Le XIXe siècle, caractérisé par les bouleversements économiques, sociaux et culturels qui le traversent, est également le siècle de l'émergence des nations et des idées de nations. Parallèlement aux sentiments nationaux qui se développent, le sport, phénomène né de la modernité, va progressivement s'implanter dans les sociétés industrielles en qualité d'élément représentatif incontournable de son époque. Le sport moderne, qui a en effet pris son envol au cours du XIXe siècle, puise ses origines en Grande-Bretagne : les pratiques sportives, jeux populaires d'abord récupérés par les classes dominantes de la société britannique qui les adapta à ses fins propres, et se constituèrent des clubs, se diffusèrent par la suite de l'Angleterre vers les autres pays d'Europe, par le biais de l'expansion économique et des conquêtes coloniales britanniques. Initialement réinventé dans une optique purement culturelle, le sport connaît un destin essentiellement politique, dès lors que l'idée de nation s'empare du phénomène.
De même que la première partie du XXe siècle voit la finalité de l'évolution de l'idée de nation amorcée au XIXe siècle, sous la forme du nationalisme exacerbé, le sport connaît tout d'abord une période de croissance autonome et de popularisation, indépendante de toute influence politique, avant de s'implanter définitivement dans le mouvement historique du XXe siècle en prenant sa part de responsabilité dans l'apogée du nationalisme dans l'entre-deux-guerres. Se pose dès lors la question de savoir dans quelle mesure le sport est tributaire du mouvement politique des nations, et à partir de quel moment et dans quelles circonstances le sport est devenu un enjeu de prestige entre les nations, un instrument de propagande, ou la vitrine d'un régime politique. Ainsi, il convient de mettre en avant la dynamique évolutive du sport et de son rapport à l'idée de nation : du renouveau du sport moderne, mouvement national et international initialement apolitique, à son utilisation politique à des fins de prestige national, pour enfin aboutir à son instrumentalisation extrême, au service des idéologies totalitaires.
[...] J-P.Clement, J.Defrance, C.Pociello (1994) Sports et pouvoirs au XXe siècle. Grenoble : Presses Universitaires de Grenoble. [...]
[...] Invention du sport et idée de nation (fin XIXe - début XXe) Industrialisation et modernité : le renouveau du sport moderne, mouvement apolitique La popularisation du sport : la naissance d'une passion nationale : Sports modernes nés de l'urbanisation, l'industrialisation, et la démocratisation des sociétés. Début d'institutionnalisation du sport Création de fédérations nationales. Emergence de sports comme institutions nationales facteur d'intégration sociale. Pierre de Coubertin et la rénovation des Jeux olympiques : l'Olympisme pacifique Olympisme pacifique Conception pédagogique du sport : effort, respect, universalité. Créer de la force nationale par l'entraînement sportif, et de l'harmonie internationale par la concurrence sportive (Coubertin). Rénovation des Jeux olympiques modernes en 1894. Première édition à Athènes en 1896 (13 nations). [...]
[...] Le fascisme italien : La nation et le sentiment national comme finalité du sport : Nation sportive par excellence Modèle sportif international. Le sport Porte-drapeau de la propagande fasciste internationale. Encadrement étatique du sport : Dopolavoro, et Jeunes Fascistes Outil de contrôle social. L'Allemagne nazie : Le sport, outil de propagande idéologique : Idéologie nazie Exaltation de la race aryenne et finalité militaire du sport. Structures de jeunesses (Hitlerjugend) Valorisation de la culture sportive. Les Jeux olympiques de Berlin (1936), une opportunité de propagande Prestige et retentissement international. [...]
[...] L'utilisation du sport comme preuve de la supériorité de la race aryenne, ou de l'évènement sportif comme outil de propagande révèle la politisation extrême du phénomène sportif, étroitement lié dans ces contextes à des considérations nationalistes. C'est donc dans les régimes totalitaires que le lien entre sport et idée de nation, poussé à son paroxysme, est le plus fort, allant presque jusqu'à leur fusion politique. Ainsi, si le sport a conquis le monde depuis la fin du XIXe siècle, il semble qu'il le doive essentiellement à des évènements politiques et militaires, la Première Guerre Mondiale ayant joué le rôle paradoxal d'accélérateur. [...]
[...] Les Jeux de Berlin, de par le nombre de nations et d'athlètes y participant, furent un succès sans précédent. Ce succès s'explique d'ailleurs difficilement si on considère le fait que l'Allemagne était effectivement isolé sur le plan international, et que ses idéaux étaient ostensiblement contraires à ceux de l'olympisme, le CIO ayant d'ailleurs plusieurs fois exprimé son inquiétude, entre 1933 et 1936, vis-à-vis de la flagrante contradiction entre la Charte Olympique et les principes racistes du nouveau régime. La réussite de Berlin tient finalement à la grande habileté de mise en scène des dirigeants nazis qui, pour rassurer l'opinion internationale, conservèrent à la tête du Comité Olympique allemand Theodor Lewald, personnalité d'origine juive, très influente au sein du comité international olympique. [...]
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