quantitative easing, BCE Banque Centrale Européenne, Réserve Fédérale, politique monétaire, inflation, Amendement Humphrey-Hawkins, Courbe de Philipps, accords de Bretton Woods
Les mandats de la Banque centrale européenne en Europe, et ceux de la Réserve Fédérale aux États-Unis se distinguent à la fois par leur approche commune à la stabilité des prix - donc un engagement à adopter une politique monétaire anti-inflationniste, et leur divergence sur les autres indicateurs macroéconomiques : depuis 1977, l'amendement Humphrey-Hawkins oblige la Réserve Fédérale à adopter une politique monétaire propre à atteindre le plein emploi, ce qui revient à chercher à encourager une expansion de l'activité économique telle que le chômage atteint le niveau équivalent à une situation de plein emploi.
La BCE de son côté n'a pas d'obligation à assurer une croissance économique propre à réduire le chômage. Cette divergence dans les objectifs de politique monétaire, et l'arbitrage qui en résulte entre une croissance créatrice d'emploi d'un côté, et stabilité des prix de l'autre, est un phénomène relativement récent. La France n'a pas été le seul pays à vivre l'épisode des "Trente Glorieuses" : partout en Europe de l'Ouest comme aux États-Unis, les deux décennies suivant la Seconde Guerre mondiale étaient une période de croissance soutenue, de chômage faible grâce à la création accélérée d'emplois, et une inflation sous contrôle grâce à une politique monétaire accommodante et un progrès technique en expansion.
[...] Jusqu'au début des années 1970, un consensus transatlantique dominait, celui d'un État-Providence qui pouvait assurer un régime de forte croissance, au prix d'une inflation stable. C'est avec les années 1970-1980 qu'un nouveau paradigme de politique économique s'installe, un cadre de pensée qui s'est imposé avec force jusqu'à la crise financière de 2008. Les effets expansifs de la politique monétaire sont considérés comme au mieux temporaires, sinon contributeurs à l'inflation. Au contraire, la politique budgétaire se doit ainsi d'être neutre - en respectant une cible de déficit budgétaire non-accélérant l'endettement public - et une politique monétaire visant la stabilité des prix sans plus. [...]
[...] Le sous-bassement théorique du système Bretton Woods - et ses institutions, le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale- était principalement Keynésien, comme souligné par Mundell & Fleming (et décrit par Fan & Fan (2002)). Entre 1945 et le début des années 1970, le soutien de la demande domestique avec des dépenses gouvernementales, ainsi qu'une politique monétaire accommodante, permet à la fois de soutenir la croissance économique, mais également d'assurer les fonctions que s'approprie l'État-Providence après la fin de la guerre. [...]
[...] D'un autre côté, la politique budgétaire est restée très limitée, par peur d'exacerber le déficit budgétaire, ou à cause des limites imposées par l'endettement déjà élevé en Europe et ailleurs. La relation entre croissance et inflation reste malgré tout inexistante, puisque les structures économiques en Europe et aux Etats-Unis ont profondément changé depuis l'époque du consensus Keynésien, ou encore de la réaction de la Nouvelle Economie Classique qui a suivi. Au contraire, c'est l'impératif de croissance et de relance de l'activité économique qui domine sur les priorités des décideurs publics. [...]
[...] A contrario, l'Europe rencontre toujours des difficultés à redémarrer son appareil productif, et relancer sa croissance. Klose (2017) et Summers (2015) suggèrent ainsi que l'Europe vit un épisode de stagnation séculaire, exacerbé par les épisodes ponctuels de crise de dette souveraine en Europe du Sud, comme discuté par Simitis (2012). L'inflation n'est plus considérée comme un phénomène à éviter - au contraire, pour relancer la croissance économique, plusieurs économistes - comme Sheedy (2014) se sont exprimés en faveur de l'adoption de cibles de croissance nominale, qui peuvent ainsi participer à créer les conditions favorables à des tensions inflationnistes, mais également à relance la croissance économique, à travers le financement d'activités d'entreprises, ou la consommation des ménages. [...]
[...] La stagflation illustre la décorrélation croissance entre inflation et chômage, qui est exacerbée par le choc pétrolier de 1973. La forte dépendance des économies européennes et américaine au pétrole et à ses dérivés amplifie la forte augmentation de son prix, qui est ainsi relayée partout dans l'économie. Le renchérissement des coûts de production génère ainsi une forte inflation, mais également un ralentissement de la croissance économique dans les deux économies, mettant à mal les prédictions du consensus Keynésien. Les années 1980 voient l'émergence d'un nouveau consensus, qui identifie la politique monétaire Keynésienne comme responsable de l'inflation des années passées, et qui perdurera jusqu'au début des années 1990. [...]
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