Que faire pour que le secteur financier contribue plus efficacement à la compétitivité des entreprises françaises ? Que faire pour qu'il contribue plus efficacement à la croissance française ?
Le débat sur le « modèle social français » est aujourd'hui au cœur des préoccupations politiques, animant les pages « opinions » des grands quotidiens nationaux et forçant chaque homme politique à prendre parti. La morosité des indicateurs de conjoncture conforte les tenants de la réforme dans leur volontarisme, tandis que les défenseurs de la tradition française s'appuient sur ses réussites sociales pour relativiser les arguments de leurs adversaires d'idées.
Ces inquiétudes quant à l'avenir du système économique et social français ne trahissent pas seulement les doutes d'un pays en proie à un déficit de croissance à court ou moyen terme. Il s'agit plus globalement d'une véritable prise de conscience des mutations imposées par la mondialisation, notamment financière, et des risques que pose cette évolution de l'architecture économique internationale pour le tissu productif français. Une question est centrale : comment favoriser l'intégration des entreprises françaises dans les processus liés à la mondialisation sans pour autant remettre en cause les dispositifs existants de protection sociale et salariale ?
Ce rapport s'inscrit dans cette thématique, en proposant d'aborder la question sous l'angle des rapports entre l'activité de la sphère réelle et celle de la sphère financière. Plus spécifiquement, il s'intéresse à un concept-clé de l'analyse de la nouvelle économie mondiale : la compétitivité, pour en tirer quelques remarques et enseignements susceptibles de contribuer à améliorer la situation des entreprises françaises vis-à-vis de leurs concurrents étrangers et ainsi, à terme, de promouvoir la croissance nationale.
Qu'est-ce que la compétitivité ? A l'échelle microéconomique, c'est la faculté pour une entreprise de proposer une gamme de produits suffisamment attractive (par le coût, la qualité, le service après-vente, ou tout autre avantage relatif) pour permettre de maintenir voire d'augmenter les parts de marché de l'entreprise vis-à-vis de ses concurrents.
Dans un contexte de mondialisation des marchés, de mobilité des capitaux et de concurrence internationale exacerbée, la définition macroéconomique de la compétitivité acquiert quant à elle de plus en plus de pertinence. On synthétise alors ainsi la capacité d'un Etat à créer sur son territoire les conditions propices à l'investissement et à la création d'entreprises, de façon à inciter les gestionnaires de fonds à placer leur argent dans des projets nationaux.
Il est facile de se rendre compte que compétitivité d'entreprise et compétitivité « globale » sont deux concepts très liés. Il est impossible pour un Etat d'attirer les investisseurs si ses entreprises ne sont pas suffisamment compétitives pour proposer des retours sur investissement suffisants ; à l'inverse, ces mêmes entreprises ne pourront générer de résultats satisfaisants que si elles évoluent dans un cadre institutionnel favorable à leur développement.
Dans le contexte français qui nous intéresse ici, il s'agit d'étudier la compétitivité d'une économie riche, fortement orientée vers l'emploi tertiaire (industries de services – table 1). Les approches traditionnelles de la compétitivité (dites de « compétitivité-coût »), qui théorisaient la capacité à produire le même produit que ses concurrents à un prix inférieur, deviennent inapplicables : la baisse des prix de transport et de communication, ainsi que la délocalisation des techniques de production font irréversiblement pencher la balance de ce type d'analyses en faveur des pays en voie de développement, dont les coûts de production sont parfois de l'ordre du dixième, voire du centième de ce qu'ils sont chez leurs concurrents plus riches.
La compétitivité de la France et des pays développés ne peut donc pas s'exprimer en terme de coût. C'est ainsi qu'il devient nécessaire d'introduire une notion fondamentale, véritable fil directeur des recherches présentées ici : l'innovation. Elément indispensable de la théorie économique de la croissance à très long terme, puisqu'elle justifie la possibilité d'une croissance durable de la production dans une hypothèse de productivité décroissante des facteurs, l'innovation s'incarne ici dans une conception plus dynamique qui fait d'elle le cœur de la stratégie de compétitivité des pays industrialisés.
Repensé à l'aune de ce nouveau concept, notre rapport s'intéressera donc plus précisément aux stratégies disponibles pour faire en sorte que les offreurs privés de financement investissent dans l'innovation en général et la recherche-développement en particulier. En effet, les nombreuses incertitudes et les coûts de court terme souvent prohibitifs de ce type de projets (risques de non-rentabilité du produit conçu à l'exploitation, retours sur investissement très tardif du fait des délais de développement) génèrent souvent la méfiance des gestionnaires de fonds, en particulier chez les pourtant très riches investisseurs institutionnels (banques, fonds de pension, etc.) qui doivent concilier leurs objectifs de rentabilité avec un impératif de sécurité des placements.
