Pour Pascal Lamy, directeur de l'OMC, "la gouvernance c'est gouverner sans gouvernance" : le concept de gouvernance renvoie en effet aux relations de pouvoir, et à la direction au sein des firmes : cette gouvernance peut être exercée par les actionnaires, détenteurs d'actions, c'est-à-dire de titres de propriété sur une partie du capital de l'entreprise, et pouvant alors participer aux assemblées générales des actionnaires desquelles découle le conseil d'administration de la société, ou par les managers, c'est-à-dire des cadres salariés de l'entreprise, spécialisés dans les tâches de direction.
Pouvoir, direction d'une firme, ces termes renvoient alors directement au concept de "gouvernance" des firmes : si selon la formule de Pascal Lamy "elle est l'ensemble des transactions par lesquelles des règles collectives sont élaborées, décidées, légitimées mises en oeuvre et contrôlées", dans son sens large, la gouvernance se définit comme un ensemble de méthodes par lesquelles les individus et les institutions gèrent leurs affaires communes. Dans un ouvrage publié en 1959 (Business behaviour, value and growth), W. Baumol, puis O. Williamson, plus tard, posent l'hypothèse selon laquelle managers et actionnaires ne poursuivent pas les mêmes objectifs : ils montrent par exemple que les managers des grandes firmes américaines ne maximisent pas le profit de la firme mais son chiffre d'affaires, ils poursuivent un ensemble d'objectifs dont la maximisation du chiffre d'affaires n'est qu'une composante (obtention de revenus élevés, sécurité...).
Ainsi, la gouvernance par les actionnaires et la gouvernance managériale semblent antithétiques puisqu'elles ne poursuivent pas les mêmes objectifs, et elles s'alternent d'ailleurs dans l'histoire du capitalisme : on va donc pouvoir étudier les relations de pouvoirs au sein de la firme, en se demandant dans quelle mesure la prise de pouvoir d'une de ces deux parties prenantes limite-t-elle l'influence de l'autre partie.
Dans une première partie, en s'appuyant sur la période historique s'étalant du début du XXème siècle jusqu'aux années 70, on étudiera comment la prise de pouvoir des managers s'est développée parallèlement à un affaiblissement du pouvoir des actionnaires, puis, on pourra montrer, en s'appuyant notamment sur l'histoire récente (depuis les années 70) comment la prise du pouvoir par les actionnaires essaye de limiter l'influence des managers au sein de la firme (...)
[...] Williamson montre plus particulièrement que les managers poursuivent un ensemble d'objectifs dont la maximisation du chiffre d'affaire n'est qu'une composante (obtention de revenus élevés, recherche de sécurité . ) et que la recherche de ces objectifs conduit les managers à dépenser dans personnel administratif, dépenses d'émolument (bureau spacieux . ) et surtout des investissements discrétionnaires qui rendent le manager indispensable à la firme sur le moyen terme : ainsi, les managers vont par exemple mener les firmes qu'ils dirigent vers les marchés qu'ils comprennent, dans lesquels ils sont performants. [...]
[...] Pouvoir, direction d'une firme, ces termes renvoient alors directement au concept de gouvernance des firmes: si selon la formule de Pascal Lamy elle est l'ensemble des transactions par lesquelles des règles collectives sont élaborées, décidées, légitimées mises en œuvre et contrôlées dans son sens large, la gouvernance se définit comme un ensemble de méthodes par lesquelles les individus et les institutions gèrent leurs affaires communes. Dans un ouvrage publié en 1959 (Business behaviour, value and growth), W. Baumol, puis O. Williamson, plus tard, posent l'hypothèse selon laquelle managers et actionnaires ne poursuivent pas les mêmes objectifs: ils montrent par exemple que les managers des grandes firmes américaines ne maximisent pas le profit de la firme mais son chiffre d'affaires, ils poursuivent un ensemble d'objectifs dont la maximisation du chiffre d'affaires n'est qu'une composante (obtention de revenus élevés, sécurité . [...]
[...] Ils posent ainsi quatre hypothèses sur le fonctionnement des grandes firmes capitalistes du début du XXème: la firme capitaliste moderne est caractérisée par la dissociation entre les actionnaires et les dirigeants, les intérêts de ces 2 agents sont divergents (rémunération des managers indépendante des performances de la firme). Ils montrent aussi que les managers bénéficient d'une information asymétrique et d'une compétence en matière de coordination de l'activité de la firme : ils peuvent donc imposer leurs choix aux actionnaires, et que les managers privilégient les objectifs qui leur sont propres (et ne privilégient donc pas forcément le profit maximum). [...]
[...] Ils peuvent donc ainsi aussi choisir d'indexer les rémunérations de ces managers sur leurs performances (comme par les principes de stock-options), ce qui peut être source de motivation : les managers seront rationnellement portés à être performants, au sens des actionnaires, pour augmenter leurs revenus. Enfin, les actionnaires peuvent exercer une surveillance sur le manager pour le contraindre à adopter un comportement conforme aux objectifs qu'ils affichent. Mais, si les actionnaires ont en principe, comme on vient de le montrer, largement la possibilité de contrôler les dirigeants des firmes dont ils sont propriétaires, en pratique, et comme les derniers scandales du monde de la finance l'ont montré, la limitation de l'influence de ces managers reste compliquée. [...]
[...] Pour conclure, on peut donc dire que la gouvernance des firmes fait appel à des relations de pouvoirs complexes : propriétaires et dirigeants ont un pouvoir antithétique, et dirigent la firme vers des objectifs souvent divergents. En effet, les managers, qui ont pris le pouvoir depuis le début du XXème siècle, marquée par une dispersion et un affaiblissement de l'actionnariat, poursuivent des objectifs qui leur sont personnellement rationnels, recherchant une influence, un pouvoir grandissants, et la sécurité de leur emploi, plutôt que la maximisation du profit. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture