En juin dernier, le commissaire européen en charge de la concurrence, Neelie Kroes, annonçait une réforme des aides d'Etat versées par l'Union. La réforme des règles communautaires serait guidée par deux principes phares : « équité et efficacité ». Pourtant, ces deux notions semblent de prime abord incompatibles.
Il s'agit en premier lieu de définir ce que recouvrent les termes d'équité et d'efficacité. Leur sens peut être plus facilement mis en lumière en les distinguant de deux autres mots proches : égalité et efficience. L'équité, d'abord, diffère de l'égalité : l'égalité est horizontale, et traite chacun de la même façon – c'est la justice corrective d'Aristote ; l'équité est verticale : le traitement de chacun est relatif à ses caractéristiques propres (besoins, contributions, mérites, etc.) – c'est la justice distributive. Pour caricaturer, c'est une forme très poussée et controversée d'équité que décrit Karl Marx lorsqu'il dit : « de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins ». L'efficacité, ensuite, désigne l'achèvement d'une fin, quels que soient les moyens utilisés, contrairement à l'efficience, qui requiert une dépense de moyens minimale : pour reprendre l'exemple de C.-D. Echaudemaison, si tuer une mouche au lance-flamme est efficace, la tuer avec un jet d'insecticide est efficient. Mais c'est une acception plus large et plus courante de l'efficacité que l'on prendra pour la suite de l'exposé : l'utilisation des moyens les plus adaptés pour parvenir à une fin donnée.
Dès lors, il semble bien qu'il soit difficile de concilier une recherche d'efficacité maximale, qui concerne l'allocation des ressources, et un souci de justice dans leur répartition : l'efficacité contraindrait, en effet, à laisser certains ‘sur le bord de la route'. Aussi notre raisonnement s'articulera-t-il autour de deux problématiques essentielles : équité et efficacité sont-elles incompatibles selon l'analyse économique ? Faut-il sacrifier l'efficacité économique au souci d'équité ?
[...] Que doit-on chercher à répartir équitablement entre les individus ? Si les droits et devoirs sont incontestablement, dans les démocraties modernes, les objets d'une répartition égale, il n'en va pas de même des possibilités ni des richesses. Il est alors possible de considérer deux modes de redistribution : la compensation potentielle et la compensation effective. La compensation potentielle vise à rétablir une égalité départ' entre les individus, de telle sorte qu'ils soient tous à même de s'élever et d'établir une situation d'équité fondée sur leur seule réussite personnelle en exploitant leurs capacités. [...]
[...] Bibliographie M. Blaug, La pensée économique, Economica C.-D. Echaudemaison, Dictionnaire d'économie et sciences sociales, Nathan M. Fleurbaey, Théories économiques de la justice, Economica J. Généreux, Economie politique 2. Microéconomie, Hachette Education A. Okun, Egalité VS efficacité Comment trouver l'équilibre Economica J. Rawls, Théorie de la justice, Seuil P. Samuelson & W. [...]
[...] De la même façon que l'optimum individuel du consommateur est le point de tangence entre sa droite de contrainte budgétaire et sa courbe d'indifférence la plus élevée, l'optimum social serait le point de tangence entre courbes des optima parétiens et la courbe d'utilité (ou de bien-être) sociale la plus élevée. Il s'agit d'une reprise du concept d'utilité totale de la société développée par les utilitaristes, en ce qu'elle considère la société comme un individu. Cette fonction d'utilité sociale a notamment été élaborée par Bergson et Samuelson. [...]
[...] Équité et efficacité sont-elles incompatibles ? Dans un premier temps, il convient de s'interroger sur les liens que l'analyse économique a pu tisser entre les concepts d'efficacité, d'équité et de bien-être de la société De la main invisible à l'équilibre général : l'efficacité économique garantit le bien-être collectif La main invisible de Smith. Pour les classiques, avec Smith, la question d'une incompatibilité entre efficacité économique et équité dans la distribution des ressources ne semble pas se poser. Pour Smith, les intérêts particuliers qui motivent les actions de chacun des agents économiques travaillent à l'intérêt collectif et au bien-être de l'ensemble de la société : les hommes sont comme guidés par une main invisible qui fait coïncider intérêts privés et publics. [...]
[...] La répartition de la somme totale de satisfaction ne compte pas. Le concept d'équilibre général est à rapprocher d'un tel point de vue. On peut montrer avec la boîte d'Edgeworth qu'un équilibre partiel de marché permet de maximiser les utilités de chacun des deux individus. De même, un équilibre général garantissant un équilibre sur tous les marchés est supposé optimiser les utilités de tous les consommateurs L'optimalité parétienne et les théorèmes de l'économie du bien-être L'efficacité selon Pareto. Pour définir l'efficacité de façon plus précise, Vilfredo Pareto, dans son Manuel d'économie politique, utilise un critère simple qui est celui de l'unanimité. [...]
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