La naissance du "principe de précaution" comme important objet de réflexion permettant de répondre en partie au questionnement sur l'émergence de nouveaux risques, remonte seulement à une trentaine d'années. L'Allemagne en est le berceau, il s'insère, en effet très tôt dans le droit positif allemand sous le nom de "Vorsorgeprinzip". Les évolutions de la société et la place de plus en plus prépondérante accordée au progrès et à ses conséquences contribuent à sa popularisation. Cependant, malgré une place croissante dans la société, le principe de précaution reste un concept flou.
Il répond à une demande croissante de sécurité et au constat des limites des démarches de sécurité appliquées aux systèmes technologiques. L'absence d'une définition claire, le rend sujet à controverse. Le principe de précaution se voit accusé d'être le fantasme d'une société qui veut tendre vers un « risque zéro » pourtant inexistant, mais son déni est aussi perçu comme une inconscience des réalités. En raison de l'absence d'un consensus autour de son principe, la précaution s'insère difficilement dans le droit et semble ne pas pouvoir sortir de son cadre éthique.
[...] En raison de l'absence d'un consensus autour de son principe, la précaution s'insère difficilement dans le droit et semble ne pas pouvoir sortir de son cadre éthique. Une définition large du principe de précaution semble pouvoir tout de même être énoncée, à l'exemple de celle donnée par Olivier Godard, dans Le principe de la précaution dans la conduite des affaires humaines : Ce principe a trait aux critères de décision qui doivent être adoptés par toutes les personnes physiques ou morales dont l'activité est susceptible de créer un risque grave pour autrui du fait du recours à telle technique ou à telle substance, ou d'un changement dans l'usage de l'espace Cette définition permet de distinguer le principe de précaution qui opère dans un univers incertain, d'autres concepts comme la prévention (exempte de caractère hypothétique). [...]
[...] Il s'agit donc là d'un progrès vers une meilleure gestion des ressources de la planète, vers le développement durable. Néanmoins, cette amélioration a lieu à l'échelle d'un état et reste théorique. De plus, de nombreux pays privilégient dans l'arbitrage entre prudence et croissance, le développement. De nombreuses démarches didactiques doivent donc encore être effectuées afin d'étendre la prise de conscience des dangers de l'usage de la technologie afin de ne pas se condamner à une impuissance future, et de mettre en avant que le principe de précaution, loin de vouloir réduire à l'immobilisme, permet avant tout de prémunir la société contre des risques qu'elle ne peut pas mesurer scientifiquement, carence du modèle préventif. [...]
[...] Cette remise en question des fondements du principe de précaution conduit à assimiler ce dernier au conservatisme, puisque les risques sont en diminution. Une pratique trop grande du principe de précaution risque plus de limiter le progrès et la recherche. Si après l'accident ferroviaire de Meudon en 1842, Lamartine déclarait Plaignons-les, plaignons-nous, mais marchons ! ces propos semblent impensables aujourd'hui. Comme le souligne le rapport de P. Kourilsky et G. Viney, à multiplier les risques et les craintes, on risque d'inhiber toute innovation. [...]
[...] Le principe de précaution est en effet considéré comme l'affaire d'états qui s'obligent soit dans le cadre d'accords internationaux, soit d'engagements unilatéraux. Il appartient aux états de le mettre en œuvre d'où l'absence de sanctions juridiques. D'autres, au contraire, refusent de faire de ce principe une norme de droit et veulent le limiter à un principe de politique publique. Ces divergences ont pour conséquence de ralentir toute tentative d'action et bloquent le processus d'application du principe de précaution. Ainsi, l'inscription dans le droit du principe de précaution n'a pas en définitive d'impact direct sur son application, du fait notamment de l'absence d'un consensus commun. [...]
[...] Le risque est désormais un élément constitutif de la société comme le souligne Ulrich Beck dans La société du risque, il concerne par conséquent tous ses acteurs : A la différence de toutes les époques qui l'ont précédé, la société du risque se caractérise avant tout par un manque : l'impossibilité d'imputer les situations de menace à des causes externes. Contrairement à toutes les cultures et à toutes les phases d'évolution antérieures, la société est aujourd'hui confrontée à elle-même. La prise de conscience de l'existence des risques est la première étape vers l'action et l'application du principe de précaution. Tout d'abord théorisé, le principe de précaution trouve rapidement sa place dans la société civile. Il apparaît comme une réponse aux angoisses nées de la prise de conscience de l'existence des risques. [...]
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