Les parachutes dorés sont-ils moraux du point de vue de la science économique ?

Résumé du document

Depuis les années 1990, on entend de plus en plus parler des scandales liés aux parachutes dorés, ou golden parachute, particulièrement en France, où ces parachutes dorés sont les plus élevés. Les golden parachutes consistent en l'octroi d'une certaine somme d'argent ou d'un portefeuille de stock options à un cadre de l'entreprise lors de son départ. Les stock-options (options d'achat) sont accordées par l'entreprise et permettent au bénéficiaire d'acheter des actions à une date donnée et à un prix fixé à l'avance, souvent bien inférieur à celui du marché, d'où le dégagement de plus-values substantielles.
Dès lors que l'on se place du point de vue de l'économie normative, il est important de savoir dans quelle mesure ces parachutes dorés sont économiquement moraux, c'est-à-dire raisonnables.

Extraits

[...] Enfin, la même année, Serge Tchuruk quitte la direction opérationnelle d'Alcatel avec 4,7 millions suite à la fusion avec Lucent, alors que l'action du groupe avait perdu la moitié de sa valeur sous son ère. Il est resté président. B/Creusement anormal des inégalités au sein de l'entreprise Cette surrémunération et surprotection des cadres se traduit par une oligarchie peu soucieuse de l'efficacité de l'entreprise (maximisation de son profit) à la tête de celle-ci. Par ailleurs, l'intégralité des risques induits par de mauvaises performances de l'entreprise est reportée sur l'emploi et le salaire des autres travailleurs (dont le surplus est immoralement réduit) Conclusion S'ils permettent à l'entreprise d'améliorer l'efficacité de ses dirigeants, les parachutes dorés peuvent aussi se révéler contre-productifs, en plus d'être exagérés par rapport à la surrémunération démesurée qu'ils constituent pour les dirigeants. [...]

[...] Quant à la clause de non-concurrence (qui compense le coût d'opportunité d'une éventuelle interdiction de passer dans la concurrence), elle vise à ce que le cadre contribue à la protection de la politique concurrentielle de l'entreprise. D'autre part, les cadres sont poussés à exercer efficacement leurs fonctions. S'ils ont des stock-options, ils vont vouloir élever le cours de l'entreprise en bourse de manière à maximiser la plus-value qu'ils peuvent en tirer. La clause de changement d'administration (qui leur assure un golden parachute en cas de fusion, d'acquisition ou de restructuration) fait que leur travail n'est pas entravé par une perspective de licenciement éventuel proche. [...]

[...] Les golden parachutes peuvent donc être considérés comme internalisés par le marché des cadres. Le concept de salaire d'efficience, qui consiste à rémunérer un employé plus que les autres entreprises, permet non seulement d'attirer les meilleurs dirigeants dans l'entreprise, mais en plus de les inciter à travailler efficacement pour rester dans l'entreprise, les autres payant moins. II) Pratique démesurée et économiquement contre-productive A/Asymétries d'informations qui vont contre l'entreprise Les parachutes dorés donnent une relative indépendance aux cadres par rapport aux actionnaires. [...]

[...] Ceci est lié au problème de l'aléa moral, en effet, les dirigeants étant en quelque sorte assurés tous risques ils peuvent se permettre d'être moins impliqués dans leurs prises de décision. En 2000, Philippe Jaffre, PDG de Elf-Aquitaine, démissionne avec 30 millions en poche après que l'entreprise ait été rachetée par TotalFina. En juillet 2002, Jean-Marie Messier, PDG de Vivendi, est renvoyé avec 20 millions d'indemnisations après avoir habilement dissimulé que l'entreprise subit les plus grandes pertes jamais enregistrées par une société basée en France (environ 1 milliard par mois). Remarquons qu'il venait à peine de s'acheter un appartement à 17,5 millions $ sur Park Avenue à New York. [...]

[...] La loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA) du 21 Août 2007 propose de subordonner les parachutes dorés aux performances des bénéficiaires, les données étant rendues publiques. Elle ne résout pas tous les problèmes néanmoins, en ne réduisant que peu l'indépendance du cadre vis-à-vis des actionnaires, et en ne gommant pas tout l'effet surrémunérateur des parachutes dorés, ainsi que leur inégalité par rapport à la situation des employés. [...]