalisation massive, et un gonflement de l'appareil d'Etat, pour faire entrer ses relations ou les récalcitrants. L'Etat perd de sa consistance administrative pour ne devenir qu'un vaste outil au service du pouvoir (chose que l'on a pu observer ailleurs, par exemple au Congo Brazzaville sur la même période).
Notons également le rôle de l'Islam dans le pays, exprimé sous les traits du wahhabisme. Cette doctrine naît au XVIIIème, et le pouvoir des Saoud va être déterminé par son alliance avec celle-ci, alliance contractée en 1744. Concernant l'Islam, l'Arabie saoudite est le pays de La Mecque et Médine, les deux lieux les plus saints. Tout cela permet au pays de jouir d'une certaine influence sur le monde musulman.
Enfin, il est important de noter l'influence, et la relation que le pays entretient avec les Etats-Unis. L'alliance est contractée en 1945 entre Roosevelt et Faysal. La relation entre les deux pays a souvent été ambiguë, tendue, voire conflictuelle, sans pour autant avoir été remise en cause à quelque moment que ce soit. Les écueils sont nombreux, citons l'affaire de la base de Dhahran en 1960, la guerre de Kippour en 1973, l'Irak en 2003, et surtout le 11 septembre 2001. Malgré cela, la relation reste forte sur le fond. Que retenir alors de l'Arabie saoudite ?
Si l'on prédit souvent la chute du régime saoudien pour les années à venir, le régime lui est toujours là. Pays stable, voire remarquablement stable de la région, l'Arabie saoudite s'est construite sur plusieurs piliers. Un Islam et une doctrine islamique forte : le wahhabisme. Une rente pétrolière assurant une relative stabilité au pouvoir. Enfin, une alliance avec les Etats-Unis, garante de la sécurité de l'Etat en cas de problèmes internationaux.

Maintenant que nous avons exploré les clés de compréhension de l'Arabie saoudite contemporaine, il s'agit de comprendre le contexte actuel du pays et d'en dégager les enjeux majeurs. Ainsi, dans quel environnement les dernières réformes ont-elles pris place ?

Extraits

[...] Quant au Koweït, il possède une constitution depuis 1962. Dans ce contexte régional d'une démocratisation en marche, l'Arabie saoudite ne souhaite guère apparaître aux yeux de la communauté internationale comme la mauvaise élève de la région Une certaine pression est donc exercée sur l'Arabie saoudite par ses voisins de façon indirecte ou directe. Cependant cette pression reste largement relative. Un autre type de pression pourrait également être celle exercée par les médias. Le succès de la chaîne par satellite Al-Jazîrah, basée à Doha (Qatar) gêne le royaume car elle donne la parole à ces opposants. [...]

[...] Instauré en 1992, sa composition a progressivement été élargie à 90 membres en 1997, à 120 membres en 2001, puis à 150 membres en 2005. Son rôle est seulement consultatif. Il examine l'ensemble des projets de loi au sein de onze commissions permanentes, puis en séance plénière. Depuis novembre 2003, il dispose également d'une capacité d'initiative pour suggérer des projets de loi au roi et à l'équipe gouvernementale. Le Conseil a pris progressivement une place significative dans le processus décisionnel, ses avis sont d'ailleurs aujourd'hui le plus souvent suivis d'effet. [...]

[...] Une mouvance politique islamiste en plein essor. Pour éviter l'écueil qui consiste à confondre l'islamisme avec l'intégrisme, le fondamentalisme ou encore le terrorisme, il est important de définir ce que nous entendons par ce terme. Loin des représentations diabolisantes dont il fait l'objet, l'islamisme désigne simplement l'association de l'islam avec la politique. Un mouvement islamiste a donc essentiellement deux caractéristiques : tout d'abord, il possède une volonté politique c'est-à-dire l'objectif d'accéder au pouvoir avec l'ambition d'organiser les rapports entre l'Etat et la communauté des croyants umma ; ensuite, il détient une rhétorique islamique matérialisée par la soumission du pouvoir politique à la loi divine charia En effet, ce qui le différencie d'un mouvement de nature laïque est l'adoption de la charia comme norme suprême et comme référent à toute action politique et non pas d'une norme séculaire comme le corpus juridique des droits de l'Homme. [...]

[...] Des militantes des droits des femmes, des écrivains, des journalistes et des avocats ont réclamé l'adoption de réformes juridiques et judiciaires pour mettre un terme à la discrimination et lutter contre l'impunité dont bénéficient les auteurs d'actes de violence envers les femmes. On a appris, en novembre 2004, que le ministère des Affaires sociales avait proposé des mesures de lutte contre les violences domestiques. Ces mesures devaient encore être approuvées par le Conseil des ministres. Quant aux travailleurs immigrés, ils manifestaient un certain optimisme à propos de leurs droits économiques et sociaux. Par ailleurs, les Nations unies ont déclaré que des progrès avaient été accomplis dans le domaine de la lutte contre la pauvreté. [...]

[...] Les Etats-Unis vont en effet exercer une pression politique sur le régime. Les autorités américaines veulent tout d'abord assécher les sources de financement de l'activité terroriste et demandent aux autorités saoudiennes d'exercer un contrôle sur les fonds. Ils vont également demander aux autorités de procéder à une refonte de son système éducatif après que des enquêteurs américains aient découvert que les programmes scolaires contenaient des éléments susceptibles de servir de matériau idéologique à une attitude d'exclusion et de terreur [15]. [...]