Durant les deux décennies précédentes, l'environnement économique des pays à faible revenu, particulièrement l'Afrique centrale, fut marqué par une crise de la dette extérieure très élevée qui de nos jours, continue à demeurer un obstacle majeur pour ces pays afin d'atteindre les Objectifs du Développement pour le Millénaire.
Aussi, cette crise de la dette extérieure élevée reste encore dans les débats des hommes politiques et de l'opinion publique à travers le monde comme étant l'un des principaux facteurs contribuant à restreindre ou limiter le développement économique de ces pays pauvres; vu que la plupart d'entre eux (pays pauvres) ont contracté de grands emprunts excessivement élevés au cours des décennies passées, souvent avec des taux d'intérêts sous des conditions privilégiées.
En effet, ces pays ont bénéficié des prêts très élevés combinés parfois avec de faveur qui en principe, pouvait permettre leur développement en accroissant les investissements pour accélérer une croissance durable.
En revanche, il s'est fait constater au début des années 80 que les ratios d'endettement atteignaient des niveaux insoutenables à telle enseigne que le remboursement de la dette devenait pratiquement impossible.
D'ailleurs, l'ensemble de la dette extérieure des pays pauvres estimés à 37,4% de leur Produit Intérieur Brut (PIB) cumulés fut multipliés par quatre durant ces seules 20 dernières années
Ainsi, bien que les remboursements de la valeur actualisée nette (VAN) sur les obligations ne soient virtuellement pas possibles comme dit ci haut, ceux-ci (remboursements) pourraient sévèrement contraindre si possible les performances économiques des pays endettés. Surtout que les ressources transférées au titre des services de la dette atteignent des proportions vraiment élevées par rapport aux capacités de financement et aux besoins de financement de ces pays, c'est à dire que ces services de la dette privent leurs populations aux besoins fondamentaux en compromettant leur épanouissement et développement.
Cependant, vers la fin des années 90, la campagne « Pour l'an 2000, annulons la dette » ayant connu un succès fou avec la plus grande pétition jamais réalisée auparavant (24 millions des signatures ont été recueillies) a permis d'obtenir des mesures d'allégement des dettes impensables par les principaux bailleurs des fonds.
Par conséquent, les institutions de Bretton Woods (Fonds monétaire international et banque mondiale) aussi bien que les créditeurs bilatéraux aient apporté au traditionnel mécanisme d'allégement existant, l'initiative PPTE renforcé.
Cette initiative en faveur des PPTE fournit une assistance conditionnelle se rapportant à des politiques économiques d'ajustement et quelques critères de performances afin de permettre aux pays éligibles de bénéficier d'un allégement de l'ordre de 80% de la VAN, et ainsi rendre la dette à un niveau soutenable. Et avec les ressources qui devraient être remboursées au service de la dette, les pays éligibles devront alors élaborer des stratégies dans un document (DSRP) pour éradiquer la pauvreté et relancer la croissance économique.
De tout ce qui précède, il s'avère que les niveaux insoutenables de la dette extérieure des pays pauvres (Afrique centrale) sont le symptôme d'un problème beaucoup plus important à savoir la faiblesse de la croissance économique; De ce fait, les préoccupations de notre étude consistent à répondre aux questions suivantes :
- Existe-t-il un seuil critique au-delà duquel la dette extérieure influe-t-elle négativement sur les performances économiques des pays de l'Afrique centrale ?
- Les investissements constituent le canal par lequel les effets négatifs de la dette extérieure se matérialisent ou se manifestent-ils ?
Nous allons délimiter notre analyse temporellement de 1980 à 2000, période au cours de laquelle a surgi le problème de la dette dans les économies africaines. Et comme champs d'analyse, nous utilisons un panel des pays de l'Afrique centrale ayant déjà atteint le point de décision de l'initiative en faveur des PPTE, présentement.
