L'ampleur des disparités socio-économiques entre pays du Nord et pays du Sud et l'alarmisme croissant que suscite la crise écologique mettent en cause la pertinence et l'efficacité des modèles du développement et du développement durable. De fait, ce nouveau modèle, pensé d'une part pour pallier aux échecs d'un développement construit autour de la seule variable économique, d'autre part pour répondre au défi (nouveau, en tout cas au niveau de la prise de conscience) de l'épuisement du potentiel créateur de la Nature, semble peiner à remplir ses missions.
Arturo Escobar et Joseph Stiglitz sont deux auteurs qui critiquent les modèles du développement. Le premier s'attaque aux fondamentaux du concept de développement : la grille de lecture anthropologique et des-constructiviste condamne de fait les fondements de la pensée libérale développementaliste et appelle à une reconstruction du système de représentations sur lequel s'appuie le développement durable; le second, pragmatique et programmatique, dénonce l'économicisme du développement actuel et réfléchit à une nouvelle modalité de développement durable.
Le projet du développement (durable) de concilier croissance économique, résolution des problèmes sociaux et respect et protection de l'environnement est de fait remis en cause. Le débat oppose alors tout particulièrement J. Stiglitz, pour qui le développement tel que le conçoit l'Occident peut, sous une nouvelle modalité (directement déduite des erreurs du passé) être véritablement efficace ; et A. Escobar, qui appelle, en quelque sorte, à sortir de la pensée développementaliste, culturellement et idéologiquement orientée, en inventant un nouveau discours et une grille de lecture du monde radicalement alternative.
[...] De fait, l'environnement n'est pas un luxe de riches : il existe un écologisme des pauvres qui dénoncent, à travers leurs luttes sociales contre la pauvreté et pour la reconnaissance de leurs droits, les ravages du capitalisme écologique et participent ainsi au combat en faveur de l'écologie. Toutefois, ces luttes sociales ne pourront obtenir une résonance mondiale et effective qu'en se donnant les moyens d'intégrer le champ (au sens bourdieusien) de l'écologie. Seul un mouvement social organisé, porteur d'un projet alternatif cohérent, réfléchi et exprimé en des termes respectant les règles du champ, pourra participer au débat pour dénoncer les incohérences du discours libéral du développement durable et imposer la viabilité d'un système de représentation culturel, économique et écologique différent. [...]
[...] Stiglitz) prescrite par les institutions internationales financières. Ainsi, l'exceptionnel décollage des économies et des sociétés nord-coréenne, taiwanaise ou chinoise n'a trouvé son impulsion ni dans les politiques de déréglementation et de libéralisation préconisées par le discours libéral du développement (ces pays n'ont pas hésité à maintenir barrières commerciales et subventions aux exportations), ni dans les politiques de privatisations, privilégiant au contraire la construction d'un secteur public fort. Enfin, le développement libéral a institué un nouveau clivage (qui se superpose au vieux clivage Nord/Sud) au cœur même des sociétés sous-développées : les injections de technologies, l'ouverture des frontières et la privatisation des ressources ont creusé des divisions à l'intérieur de ces sociétés, entre populations intégrées et populations exclues du développement. [...]
[...] Pourtant, le développement durable n'échappe pas aux critiques. Si le concept est indéniablement fédérateur sur le papier, les pratiques des acteurs privés restent particulièrement ambiguës. L'article du Monde questionne, quinze ans après l'émergence du développement durable, la sincérité de l'engagement des entreprises. En effet, si nombre d'entre elles, surfant sur la vague du développement durable, multiplient les déclarations d'intention, les concrétisations restent minimes. C'est souvent la pression du scandale (fortement médiatisé) qui pousse les firmes multinationales à réviser les conditions de travail de leurs salariés et à s'interroger sur les conséquences de leur comportement productif. [...]
[...] De fait, la perspective écosocialiste s'inscrit dans l'interprétation marxiste du capital dans la mesure où elles dénoncent la modernisation écologique du capital comme un moyen pour le capitalisme d'accroître son potentiel d'exploitation : l'Occident, en renforçant son contrôle sur les forces productives et les moyens de production, accentue sa domination sur les producteurs, particulièrement sur ceux du Tiers- Monde. A la source de la crise environnementale se trouve donc la culture économiciste et scientifique occidentale, synonyme d'exploitation exponentielle de la Nature par le capital, grâce aux mécanismes de l'économie de marché et à l'instrumentalisation des progrès scientifiques et technologiques. Les auteurs s'accordent pour affirmer que les modèles du développement doivent être refondés. [...]
[...] D'une part, la croissance économique, réinvestie dans la promotion d'un capital physique et humain toujours plus performant et compétitif, permet d'améliorer les capacités productives de la Nation (et donc de soutenir le PIB) notamment parce qu'une force de travail compétente est indispensable pour promouvoir un secteur privé puissant et stable qui est, dans la stratégie de J. Stiglitz comme dans celle de la Banque Mondiale, un des lieux privilégiés du développement (parce qu'il permet stimulation de l'emploi et lutte contre la pauvreté). [...]
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