"Le transport ferroviaire a connu dans la seconde moitié du XIXe siècle un véritable âge d'or. Cette situation enviable [n'a pas survécu] à l'émergence de concurrents redoutables pour le transport ferré, apparus dans la première moitié du XXe siècle" . Le transport de marchandises est ainsi caractérisé depuis les années cinquante par un déclin incessant du rail et une large prédominance de la route, à l'échelle nationale comme à l'échelle européenne.
Ce constat n'a rien de nouveau, mais il a pris une ampleur considérable depuis quelques années, dans un contexte de préoccupation croissante à l'égard des "coûts sociaux" d'une telle répartition entre les modes de transport, à savoir principalement l'impact environnemental négatif et l'insécurité que favorise le transport routier de marchandises. La hausse du prix du pétrole, et donc des carburants, a également contribué à la prise de conscience que des solutions alternatives au "tout routier" devaient être trouvées rapidement. De nombreux rapports ont été écrits depuis une dizaine d'années dans ce sens, qui préconisent pour la plupart de rétablir un équilibre entre les modes de transport de fret, en favorisant tout particulièrement le rail.
C'est pourquoi l'Union européenne et, dans son sillage, la France se sont engagées depuis la fin des années 1990 dans un effort de réforme des politiques de transport de marchandises afin de parvenir à un système durable, minimisant les incidences sur l'environnement, plus sûr et plus économe en énergie. Cette nouvelle approche du transport de marchandises s'est traduite essentiellement par la priorité donnée aux modes alternatifs à la route, au premier rang desquels le mode ferroviaire, à travers une stratégie de "rééquilibrage modal". Ces changements majeurs dans les politiques de transport de fret se heurtent toutefois à un certain nombres de limites qui expliquent les décalages entre l'évolution constatée et les résultats escomptés. Enfin, nous verrons que le "report modal" ne doit pas être envisagé comme unique solution et n'est d'ailleurs pas toujours souhaitable.
[...] Plus concrètement, la qualité des prestations du fret ferroviaire de la SNCF est très majoritairement jugée médiocre par les chargeurs qui déplorent une organisation peu rationalisée et inefficace. De ce fait, il est incapable de répondre à leurs exigences : rapidité, fiabilité, régularité, sécurité des marchandises. Il est certain que le fret souffre d'une mauvaise image au sein même de la SNCF, qui ne lui accorde pas la même attention qu'au transport de voyageurs et le relègue au second plan, comme "variable d'ajustement" ne justifiant pas une gestion d'aussi bonne qualité Le grand retour du rail : les raisons du refus de l'hégémonie de la route A la lecture des lignes qui précèdent, le déclin du fret ferroviaire au profit d'une domination écrasante de la route apparaît non seulement parfaitement logique, mais encore rationnellement souhaitable, au nom de l'efficacité de l'activité économique du pays. [...]
[...] En effet, comme le souligne Yves Crozet "le transport ferroviaire coûte cher à la collectivité", car c'est "un mode de transport largement subventionné et souvent très endetté"[13]. De plus, dans la configuration actuelle du système ferroviaire la croissance économique peut être affectée du fait d'une mobilité plus contrainte, de coûts de transport plus élevés et d'une chaîne de production moins flexible et donc moins adaptable aux aléas du marché et aux besoins impératifs des clients (vitesse, fiabilité, régularité, faibles coûts). [...]
[...] Le train, lui, est contraint de s'en remettre in fine au camion pour la desserte finale. La conséquence en est que, de manière générale, le transport par rail implique nécessairement des ruptures de charge entre les points de départ et d'arrivée, tandis que la route autorise un transport de bout en bout. Ces ruptures de charge sont coûteuses en temps et en main-d'œuvre, facteur de retard et parfois dangereuses pour la sécurité des biens transportés. Deuxièmement, le transport ferroviaire est en moyenne plus lent et il est jugé moins fiable (c'est-à-dire moins ponctuel et plus irrégulier) que le transport routier, dont la fiabilité est estimée à Or, vitesse et fiabilité sont des qualités primordiales recherchées par les chargeurs. [...]
[...] La vitesse d'acheminement est aussi une condition sine qua non pour le transport de certaines marchandises, tout spécialement les produits périssables. Tout cela tend à faire du rail un mode intéressant uniquement sur longue distance (plus de 500 km). Au-dessous, la complexité d'organisation, la perte de temps impliquée par les ruptures de charge et l'incapacité à assurer un service porte-à-porte qui caractérise le rail constituent des handicaps disproportionnés au regard de la distance et du temps de parcours. Sur courte distance il est donc peu judicieux de recourir au ferroviaire, tandis que la route offre une souplesse d'utilisation mieux adaptée. [...]
[...] Enfin, nous verrons que le "report modal" ne doit pas être envisagé comme unique solution et n'est d'ailleurs pas toujours souhaitable. La remise en cause de la domination de la route 1 La prépondérance incontestable de la route dans le transport de marchandises Une répartition modale très largement favorable à la route La prédominance de longue date du mode routier dans le transport de fret s'est très nettement accentuée depuis le début des années 1970, tandis que le fret ferroviaire a décliné inexorablement sur la même période, aussi bien en France ou que dans l'ensemble de l'Union européenne (UE). [...]
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