Dans notre étude, nous retenons pratiquement trois hypothèses que voici :
- La dette extérieure en Afrique centrale a une relation non linéaire avec le taux de croissance du PIB ;
- Le paiement futur de service de la dette (décrit par le poids du stock de la dette) en augmentant la probabilité d'un accroissement de la pression fiscale future décourage l'investissement domestique et étranger (debt overhang) ;
- Le service très important de la dette extérieure en évinçant les ressources destinées à l'investissement public moteur de la croissance dans les PPTE, constitue un frein à la croissance économique ;
Au cours du mois de juillet 2005, il s'est tenu à Addis-Abeba, le IVième sommet de l'Union Africaine avec comme thème principal : L'annulation totale de la dette extérieure de l'Afrique ; Juste avant le sommet de G7 à Gleneagles sur le problème de la dette toujours. Il s'avère que la dette constitue une entrave rongeant les économies africaines.
D'où, un tel exercice cherchant à déceler le seuil de l'endettement soutenable pourrait, dans la mesure du possible, pousser les gouvernements des pays pauvres de bien ajuster leur politique d'endettement extérieure.
Dans notre étude, nous aimerions vérifier premièrement, les effets de la dette extérieure à travers l'effet d'éviction du service de la dette et l'existence d'une relation entre la courbe de Laffer de la dette et la croissance dans les économies des PPTE de l'Afrique centrale particulièrement; Ensuite, nous cherchons aussi à savoir comment cet effet de la dette sur ces économies va -t-il se manifester et finalement nous aimerions vulgariser les estimateurs des moments GMM étant donné qu'il a plusieurs avantages que le traditionnel Moindres carrées ordinaires (OLS).
L'analyse sous étude sera basée sur les analyses des régressions multiples pour atteindre notre objectif.
Nous retenons certaines variables décisives de la croissance économiques pour les pays africains notamment : le revenu national réel par tête d'habitant (décalé pour tenir compte de la théorie de convergence), le taux d'investissement, l'aide publique au développement, la population, un indicateur de l'ouverture au commerce extérieur, le solde budgétaire pour établir la différence des politiques mises en oeuvre et enfin les chocs extérieurs mesurés par le terme de l'échange.
En plus des indicateurs de la dette extérieure en valeur nominale ou faciale, nous avons aussi le ratio des services de la dette et les exportations.
En effet, en utilisant une forme quadratique pour voir la relation non linéaire entre la dette et la croissance, deux méthodes d'estimation vont nous permettre de tester la robustesse de nos résultats, il s'agit de :
- Les effets fixes individuels (estimateur within) pour tenir compte de certains éléments nationaux spécifiques non observés tels que la qualité et l'historique des institutions etc. et nous assurer que les résultats ne sont pas influencés par les effets spécifiques liés au temps
- Le système GMM de la méthode des moments généralisés afin de corriger le biais introduit par la variable décalée du revenu national par habitant et l'endogénéité de certaines variables
Et puis nous allons estimer un modèle des investissements avec comme variables explicatives : l'aide extérieure, le revenu national réel par tête d'habitant, le taux d'ouverture commerciale, le ratio de service de la dette aux exportations et les différents indicateurs de la dette en valeur nominale rapportés aux exportations et au PIB. Cela en vue de savoir si ce dernier constitue le canal par lequel les effets de la dette se traduisent et si le service de la dette évince les investissements.
Il existe des articles, documents de travail, draft assez nombreux sur la question qui est sous analyse; Ainsi, nous avons passé en revue diverses littératures notamment :
OCDE (1984) dans son rapport « étude 1983 » met en exergue l'évolution générale de la situation de l`endettement des pays en développement au cours des années 60, 70, et au début 80. Il énumère trois éléments qui se sont conjugués pour donner naissance aux problèmes de la dette, à savoir :
- Les grandes mutations de l'environnement économique mondiale au cours de la période 79-83 imputables notamment à la priorité accordée par les pays riches aux objectifs de stabilisation et de croissance à moyen et long terme occasionnant une accentuation de la récession et une forte désinflation ;
- Les emprunts excessifs contractés auprès du secteur bancaire par certains pays en développement et en retour, les crédits excessifs accordés par le secteur bancaire à ces mêmes pays à la suite du second choc pétrolier;
- Enfin, l'adoption dans bon nombre des PED des stratégies économiques inapplicables durablement.
