Le commerce équitable est-il véritablement un commerce alternatif ?

Résumé du document

En grande surface, un consommateur passe en moyenne deux à sept secondes avant de choisir son paquet de café, de riz ou de sucre. A l'autre bout de la chaîne, dans les pays du Sud, un petit producteur attend en moyenne trois années avant de récolter la première cerise de café. Il lui faudra peut-être cinq, dix, ou vingt années pour sortir d'une situation de précarité ou de survie.

Constater ce décalage, c'est mesurer les enjeux que soulève le commerce équitable, conçu comme une alternative au commerce classique qui met en contact des sociétés marquées par l' "ère du zapping" - dans lesquelles le consommateur est souvent pressé d'effectuer ses achats et est souvent attiré par l'emballage - et des producteurs vivant dans des régions où le "temps économique" tourne au ralenti, et qui vendent leur culture une fois dans l'année à des intermédiaires (...)

Extraits

[...] Il apparaît donc que le commerce équitable s'est construit en réaction au commerce classique, dominé par la philosophie néolibérale, qui soutient que la suppression d'obstacles à l'échange international est bénéfique pour toutes les régions du monde. Ce considérant, est-il juste d'affirmer que le commerce équitable et le libéralisme constituent un antagonisme de fond? Poser ce problème conduit à étudier les relations mettant en jeu l'échange juste, promu par le commerce équitable, et les marchés conventionnels, avant d'analyser l'implantation d'un réseau d'économie solidaire au sein d'un système capitaliste libéral. Enfin, cette étude induit un véritable questionnement de cette alternative à travers l'examen de ses limites. [...]

[...] L'achat de produits issus du commerce équitable est plutôt perçu comme une bonne action un acte charitable, exceptionnel, tel un don à une association humanitaire. C'est pourquoi le travail de sensibilisation doit s'effectuer: afin que les populations comprennent qu'il existe une véritable alternative, un véritable de changer nos habitudes de consommation. Le portrait robot actuel du consommateur type est une femme d'âge moyen, plutôt aisée, qui achète plus par curiosité que par volonté de changer les choses. Le rôle des associations est donc de parvenir à sensibiliser en priorité les plus jeunes, afin de former des générations responsables et conscientes des enjeux du commerce équitable, mais également d'éveiller les classes populaires qui sont les moins concernées qui sont ceux s'estimant les moins concernés par le commerce équitable. [...]

[...] Ce considérant, la diffusion des mérites de cette forme de commerce alternatif au commerce classique se fait à un volume bien supérieur. L'effet, sans être immédiat, est extrêmement rapide. Le coup marketing ainsi réalisé dépasse les attentes. De en 2000, les personnes qui connaissent le commerce équitable s'affirment en 2007 à 81%. En moins de 7 ans, la proportion de gens ayant connaissance de l'existence du commerce équitable a été multipliée par 9. De surcroît, le succès est presque total pour la filière du commerce équitable car la convertibilité du nombre de personnes informées en acheteurs effectifs est très élevée. [...]

[...] En effet, la finalité si l'on peut dire poursuivie par l'alternative que représente le commerce équitable consiste, à terme, à parvenir à remplacer le commerce classique dans l'ensemble des pays développés. Pour ce faire, il est donc évident et inévitable que la filière du commerce équitable s'insère dans ce marché, s'adapte aux fortes contraintes posées par la philosophie qui sous-tend l'économie. Pour s'imposer, le commerce équitable devra être rentable, d'autant plus que la filière des grandes surfaces deviendra un élément incontournable pour sa pérennité. Or, rentabilité signifie productivité à moindre coût, réinvestissement des bénéfices pour développer cette productivité, etc . [...]

[...] Il apparaît donc que le commerce équitable, qui s'est défini par opposition au commerce classique, rompt avec la logique libérale. Ses thèmes s'apparentent effectivement à ceux du développement durable: il s'agit de mettre en place un système économique sain et performant et de promouvoir le respect de principes et de conditions sociales et environnementales. Il est opportun d'étudier à présent les moyens nécessaires à l'efficience du commerce équitable, tant dans sa mise en place que dans son adaptation au sein du commerce classique. [...]