art, société de consommation, importance de l'argent, production artistique, oeuvres d'art, promoteurs, mécènes
Ce n'est pas un hasard si les premiers artistes à concevoir la société globale comme une ennemie ont vécu au XIXe siècle : c'est que naissait alors la société industrielle et marchande, privilégiant le profit et l'utile. Des peintres, des romanciers (Flaubert, par exemple), des poètes, tel Baudelaire, ont abondamment exprimé leur mépris pour le bourgeois. Depuis, les critiques de la société de consommation se sont amplifiées et celle-ci est accusée de bien des maux : entre autres, elle encourage l'exploitation des plus faibles, elle est à l'origine de la mondialisation, qui, à son tour, lamine les cultures et nivelle les expressions artistiques. Un siècle plus tard. L'histoire semble décidément donner raison aux romantiques contre les boutiquiers puisque, lors des négociations du GATT en 1998, les Français eurent bien du mal à faire admettre aux Américains cette évidence : les œuvres d'art ne sont pas des biens comme les autres et, sans la reconnaissance officielle de « l'exception culturelle, l'art (notamment le cinéma et la littérature) aura du mal à survivre.
[...] S'il faut éviter d'accuser le capitalisme de tous les maux, il faut également se garder de tout angélisme. Ce qui caractérise le marché, c'est précisément son caractère amoral. Les financiers modernes sont autrement plus cyniques et plus puissants que les marchands hollandais qui, certes, s'enrichissaient, mais restaient des êtres humains avec leur sensibilité et leur vulnérabilité. La société marchande est aujourd'hui mondiale et sans âme : aussi faut-il que les pouvoirs publics la surveillent, assurant ainsi l'intérêt général. III. Le rôle de l'état pour protéger et favoriser l'art dans la société de consommation mondialisée Pour déjouer la tyrannie du marché en matière de création artistique, l'État français a mis au point des dispositions originales, quoique controversées : ainsi en va du prix du livre dont l'ancien ministre de la Culture, Jack Lang, a voulu qu'il soit unique, de manière à ce que les petits libraires, indispensables à la promotion d'une littérature de qualité, puissent continuer à être compétitifs par rapport aux grands circuits de distribution ; de manière aussi à ce que les éditeurs puissent conserver une marge bénéficiaire raisonnable afin d'éditer des œuvres littéraires plus exigeantes et donc moins rentables. [...]
[...] Sans les reproductions des œuvres d'art, comment chacun pourrait-il se constituer son musée imaginaire pour reprendre l'expression de Malraux ? Il ne faut donc pas être trop ingrat envers la société capitaliste : si la demande se fait exigeante et suffisamment massive pour être rentable, la société de consommation peut aussi favoriser l'accès à l'œuvre d'art, mieux parfois que ne l'ont fait les régimes communistes qui s'enorgueillissaient d'avoir démocratisé la fréquentation du patrimoine artistique. Le marché du disque comble les mélomanes, les nouvelles chaînes de télévision thématiques offrent à des amateurs de peinture, de danse ou de cinéma les œuvres que les grandes chaînes ne diffusent plus. [...]
[...] Certes, il faut éviter que l'art ne soit complètement pris en charge par le politique, car il est alors impitoyablement embrigadé. L'exemple de l'art socialiste de l'URSS et de ses satellites est là pour prouver la médiocrité d'un art inféodé à une idéologie : l'artiste a besoin d'être libre pour créer. Toutefois, la société marchande peut s'avérer aussi aliénante si elle aboutit à soumettre l'inspiration artistique aux seuls besoins de la masse : car, dans ce cas, s'imposent les seuls besoins spontanés, voire primaires. [...]
[...] La cote de certains peintres s'est alors emballée : les investisseurs achetaient leurs œuvres pour la seule raison qu'elles représentaient, du moins l'espéraient-ils, un bon placement. Ces spéculateurs oubliaient que s'ils avaient vécu à l'époque de Van Gogh, ils n'auraient sans doute acheté aucun de ses tableaux, puisqu'il n'était pas reconnu. Quel paradoxe, parfois encouragé par une politique culturelle frileusement assumée par l'État . La société de consommation peut achever de nuire à l'art en compromettant l'accès du public aux œuvres d'art. [...]
[...] De même, le visiteur du Grand Louvre découvre non seulement des salles d'exposition, mais aussi diverses boutiques qui n'entretiennent parfois, qu'un rapport assez lâche avec le patrimoine exposé ; ce qui pourrait faire dire aux partisans d'un musée sanctuaire que les marchands ont réinvesti le temple de l'art, pour le plus grand profit de l'art cependant. On pourrait donc dire que l'art est trop essentiel pour être abandonné à la seule société de consommation. Il serait catastrophique que l'art devienne une marchandise. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture