Les récentes péripéties du Clemenceau, ce navire destiné au désamiantage envoyé jusqu'en Inde par le gouvernement français, mettent en évidence des hétérogénéités dans les législations environnementales au niveau mondial. Nombreux sont ceux qui souhaitent une plus grande cohérence entre les politiques menées par les différents acteurs. Dès lors, on peut raisonnablement s'interroger sur ce qui fait obstacle à cette intention politique apparemment neutre. Nous allons, au cours de cette étude, aborder la question des intérêts en jeu et tenter de voir quels sont les défauts du système actuel. Puis, nous montrerons qu'il est primordial d'avoir un point de vue économique sur ce débat, car il est difficile, comme souvent, de dissocier environnement et économie.
[...] Qui est contre une harmonisation des politiques environnementales ? A première vue, on comprend difficilement les réticences vis-à-vis d'un tel processus. Pourtant, en 1998, au Canada, des organisations écologistes on lancé un appel au Premier ministre pour rejeter un accord d'harmonisation, voyant dans ce dernier un prétexte pour de nouvelles coupes dans le budget alloué à la défense de l'environnement. L'accord prévoyait de répartir les champs de compétence entre les différents gouvernements provinciaux signataires, et restait, de l'avis des écologistes, trop vague sur les critères d'attribution de ces compétences. [...]
[...] Or, les agriculteurs américains ne voulaient pas être coupés du marché canadien. Dans le cas d'un échange entre deux pays, si l'un adopte des mesures plus strictes que l'autre, sa productivité se trouve limitée par l'application nécessaire de ces lois. Mais dans le même temps, ses produits sont reconnus comme étant de meilleure qualité, et dans le contexte mondialisé actuel, ceci se traduit par le gain de nouveaux marchés. Il est économiquement rationnel de durcir les normes environnementales Ainsi, si l'on considère deux pays A et avec A plus exigeant que B au niveau environnemental : - si une harmonisation des politiques a pour effet de durcir les lois du pays les consommateurs des deux pays y gagnent : o ceux du pays B car la qualité de leurs produits s'améliore, o ceux du pays A car le marché s'étend au pays favorisant la concurrence ; - si cette harmonisation a pour effet de niveler par le bas les politiques de A : o les consommateurs du pays A y perdent en qualité et en marchés, o ceux du pays B sont incités à échanger avec un autre pays puisque l'avantage qu'ils pouvaient avoir à commercer avec le pays A disparaît. [...]
[...] Pourquoi une harmonisation des politiques environnementales ? L'existence de sources de pollution trans-frontières implique une politique et une approche environnementale communes. La pollution d'un fleuve doit, logiquement, être prise en compte de la même façon par toutes les parties concernées pour être efficace : c'est vrai à l'échelle d'un pays, mais également à l'échelle d'une région ou d'une ville. Pour ces types de pollution, tout traitement est inutile s'il n'est pas adopté de façon uniforme. Ainsi, plusieurs pays sujets à des sources de pollution communes ont intérêt à jouer le jeu et harmoniser leurs politiques environnementales, au moins localement, pour lutter contre cette pollution. [...]
[...] L'analyse économique plaide pour une harmonisation des politiques environnementales L'exemple de l'Aléna cité plus haut illustre un phénomène contre-intuitif : on a en effet montré qu'une harmonisation pouvait entraîner un durcissement des normes du pays le moins avancé, alors que certains, organisations écologistes en tête, prétendent le contraire. On comprend mieux ce phénomène en l'analysant du point de vue économique; l'auteur prend l'exemple des pesticides. Avant l'accord d'harmonisation, les normes canadiennes étaient plus strictes que les normes américaines. On aurait pu craindre un nivellement par le bas puisque les Etats-Unis sont économiquement plus puissants que le Canada, et donc en position de force pour imposer leurs standards, en l'occurrence moins élevés. [...]
[...] Dans son Discussion Paper n°159, la Banque Mondiale soulève enfin trois arguments à l'encontre d'une harmonisation : la spécificité de chaque pays face aux problèmes d'environnement, la difficulté de mise en œuvre au niveau juridique, et enfin le fait que tous les pays n'ont pas les mêmes problèmes ni les mêmes revenus, et qu'il serait absurde de chercher à établir les mêmes standards entre un pays industrialisé et un pays pauvre très endetté. C'est pourquoi nous allons désormais considérer le cas de deux pays aux revenus comparables. [...]
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