Le phénomène de mondialisation est à l'oeuvre dans le domaine commercial, comme en témoigne l'accroissement constant des échanges internationaux : ainsi les exportations mondiales ont-elles été multipliées par dix depuis 1970. Il s'agit alors de savoir si l'Organisation mondiale du commerce, créée par l'Acte final du cycle de l'Uruguay Round signé à Marrakech le 15 avril 1994, et qui a effectivement succédé au GATT le 1er janvier 1995, joue son rôle de régulateur des échanges internationaux. En d'autres termes, peut-elle être considérée comme le gendarme de la mondialisation - entendue ici sous son angle commercial. Le rôle de « gendarme » peut s'exercer de deux manières : d'un point de vue normatif, par la production de règles multilatérales, d'un point de vue juridictionnel, par le règlement des litiges commerciaux entre États.
[...] Ceci démontre que l'ORD n'hésite pas à condamner les grandes puissances commerciales, et semble donc renforcer le rôle de l'OMC en tant gendarme de la mondialisation. Toutefois, les difficultés rencontrées dans le cadre des négociations commerciales multilatérales renforcent les incertitudes quant à la capacité de l'OMC de jouer, sur le long terme, ce rôle de gendarme Les difficultés rencontrées dans le cadre des négociations commerciales multilatérales : Le développement considérable du commerce mondial, qui a doublé entre 1995 et 2005, contraste avec les difficultés de l'OMC à boucler le cycle de négociations lancé à Doha en 2001, alors que le précédent cycle de négociations s'est conclu voici plus de dix ans, en 1994. [...]
[...] Ceci devrait conduire à renforcer l'OMC, dont les difficultés tiennent peut- être aussi à la faiblesse de ses moyens : ses effectifs (600 personnes, dont 200 experts) sont près de quatre fois moins importants que ceux du FMI et son budget ne s'élève qu'à une centaine de millions d'euros. [...]
[...] Le nouveau système, au contraire, est juridiquement contraignant : s'il appartient toujours à un panel d'experts indépendants d'examiner, à défaut de compromis entre les États concernés, le différend commercial, une fois la procédure devant l'ORD achevée (le cas échéant après appel), l'État condamné doit se mettre en conformité dans un délai raisonnable; à défaut, la partie plaignante peut appliquer des mesures de rétorsions pour un montant équivalent au préjudice commercial évalué par l'ORD. Ainsi, en 2004, devant le refus des Etats-Unis d'abroger leur système de subvention des entreprises vendant à l'étranger, l'Union européenne releva les droits de douane sur 1600 produits américains. Par ailleurs, la procédure devant l'ORD est en principe enfermée dans un délai de quinze mois maximum (même si, en réalité, ce délai est fréquemment dépassé pour les affaires importantes) Un système globalement efficace : On peut émettre un jugement nuancé sur cette procédure de règlement des différends commerciaux. [...]
[...] Les Etats- Unis, pourtant à l'origine du système commercial multilatéral, ont ainsi multiplié les initiatives : en 2004, conclusion d'accords de libre-échange avec plusieurs pays d'Amérique centrale (Costa Rica, Nicaragua, Honduras, Salvador, Guatemala, République dominicaine), négociations engagées avec 4 des 5 pays andins (Colombie, Pérou, Equateur, Bolivie - le Venezuela étant exclu), recherche de conclusion d'un accord de libre commerce des Amériques (l'échec de cette tentative à l'issue du Sommet des Amériques de Mar del Plata en novembre 2005 devrait les inciter à rechercher des accords bilatéraux). La multiplication d'accords commerciaux bilatéraux et régionaux pourrait mettre en cause le rôle de gendarme de l'OMC, et l'idée de gouvernance de la mondialisation. [...]
[...] En effet, si les pays en développement ont pu peser au sein de l'OMC, en formant des coalitions telles que le G20 (grands pays émergents : Chine, Inde, Brésil ) ou le G90 (pays africains et PMA), cela paraît beaucoup plus difficile à l'échelon régional. Il apparaît ainsi que, en dépit de l'avancée que représente la création de l'ORD, l'OMC ne joue pas encore pleinement le rôle de gendarme de la mondialisation. Il semble plutôt que la situation actuelle se caractérise par une insuffisante gouvernance de la mondialisation. Or, le multilatéralisme reste le meilleur garde-fou contre la loi du plus fort. [...]
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