« De deux choses l'une, ou bien les produits s'échangent effectivement en longue période au prorata du travail qu'ils renferment et une péréquation des gains du capital est dés lors impossible, ou bien une telle péréquation a lieu et dés lors il est impossible que les produits continuent à s'échanger au prorata du travail qu'ils renferment »
L'assertion ci-dessus est en relation étroite avec la théorie de la valeur-travail intégré. Celle-ci affirme que les produits s'échangent en proportion du travail nécessaire pour leur production. La citation met toutefois cette théorie en perspective puisqu'elle vérifie sa compatibilité avec une autre, celle de la répartition. Dans ce passage, il est question de la validité de l'équivalence entre produits échangés au prorata du travail et péréquation des gains du capital ; en d'autres termes, il s'agit d'examiner la possibilité de la coexistence de la théorie de la valeur-travail intégré (adoptée par Marx et par maints auteurs classiques dont Ricardo notamment) et de la théorie de la répartition relative aux capitaux (adoptée aussi par Marx) d'après laquelle les capitalistes sont rémunérés au prorata du capital investi. Or, cette deuxième théorie se fonde elle-même sur une autre théorie : la théorie du taux de profit moyen et du prix de production. C'est la concurrence des capitalistes issus de différents secteurs de production qui permettra l'apparition d'un taux de profit général moyen et la vente des marchandises à leur prix de production. Ce dernier est égal au coût de production augmenté du profit moyen mais ne coïncide toutefois pas avec la valeur-travail des marchandises.
Peut-on, malgré ce fait, concilier la théorie du taux de profit moyen et des prix de production avec la théorie de la valeur-travail de Marx?
La réponse est apparemment négative mais il faudra évaluer le fond de chacune de ces théories et l'ensemble de leurs implications pour comprendre qu'elles sont la traduction d'une même réalité à deux niveaux d'abstractions différents. Nous exposerons donc dans une première partie où se situe la contradiction illusoire pour ensuite explorer, dans une deuxième partie, chacune des deux théories, dans le détail. La troisième partie sera consacrée à la mise en évidence du lien étroit existant entre ces deux conceptions des relations marchandes au sein de la société capitaliste.
[...] Malgré l'une d'elles, celle de l'uniformité des taux de profit dans toutes les sphères de production de la société capitaliste prise en compte, le prix de production marxien prend en considération ce taux. Il s'écrit : Prix de production = c + v + + v).rG où c représente le capital fixe, v le capital variable et rG le taux général de profit. Sachant que le profit moyen πmoy = + rG, on en déduit que le prix de production = c + v + πmoy. [...]
[...] Pour un même taux de plus-value, on aura C + p'C = C1 + p'C1. L'égalisation des capitaux dans la théorie du prix de production se fait malgré l'inégalité du travail vu que v = 50 et v1= 10. Par conséquent, l'équation étudiée, bien que valable pour un produit donné (puisque le capital équivaut lui aussi à du travail), donne lieu toutefois à un système impossible quand on étudie deux marchandises, quand nous sommes donc au sein d'un marché, dans une société marchande et notamment dans la société capitaliste qu'étudie Marx. [...]
[...] Peut-on donc concilier la théorie du taux de profit moyen et des prix de production avec la théorie de la valeur-travail de Marx? En fait, la théorie de la valeur-travail et la théorie des prix de production n'expliquent pas deux économies différentes, mais une seule et même économie capitaliste à deux niveaux d'abstraction distincts qui s'inscrivent dans la logique d'une même interprétation. Seules, ces théories sont inefficientes : La théorie de la valeur-travail décrit les rapports de production entre producteurs de marchandises, et donc un seul aspect de l'économie capitaliste. [...]
[...] Pour deux capitalistes ayant des v identiques, amortir les salaires de leurs travailleurs en fin d'année, ou en fin de semestre affectera grandement l'équation Prix de production = c + v + + v).rG et créera une distance entre ce prix et la valeur-travail puisque le travail employé dans l'exemple reste le même. En somme, tant les composants différents des deux théories que les maintes implications de la théorie des prix de production contribuent à installer une divergence entre le raisonnement en valeur-travail et la logique des prix de production. La possibilité de conciliation des deux théories semble gravement atteinte et la conception d'un marché où les biens s'échangent à leur valeur-travail et où les capitaux se péréquatent, tous deux dans le même temps, devient impossible. [...]
[...] Pour sortir du cercle vicieux de la théorie des prix de production et du profit moyen, il faudra avoir recours à la valeur-travail. Après avoir montré l'interrelation existant entre les deux conséquences de ces théories, il s'agit de mettre en exergue le lien inhérent à leurs composantes. En effet, lier ces deux notions par leurs fondements garantit la démonstration du fait qu'une péréquation des gains du capital peut se faire au sein d'échanges des marchandises à la valeur-travail. En étudiant le prix de production, on découvre, après avoir fixé l'un de ses éléments (le taux de profit moyen qui est le même dans toutes les sphères de production) que les variations de ces prix ne dépendent plus que des variations des coûts de production et donc des moyens de production c et v : Quand la valeur du capital variable v (les salaires essentiellement) varie, cela signifie que la quantité relative de travail nécessaire à la production d'une marchandise varie et donc que la productivité du travail a changé. [...]
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