Depuis que l'État moderne existe, la dette et l'endettement ont prospéré. D'abord dette du roi, puis dette d'État, la dette est ensuite devenue publique (émisse sur un marché elle circule entre différents acteurs économiques et est transmissible). Si État et dette sont intimement liés, son évolution dépend d'un facteur principal : la guerre. C'est en effet par l'emprunt que l'on finance les conflits et c'est au cours des périodes de guerre que l'endettement des États s'envole. À cet égard l'exemple anglais est éloquent : lors des guerres napoléoniennes ou de la Seconde Guerre mondiale, on observe des niveaux d'endettement pouvant atteindre plus de 250 % du PIB. En conséquence, les périodes de paix sont généralement mises à profit pour se désendetter par différentes manières : création monétaire, baisse imposée du taux d'intérêt, défaut partiel ou total, inflation, etc.
Si dette et guerre répondent à un lien de causalité, il est donc curieux, a priori, de constater, en ce début de XXIe siècle, la montée des dettes des pays européens alors que ceux-ci sont dans une période de paix de longue durée. Plusieurs interprétations s'opposent pour expliquer cette évolution : pour certains, l'endettement des États s'explique par la révolution néolibérale qui a débouché dans tous les pays développés par une baisse des impôts pour les plus riches et produit une diminution des recettes de l'État ; pour d'autres, au contraire, c'est le développement excessif de l'État providence et des services qu'il fournit qui explique cette poussée des niveaux d'endettement ; pour quelques autres, enfin, l'emballement de la dette s'explique par la crise financière qui a obligé les États a intervenir pour venir au secours des institutions financières et relancer l'activité. Si, selon toute vraisemblance, la vérité emprunte à ces trois explications, un fait s'impose : la crise de la zone euro a pour origine la forte augmentation des dettes de bons nombres des 17 pays de la zone euro. Pourtant ce constat interpelle : comment expliquer que la crise de la dette a éclaté en Europe alors que les dettes des États-Unis, du Royaume-Uni ou du Japon sont plus importantes ? Comment expliquer cette spécificité dans la mesure où d'un point de vue « objectif », c'est-à-dire comptable, la situation en Europe semble moins aigüe qu'ailleurs ? (...)
[...] Le CDS est ainsi un engagement hors bilan[7]. Si ce type de produit financier permet à un créditeur de se couvrir d'un éventuel défaut, il permet aussi de spéculer sur la faillite des États. Un fond peut ainsi acheter une couverture contre la faillite d'un État sans même détenir les obligations dudit État ou faire courir la rumeur qu'un État va faire faillite alors que cet évènement ne semble pas fondé pour celui qui fourni l'assurance : il peut donc toucher les primes de la protection qu'il vend sans jamais verser de dédommagement. [...]
[...] - Les pays du Sud (Espagne, Grèce) et l'Irlande ont profité des faibles taux d'intérêt permis par leur rattachement à la zone euro et la signature franco-allemande pour créer artificiellement de la richesse et donner naissance à des bulles immobilières. L'Irlande a quant à elle profité du dumping fiscal pour attirer les sièges sociaux de grandes entreprises. L'ensemble de ces pays a accumulé d'importants déficits. Comme le rappellent Les économistes atterrés, les 230 milliards d'euros d'excédent des pays du Nord créaient et finançaient les 180 milliards de déficits des pays méditerranéens. [...]
[...] Le cadre institutionnel serait donc à la fois trop verrouillé et pas suffisamment orienté vers les indicateurs les plus pertinents. De son côté, la BCE a pour mission d'assurer la stabilité macroéconomique grâce à la politique monétaire. Contrairement à la Réserve Fédérale des États-Unis qui a pour prérogative le niveau de l'emploi et de la croissance, la BCE s'occupe presque exclusivement du niveau d'inflation. Cette seule mission est problématique selon Jacques Sapir car l'existence d'un certain niveau d'inflation n'est pas un obstacle à la croissance, mais au contraire, elle en serait la condition[4]. [...]
[...] D'une crise de finance privée en 2007 (l'excès d'endettement des ménages et des entreprises des États-Unis, de l'Angleterre, de l'Irlande, de l'Islande et de l'Espagne principalement durant la première décennie du XXe siècle), la situation s'est transformée en crise de la dette publique en 2009 puis en crise monétaire et institutionnelle depuis 2010. Pour tenter de comprendre cette évolution, nous nous interrogerons, au cours de ce travail, sur la nature des mécanismes qui sont à l'œuvre. Dit autrement, de quoi la crise de la zone euro est-elle le nom ? D'une imperfection institutionnelle originelle ? [...]
[...] Le marché des crédit default swaps innovation apparue dans les années 1990, est progressivement arrivé vers le marché des dettes souveraines pour devenir aujourd'hui très important. Les CDS sont des dérivés sur un événement de crédit (c'est-à- dire le défaut de paiement d'un débiteur sur sa dette). C'est une assurance qui garantit le paiement de l'obligation jusqu'à son terme. Ainsi, en échange, d'une prime, le vendeur de protection s'engage à dédommager l' acheteur de toute perte résultant d'un incident de paiement sur le titre obligataire assuré. [...]
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