En plus, ce rapport relève le fait que les pays à faible revenu soient dans une situation insoutenable est dû à la fragilité de leur économie surtout qu'ils bénéficient des prêts à de taux très concessionnels.
Hansen (2001), quant à lui, tient compte des spécificités de financement des pays pauvres en analysant l'impact de l'interaction entre l'aide au développement et la dette extérieure sur la croissance de 54 pays en développement en mettant en évidence l'existence d'une courbe de Laffer de l'aide. D'après lui, cet impact négatif de la dette serait assez important dans les pays dépendant fortement de l'aide extérieure.
Yapo (2001) trouve dans une étude empirique que le taux de croissance du PIB évolue dans le sens contraire de l'endettement en Côte d'ivoire. Donc, un taux de croissance économique assez élevé réduit les opportunités d'endettement; ce qui lui amène à la conclusion selon laquelle les performances macro-économiques ont tendance à limiter dans une certaine proportion les contraintes liées aux besoins en capitaux extérieurs.
Patillo, Ricci et Poirson (2002) étudient le fait qu'aurait le doublement de la dette sur la croissance et ont trouvé une réduction du PIB per capita pour plus de la moitié des points de pourcentage.
En prenant comme base l'endettement extérieur moyen des PPTE en 2000 (300% des exportations et 80% du PIB), ils étudient l'effet qu'aurait une réduction de la dette de moitié des PPTE et trouvent une augmentation du taux de croissance du PIB par tête d'un point de pourcentage.
Néanmoins une limite apparaît dans son analyse du fait que son raisonnement est appliqué aux PPTE mais basé sur un échantillon incluant de non-PPTE.
Ils confirment la thèse du surendettement car il trouve qu'au-delà de 160-170% du ratio de la dette sur les exportations et 35-40% de la dette sur le PIB en valeur nominale, la dette rend négative la croissance.
Clements et al (2003) estiment un modèle de croissance retenant l'hypothèse du fardeau virtuel de la dette, et arrivent à conclure qu'une diminution 6 point de pourcentage du PIB du service de la dette va accroître l'investissement de 0,75 à 1 point du PIB et la croissance de 2 points de pourcentage.
Enfin, ils concluent que si la moitié du service de la dette est annulée sans hausse du déficit budgétaire, la croissance augmentera dans quelques PPTE par 0,5 point de pourcentage par an. En plus, ils confirment cette thèse de la courbe de Laffer de la dette car il trouve qu'au-delà de 50% de la dette en valeur nominale sur le PIB et 20-25% en valeur actualisée, la dette va rendre la croissance négative.
Idlemounden et Raffinot (2005) pensent que la dette extérieure constitue un fardeau pour une économie. Ils disent que le paiement du service de la dette tend à évincer les dépenses publiques menant à une baisse de l'investissement global et son poids futur décrit par l'encours influerait sur les incitations des agents économiques privés via l'accroissement de la pression fiscale. Ensuite, cet effet selon les auteurs, ne va se manifester qu'à partir d'un certain niveau justifiant ainsi l'annulation partielle de la dette lorsque ce seuil est dépassé.
Ainsi, après la lecture de la littérature de ces différentes études théoriques et empiriques sur l'impact négatif de la dette extérieure sur la croissance des pays pauvres, nous retenons la théorie de la relation non linéaire de la dette et la croissance. Cela tout simplement, du fait que la dette ayant pour objectif principal d'accroître la croissance, devient une entrave à la croissance de cette économie lorsqu'elle atteint un certain niveau.