Ainsi, en reprenant la dialectique compétitivité « globale » / compétitivité d'entreprise élaborée précédemment, il s'agit d'une part de créer un environnement institutionnel sûr et favorable aux activités de recherche et de développement de façon à attirer les investisseurs potentiels vers les projets nationaux (on peut penser, par exemple, au rôle de l'éducation ou de la gestion des brevets) ; et d'autre part, de réfléchir aux techniques d'incitation possibles pour faire en sorte que les projets innovants soient valorisés à leur juste valeur et obtiennent une part suffisante des financements privés.
En insistant sur les déficits actuels de la politique française de l'innovation, ce rapport vise à attirer l'attention sur un aspect crucial et trop souvent négligé des politiques économiques. Le rôle moteur de que devrait jouer l'intégration européenne dans la définition d'une politique commune de compétitivité sera aussi mis en valeur, alors même que la Commission européenne s'est récemment alarmée du manque de progrès réalisés par les Etats membres dans la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne, dont l'objectif principal et désormais peu réaliste était de faire de l'Union Européenne l'économie la plus compétitive du monde à l'horizon 2010.
[...] La plupart de ces entreprises, notamment les plus petites d'entre elles, sont mono-bancaires. Si elles ont développé une relation privilégiée avec leur établissement bancaire, elles restent tributaires d'une seule banque, ce qui fragilise leur situation. De plus, nous assistons à une rationalisation du crédit, qui traduit une certaine frilosité des banques à l'égard d'entreprises qu'elles ne considèrent pas sûres et qui constituent pour elles un marché à risque. De fait, certaines entreprises se retrouvent exclues du crédit, et ne pourront ainsi bénéficier d'un financement bancaire qui leur permettrait de mener à bien leur projet, même si celui-ci peut être porteur d'un potentiel de développement élevé (cas des entreprises innovantes). [...]
[...] Néanmoins, pour une large part, elle demeure l'héritière du modèle mis en place après la Seconde Guerre mondiale pour une reconstruction rapide du pays, modèle qui fut par la suite mis par le Président de Gaulle au service de ses ambitions nationales : une France forte, et aussi indépendante que possible des deux grands blocs qui se partageaient le monde de l'après- guerre. Il semble donc logique de prendre cette politique pour point de départ d'une étude plus approfondie du système français actuel d'incitation à l'innovation. [...]
[...] En 1995, dans l'Europe des 11, la part des capitaux propres des entreprises dans le total représentait contre 42,3% aux Etats-Unis. Cela marque une faiblesse dans la structure de l'entreprise qui va ainsi perdre en crédibilité puisque n'apparaissant pas assez dotée en fonds propres et donc en solvabilité. Une telle situation est incompatible avec l'idée selon laquelle le financement de ces entreprises est censément assuré par le secteur bancaire. Les effets de conjoncture, qui vont augmenter la sensibilité des banques au risque, vont inciter ces dernières à se couvrir contre le risque et donc délaisser le financement des certaines entreprises peu fiables à leurs yeux. [...]
[...] Atteignant 586 milliards d'euros en 1996, elle représente un peu moins de la moitié du PIB français. Selon l'OCDE (1996), les fonds propres représentaient 36% du bilan des entreprises françaises en 1994 contre 20% en 1984, rapprochant ce taux à celui des Etats-Unis. De plus, le développement des instruments financiers permet aux entreprises de couvrir leur risque de change ou de taux, d'émettre des titres complexes qui correspondent mieux à leurs besoins ou participent de la protection de leur capital social (obligations remboursables en actions, actions à bons de souscription d'actions, Enfin, le développement du marché des fusions acquisitions, qui représente plusieurs milliards d'euros par an, permet de concrétiser des opérations de croissance externe et des rapprochements stratégiques. [...]
[...] Enfin, les lois de décentralisation de 1982 consacrèrent la nouvelle importance des régions dans l'élaboration de politiques de compétitivité territoriale. Quels résultats ? Aujourd'hui, le débat persiste à l'échelle européenne sur la capacité des économies motrices de l'Union (France, Allemagne, Italie essentiellement) à assurer une croissance forte du niveau de vie de leur population à court, moyen ou long terme. Les indicateurs macroéconomiques ne portent pas à la réjouissance. Jusque dans les années quatre-vingt-dix, pendant les Trente Glorieuses et même au-delà des crises des années soixante-dix, la croissance des niveaux de productivité en Europe était supérieure à celle que connaissaient les Etats-Unis, si bien que l'on pouvait assister à un lent rattrapage des niveaux de vie des européens par rapport à ceux des américains. [...]
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