« La gestion de l'économie n'est ni de gauche, ni de droite : elle est bonne ou mauvaise » dit Tony Blair devant l'Assemblée Nationale (24 mars 1998)
Jean-Jacques Becker a montré dans l'Histoire des Gauches en France l'intérêt de l'analyse de la pensée économique et des politiques menées par la gauche à partir de 1981. La pensée économique de la gauche doit être analysée sous deux formes principales : à la fois dans ce qui doit être son but (la définition d'objectifs économiques à remplir une fois au pouvoir) mais aussi comme élément du projet de la gauche dans la perspective d'élection.
La Gauche sous la Cinquième République apparaît particulièrement divisée, aussi parle-t-on volontiers des Gauches. En plus du traditionnel clivage entre socialistes révolutionnaires du Parti Communiste et socialistes réformiste de la Section Française de l'Internationale Ouvrière, des petits partis subsistent, issus de la IVème République ou nés des divisions provoquées par la décision de Guy Mollet de faire participer la SFIO au gouvernement du Général De Gaulle en 1958. Aussi, l'intérêt de l'analyse du sujet « la gauche et l'économie » prend-il tout son sens dans une analyse à partir de 1971, année de départ de l'unification (relative) de la gauche et de la conquête du pouvoir. A cette date, le Parti Socialiste se construit comme le pôle en devenir de la Gauche. Aussi s'intéressera-t-on essentiellement à une analyse des positions économiques du PS, bien qu'il faille nécessairement analyser ses relations avec celles du Parti Communiste, des radicaux et du Parti Socialiste Unifié.
[...] Rocard fustige la ligne jacobine, centralisatrice et archaïque du CERES. Mitterrand ne sait pas s'il est inclus dans cette ligne ou si Rocard l'inclut dans l'autre ligne, d'origine proudhonienne et assurant l'autogestion. Mitterrand réplique sans soutenir directement le CERES, par le besoin d'une ligne politique unique, et prône la poursuite de la ligne d'Epinay. Cette dernière prise de position lui permet de s'allier à Chevènement contre Rocard et Mauroy. Sa motion est majoritaire. Chevènement est chargé de rédiger le programme pour la présidentielle, un programme intitulé le Projet Socialiste validé en 1980 par la Convention PS, qui s'inspire beaucoup de Changer la vie et du Programme Commun de 1972. [...]
[...] Toutefois le modèle est original, se détachant à la fois du collectivisme bureaucratique de l'URSS et de la social-démocratie allemande, il s'agit de substituer par étapes un nouveau système où le crédit et les grandes entreprises échappent au secteur privé. L'Union de la Gauche autour d'un projet économique. Le 26 juin 1972, le Programme Commun de Gouvernement signé avec le PC permet l'union sur un projet clairement à gauche avec la nationalisations des grandes banques, de groupes industriels et d'autres entreprises à la demande des salariés, des réformes fiscales et sociales. Il s'agit toutefois d'un programme plus particulièrement socialiste que communiste. [...]
[...] Le Congrès d'Epinay en juin 1971 permet la fusion CIR-PS. François Mitterrand s'impose comme Premier Secrétaire en s'alliant avec Pierre Mauroy, Gaston Defferre et le CERES marxiste de Jean-Pierre Chevènement pour renverser la direction mollétiste trop encline à des alliances de type Troisième Force. Mitterrand prône la rupture avec le capitalisme par l'appropriation collective des grands moyens de production, d'échange et de recherche, sur la base d'un front de classe et par un contrat de gouvernement avec le PC. Il affirme on ne peut être pas socialiste sans être révolutionnaire. [...]
[...] De plus, Mitterrand voit en Rocard un adverse potentiel qui monte. La défaite de 1978 laisse le PS devant deux options : Garder la même stratégie, c'est-à-dire maintenir le principe d'union même si le PC refuse Prendre la mesure de cet échec et affirmer une ligne propre dont la spécificité à été altérée par le compromis de 1972. Le Congrès de Metz en 1979 est donc celui de la controverse idéologique et stratégique entre Rocard et Mitterrand. Rocard affirme ne pas mettre en cause la ligne d'Epinay mais souhaite une mise à jour puisque Epinay n'avait pas prévu la crise, le chômage, le désordre monétaire Pour lui il y a 2 options : le repli frileux et le suivisme (comme le PC) ou alors oser remettre les choses en causes, c'est-à- dire la logique d'ouverture internationaliste et autogestionnaire. [...]
[...] Conclusion La vision de l'économie à gauche a ainsi grandement évolué entre 1971 et 1991. La stratégie officiellement révolutionnaire, mais différenciée par rapport au PC permet au parti de F. Mitterrand de prendre le pouvoir en 1981. Mais cette ligne politique fut difficile à unifier tant les courants de pensée ont été importants dans la Gauche avant même 1958. Si Mitterrand s'impose, l'application d'une politique mûrie dans les années d'opposition se heurte rapidement à la contrainte extérieure. Le choix de l'Europe fait par Mitterrand et Delors, induisant la rigueur et la rupture avec la ligne de 1971 et 1991 fut source de déchirures et de défaites électorales. [...]
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