urbanisme, Los Angeles, capitalisme
Mike Davis, avec Los Angeles, City of Quartz (1990), écrit ce qui reste comme son œuvre la plus aboutie et le premier maillon d'une longue série d'enquêtes portant sur Los Angeles. « Œuvre inclassable qui est un peu à la ville postmoderne ce que la « Paris, capitale du XIX siècle, de Walter Benjamin, est au monde de Haussmann et de Baudelaire » , sans tomber dans l'hagiographie, on peut affirmer que ce traité de sociologie urbaine décrit avec brio les tumultes de la capitale du futur, ville pleine de contradictions, stade suprême du capitalisme post-moderne, entre enfer racial et lutte des classes, entre utopie et dystopie.
[...] C'est-à-dire qu'il ne se contente pas de donner des indices agrégés. Il nourrit son propos d'anecdotes et de parcours individuels ; par cette rencontre avec les deux salvadoriens désabusés au début du livre, ou encore le parcours de l'entrepreneur Kaiser. Cela a pour effet d'impliquer le lecteur qui voit l'histoire de Los Angeles et de ses environs se faire sous ses yeux. On se sent happé par ce tourbillon d'histoires personnelles qui s'entrecroisent. Cela renforce l'impression de chao qui semble régner dans la ville. [...]
[...] Premièrement, Los Angeles est l'idéal type de la ville capitaliste moderne avec toutes les contradictions et les désastres que cela implique. Ainsi, c'est par un récit autobiographique que l'on rentre dans City Of Quartz. Traversant le désert et flirtant avec la faille de San Andreas, l'auteur revient méditer sur les ruines de Llano, utopie socialiste qui disparut sous les coups de semonce des promoteurs en 1917. Par un effet de contraste surgit alors Los Angeles à la figure du lecteur Los Angeles, matérialisation du capitalisme poussé à son paroxysme. [...]
[...] Mike Davis voulait produire un livre dans lequel on s'immerge pleinement. Notons cependant que dans Beyond Blade Runner: Urban Control, The Ecology of Fear (1992), M. Davis adapte le diagramme en cercles concentriques de Burgess à la ville de Los Angeles, dépassant la remarque qu'on pouvait lui adresser. La seconde critique, et sûrement la plus virulente que l'on peut faire à Mike Davis, peut se poser sous forme interrogative : mais où est passé la neutralité axiologique si chère à Weber ? [...]
[...] Aussi, c'est dans l'analyse des gangs que le bât blesse. L'auteur nous présente les membres des gangs d'un point de vue économique : les Crips ou les Bloods sont des « entrepreneurs ethniques », qui entreprennent des « révolutions managériales » (page 270), qui se constituent en cartels comme l'on forme des oligopoles, à l'image du cartel Medelin, qui selon les mots d'Eric Hobsbawm repris par l'auteur «n'est pas plus criminel que les aventuriers anglais et hollandais qui cherchaient à contrôler le commerce des Indes » (page 281). [...]
[...] Sont ensuite analysées la déconstruction de la sphère publique ainsi que sa militarisation. La sphère publique n'est plus conçue que comme un lieu de passage. On cherche à éviter le contact avec autrui. Les déplacements se font dans des grandes artères, dans des automobiles climatisées, sûrement pas en transport en commun. L'urbanisme est alors conçu pour gérer les flux de populations. Emblématique est à cet égard l'analyse des centres commerciaux modernes (p232-233) où la circulation du public « est canalisée sur des itinéraires d'un automatisme férocement pavlovien. [...]
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