Outre l'introduction qui fait le diagnostic et la conclusion, le premier chapitre définit les concepts de base et passe en revue la théorie entre la dette et la croissance.
Le deuxième chapitre présente les effets de la dette sur les performances économiques en Afrique centrale et enfin, au dernier chapitre, il sera question de faire une analyse empirique pour vérifier nos hypothèses et atteindre notre objectif spécifique.
[...] Cependant, nos résultats confirment l'hypothèse selon laquelle la hausse de service de la dette (à différencier de l'encours de la dette) évince l'investissement et cet effet d'éviction s'amplifie dès lors que le ratio du service de la dette aux exportations croît. Donc, en moyenne, pour chaque point d'augmentation du service de la dette, l'investissement des pays pauvres est réduit de 0.01 point de pourcentage du PIB. Par ailleurs, il apparaît étonnant que cette réduction soit tellement si minime et cela pouvait signifier que l'investissement dans les pays pauvres très endettés n'a pas été considérablement touché par le poids de la dette extérieure. [...]
[...] Les origines de la crise de la dette des PED Tous les pays pauvres n'ont pas connu le problème de la dette au même moment ; cependant, à la crise de la dette du Mexique de 1982, pratiquement l'ensemble de pays en développement ont connu des d'énormes difficultés à honorer leurs services de la dette. Par ailleurs, la dette des PED n'est pas apparue seulement dans les années 70, la république démocratique du Congo est née déjà endettée lors de son accession à l'indépendance héritant des dettes de l'ancienne colonie belge envers la métropole. [...]
[...] D'où l'épargne extérieure peut bien remplacer et redynamiser l'investissement intérieur en donnant lieu à une accélération rapide de la croissance économique. Partons de l'identité suivante : Dans laquelle S désigne l'épargne intérieure, I l'investissement, X - M le solde du compte courant de la balance des paiements et Sex l'épargne extérieure. Nous remarquons qu'à l'emprunt de l'épargne extérieure (accumulation de la dette extérieure) correspond un déficit de compte courant. Si le déficit courant provient d'un niveau d'investissement élevé, emprunter à l'étranger va permettre au pays d'augmenter sa croissance. [...]
[...] Comme variables explicatives, nous avons retenu le revenu réel par tête d'habitant pour déterminer le niveau de développement économique du pays, l'aide extérieure car elle permet aux gouvernements de réaliser aussi des investissements publics et nous incluons aussi le taux d'ouverture commerciale car elle a une relation positive avec les investissements. Nous ajoutons aussi le ratio du service de la dette aux exportations et les deux variables indicatives de la dette en valeur nominale pour voir son impact sur les investissements. Dans ce modèle, nous n'allons qu'utiliser les estimateurs des effets fixes car le problème de biais n'existe plus. Les résultats sont résumés dans le tableau ci-dessous : Tableau Impact du service de la dette sur les investissements Les résultats de ce modèle des investissements paraissent fort intéressants. [...]
[...] Dans ce sens, l'initiative PPTE se déroule en deux étapes principales de trois ans chacune, à savoir : 1ère étape : constituée par les bons antécédents énumérés ci haut pendant 3 ans ; et à la fin de cette performance économique, le pays va bénéficier de la part du club de Paris, des autres créanciers bilatéraux et commerciaux d'un accord de rééchelonnement des flux aux conditions de Naples de la VAN). Et le pays atteint le point de décision. Cependant, bien avant le point de décision, une analyse sur la soutenabilité de la dette est effectuée pour déterminer l'éligibilité du pays à un allégement supplémentaire de la dette. Par conséquent, il y a deux possibilités qui se pointent : - Si après analyse, il s'avère que l'opération aux termes de Naples due au club de Paris est suffisante pour réaliser la soutenabilité de la dette en 3 ans. [...]
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