La Genèse, chapitre 41 verset 4, évoque dans le royaume d'Egypte, sous le règne de Ramsès, les vaches maigres succédant aux vaches grasses dans les prairies du delta du Nil, avant de leur recéder la place quelques temps plus tard. Cette anecdote, issu d'un formidable gisement de données géopolitiques et économiques antiques, nous montre que dès la plus haute antiquité les hommes ont su discerner l'alternance de périodes fastes et de périodes difficiles dans leur économie. La répétition des crises, frumentaires et liées au climat sous l'Ancien Régime, puis industrielles et liées à une surproduction de biens à partir de la fin du XVIIIe siècle, ainsi que la succession entre ces crises de séquences de prospérité et de difficultés économiques alternées, a suscité dès le XIXe siècle l'intérêt de nombreux économistes. De leur observations empiriques, ils ont tiré des conclusions les conduisant à aborder l'activité économique, et essentiellement la croissance, comme portée par une dynamique de cycles, c'est-à-dire, comme le définissaient A.F. Burns et W.C. Mitchell, du National Bureau of Economic Research américain (NBER), « une phase d'expansion simultanée de nombreux secteurs d'activité, période suivie d'une phase de contraction similaire, puis d'une reprise qui débouche sur la phase d'expansion du cycle suivant. Cette séquence est récurrente mais non périodique ». Cette approche, avec des variantes, en termes de périodicité, amplitude et causes des cycles, propres à chaque théoricien, a fait autorité pendant de nombreuses années, et a donné les outils nécessaires pour expliquer un grand nombre de crises modernes et d'évolutions de la conjoncture économique. Pour autant, elle a subi pendant et après les Trente Glorieuses de sérieuses critiques concernant son bien-fondé et sa pertinence quant à la situation économique moderne. Le débat est permis : l'économie est-elle cyclique ? Autrement dit, peut-on concevoir la conjoncture économique comme une succession de cycles réguliers et récurrents, alternant nettement phases d'expansion et phases de récession ? C'est à cette question que nous tâcherons de répondre ici, d'abord en étudiant la perception de rythmes cycliques dans l'économie, notamment au travers des théories des cycles et de leurs fondements, puis en mettant en lumière les apories des modèles cycliques, et leur remise en cause.
[...] Ces cycles politiques trouveraient leur origine dans les décisions de politique économique dans des systèmes démocratiques caractérisés par le multipartisme et la périodicité des élections. W.-S Nordhaus révèle l'existence de cycle politique des affaires qui renvoie à l'attitude des gouvernements en place à l'approche des élections. Le modèle de Nordhaus exhibe un cycle économique d'origine politique : le gouvernement alternerait des hausses (avant une élection) et des baisses d'inflation (une fois les élections remportées), des hausses et des baisses de chômage se répercutant aussi sur la demande. [...]
[...] Il établit, sous le nom d'accélérateur, une relation entre les demandes d'équipement et de consommation. Le cycle trouve en lui- même son propre motif. Joseph Schumpeter résume l'idée en une formule lapidaire : la principale cause de la dépression, c'est la prospérité. L'analyse de Juglar, Aftalion et Clark a pour point commun cette théorie de l'accélérateur. On avait la même idée chez Marx avec la suraccumulation du capital, résorbée par la destruction des forces productives excédentaires L'originalité de l'analyse de Paul Samuelson repose sur le fait qu'il combine l'effet d'accélération et le multiplicateur keynésien pour expliquer les fluctuations et les cycles. [...]
[...] De plus, ce problème de l'accentuation des cycles pose la question d'un retour à des politiques publiques actives. En effet, plusieurs éléments laissent à penser que des cycles trop accentués peuvent avoir des effets négatifs sur la croissance de long terme par des phénomènes d'hystérèse : - une perte de capital humain : une hausse brutale du chômage rend difficiles la réinsertion des personnes concernées sur le marché du travail. - Obsolescence du capital productif : liée à la baisse de l'investissement pendant les phases de dépression. [...]
[...] De fait, le choc technologique ne justifie pas un cycle haussier aussi long. Il faut donc en rechercher l'origine ailleurs. Or, l'une des principales caractéristiques de la croissance américaine réside dans sa faible volatilité (conçue comme l'écart de la croissance d'une année donnée par rapport à l'année précédente) le tout combiné avec une croissance forte (environ par an) avec une inflation très faible. La gestion des stocks joue un rôle majeur dans sa compréhension. En effet, la contraction de l'activité (élément déterminant dans l'analyse des cycles jusqu'alors), trouve son origine dans la variation de la formation des stocks. [...]
[...] Le processus dépressif est symétrique : une spirale de baisse des prix et des revenus amène une contraction cumulative du crédit. La reprise intervient quand les banques, devant la faible demande de crédit, abaissent le taux pour inciter à l'emprunt. La prospérité pourrait donc ne jamais s'interrompre, mais au prix d'une inflation galopante, qui finirait par condamner l'étalon-or (cette analyse est pertinente pour la période précédant la Première Guerre mondiale). Enfin, la question de la répartition de la valeur ajoutée et la rentabilité de produire. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture