Ce texte est une des synthèses des travaux du GREL, Groupe de Recherche sur les Economies Locales. Sa démarche conjugue à la fois plusieurs sciences humaines et une pluralité de leurs domaines respectifs. Cette ouverture est une nécessité épistémologique en raison de la nature même de l'objet investi : le territoire. De par son caractère hybride et changeant, celui-ci ne se laisse pas capturer par les sciences sociales classiques fortement marquées par le cloisonnement.
Face à ces énigmes scientifiques, il est impératif de changer de point de vue. Un changement de vision est synonyme de révolution dans le sens où il faut construire de nouveaux paradigmes, de nouveaux concepts et de nouvelles méthodes d'investigation et d'intervention sur les terrains. « L'objet observé dépend du poste d'observation » faisait remarquer le grand mathématicien-philosophe Bertrand Russel. Contrairement au découpage disciplinaire et professionnel, tous ces niveaux de réalité et de réflexion sont, en réalité, enchevêtrés. Autrement dit, une « bonne théorie » s'applique, il n'y a pas lieu de séparer l'action de la réflexion. C'est à cette adéquation entre la réflexion, l'observation et l'action que s'est attaqué le paradigme des sites symboliques d'appartenance dans son domaine natif qu'est le développement (Zaoual, 2002, 2005).
Ainsi, dans une première partie, nous nous attacherons à exposer les principales conclusions de ce paradigme émergeant dont l'un des principes fédérateurs est le retour au territoire. Cette exigence trouve son origine dans les échecs successifs du développement et de la globalisation. Avec la crise de cette dernière qui s'intensifie, cette pensée de la proximité dessine un nouvel horizon pour les politiques de changement qu'imposent les limites d'une économie globalisée qui a perverti les valeurs humaines et qui détruit, en permanence, la biodiversité de la planète. C'est dans ces termes que la seconde partie de cet exposé de recherche aborde la pertinence de la réintroduction des acteurs et des territoires dans les sciences sociales contemporaines.
[...] C'est donc toute une révolution scientifique et pratique dont il s'agit. Elle touche l'ensemble des aspects de la vie en société et des relations entre les territoires du monde entier. Elle interroge en profondeur la vieille modernité dont le projet est en voie d'épuisement et réinvente l'idée d'une modernité située (Zaoual, 2005) qui s'adapte à la diversité de la condition humaine. Ici, la diversité des traditions des microsociétés humaines vient à la rescousse du désenchantement d'un monde globalisé en panne de sens. [...]
[...] 2006b, Management situé et développement local, Rabat, Horizon Pluriel. - ZAOUAL H. 2006c, Les économies voilées au Maghreb, Paris, Coll. Économie plurielle/Série Lire le site, L'Harmattan. - ZAOUAL H Le management situé. Une introduction à la pensée managériale postglobale, Revue Gestion 2000 nº 1/07, janvier-février, numéro spécial : Le management africain, Bruxelles. - ZAOUAL H. 2005a, La socio économie de la proximité, Paris, Coll. Économie plurielle/Série Lire le site L'Harmattan. - ZAOUAL H. 2005b La fine dell'occidentalizzazione del mondo? [...]
[...] Ce retour au territoire est aussi universel que l'attrait qu'avait exercé la globalisation économique depuis le début des années 80. C'est d'ailleurs ce ré enchantement par le territoire qui amène les auteurs les plus en vue, comme Bernard Pecqueur (2008), à y voir un nouveau paradigme en gestation. Face à la conjugaison des contraintes qu'impose la globalisation, le territoire, aux yeux des acteurs locaux, est à la fois un espoir et une échappatoire (Zaoual, 2006a). Si la globalisation tend à vider les sociétés contemporaines de leurs substances morales et sociales, la problématique des territoires tend, à l'inverse, à les réintroduire (Zaoual, 2008a). [...]
[...] C'est encore l'un des mystérieux paradoxes du paradigme économique (Zaoual, 2008a). La grande erreur de ces thérapies découle du postulat de l'autonomie de l'économique qui crée l'illusion d'une science autonome dotée de lois universelles. Si les physiciens et les mathématiciens insistent sur les conditions initiales de leurs modèles, les économistes ne font pas autant. Au contraire, à force de rechercher une totale autonomie de leur science par rapport aux contingences locales (cultures, époque, écosystèmes, milieu social, etc.), ils la rendent amnésique par rapport à la société d'où elle émane et inefficace par rapport aux territoires où elle applique, avec précipitation, ses préceptes et modèles. [...]
[...] Cette série de coupures est porteuse de contradictions économiques et sociales insurmontables sans changement de paradigme. Elle impose, aujourd'hui, non seulement une régulation de l'économie, mais aussi et surtout une inversion des valeurs qui placerait les hommes et les territoires au centre de la réflexion des sciences sociales émergentes. Autrement dit, le profit, le marché et l'économie toute entière devraient être fortement cantonnés strictement à certaines sphères d'activité pour mieux protéger l'harmonie des territoires et des sociétés. Proximité, diversité et créativité La déglobalisation en cours recentre les changements sur des niveaux d'intervention de proximité avec les identités des sites et leurs savoir- faire locaux. [...]
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