« Le scénario le plus ambitieux serait celui où une partie des pays concernés par ces engagements, principalement ceux de l'Union européenne, voire la Norvège et l'Australie, s'engageraient politiquement dans une deuxième période, sans forcément établir des objectifs contraignants, estiment certains observateurs », écrit Le Monde, en novembre 2011, à propos du sommet planétaire de Durban ayant pour but de renouveler le protocole de Kyoto. Il faut souligner dans cette citation deux expressions marquantes : « s'engageraient politiquement », et « sans forcément établir des objectifs contraignants ». Cela signifie que les pays de l'Union européenne engageraient leur souveraineté internationale légale, en tant qu'États de droit, tout en refusant des interventions d'une quelconque organisation ou la mise en place d'une planification obligatoire des actions à entreprendre pour lutter contre le réchauffement climatique. L'interprétation de cette phrase tend à montrer la volonté des États de conserver leur souveraineté westphalienne. En effet, les États refusent alors l'ingérence d'organisations mandatées par les institutions internationales pour vérifier que les engagements pris sur la scène politique internationale sont tenus. Cet exemple est révélateur de la tension qui existe entre problèmes environnementaux et souveraineté. En effet, de nombreux États refusent de s'intégrer dans des protocoles identiques à celui de Kyoto de 1997 au nom de leur souveraineté, ou même de s'engager en faveur de causes nationales, comme le Brésil qui refuse de participer à une action internationale pour sauvegarder la forêt amazonienne au nom de sa souveraineté. Il convient alors de s'interroger sur le sens originel et la définition de cette notion de souveraineté, pour comprendre si effectivement, la ratification d'engagements internationaux nuit à la souveraineté. Michèle Riot-Sarcey souligne le fait que la souveraineté est une notion qui est trop souvent vue comme linéaire, alors que selon elle, « la signification du souverain a perdu sa forme populaire (celle qu'elle avait acquise lors de la première partie du 19e siècle) en se logeant dans une représentation à distance du réel ».
[...] Les questions environnementales sont un enjeu majeur pour le futur de l'humanité. Or cette question est forcément politisée, d'une manière ou d'une autre, par des partis spécifiques comme Europe Ecologie Les Verts ou non, du fait de son importance cruciale. Elle amène immanquablement à des engagements contractés sur la scène internationale par les représentants du pouvoir souverain au nom de leur pays. Or ces engagements, pour être efficaces et respectés, se doivent d'être contraignants, ce que de nombreux pays refusent au nom de la conception classique de la souveraineté nationale, chère au Président de Gaulle, qui réside en réalité dans la souveraineté westphalienne. [...]
[...] Ce serait donc un renouveau de la conception de la souveraineté qui s'exerce à propos de sujets internationaux et universels, et qui est une reconnaissance mutuelle des politiques engagées en matière d'environnement. Cela passe donc certes par une perte de la souveraineté westphalienne, mais cette perte est compensée par une forme de légitimité nouvellement mise en avant, la souveraineté internationale qui prend fondement dans un droit défini. Qui se traduit en termes de politique nationale par une nouvelle direction légitime donnée aux politiques. (Paradoxalement, la souveraineté domestique est renforcée par le fait de l'adhésion de la population aux enjeux écologiques. [...]
[...] Qui se traduit par une perte de la souveraineté westphalienne. (Or l'acceptation de telles contraintes par un engagement sur la scène internationale revient à accepter pour un Etat de voir des instituts ou Organisations non Gouvernementales intervenir dans sa politique intérieure en vérifiant l'application des engagements contractés. Comme le soulignent Lerin et Tubiana, c'est la souveraineté westphalienne qui est alors mise en jeu. En effet, les engagements pris à propos des réductions d'effet de serre entraînent une nécessaire remise en question des politiques énergétiques des Etats, alors même que ces politiques sont une des prérogatives les plus importantes de l'Etat, puisque pour modifier les orientations industrielles, il faut passer par des contraintes constitutionnelles. [...]
[...] La question du contrôle de la communauté politique à l'intérieur des frontières est donc liée à la volonté de l'Etat qui représente la souveraineté nationale de s'intéresser aux problèmes écologiques. La souveraineté domestique peut se trouver renforcée du fait d'un choix délibéré de perdre une partie de son pouvoir au profit d'institutions internationales dans la visée de servir les générations futures. ( De plus, on peut considérer que les questions gouvernementales peuvent être un moyen de tendre à nouveau le lien distendu entre représentants de la souveraineté populaire et électorat. [...]
[...] Il apparaitrait donc logique que les Etats, dans une perspective de développement durable, décident de coopérer et de se fixer des limites dans le but de pouvoir préserver dans une certaine mesure la planète. Néanmoins, ces actions, à l'heure d'aujourd'hui, ne peuvent se permettre d'être isolées, d'où les nombreux sommets internationaux sur cette question depuis la Conférence de Rio. Pour pouvoir mettre en place une politique de lutte efficace contre le réchauffement climatique, il faut se référer à des institutions internationales telles que l'Organisation des Nations Unies, pour mettre en place des politiques vérifiables ou du moins prendre des engagements tels qu'ils avaient été pris lors du sommet de Kyoto. [...]
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