Notre travail repose sur l'étude d'une pratique de relaxation bien précise : Le yoga. Cette pratique connaît une expansion forte depuis ces dernières décennies : 840 professeurs de yoga étaient inscrits dans les pages jaunes en 1995 contre 1264 en 2004 . Ce phénomène ne concerne pas seulement le yoga mais l'ensemble des pratiques de relaxation selon Stéphane Héas . Un tel attrait pour ce genre de pratiques relaxatives peut connaître de nombreuses origines. Le sens commun l'explique alors par un besoin d'écoute de « soi » de la part des individus, d'écoute de leur corps, devenue de plus en plus difficile dans nos sociétés occidentales qualifiées d'hypermodernes, de stressantes, d'aliénantes. Ce discours est relaté par bon nombre de magazines féminin aussi ou autres revues « people. »
Notre travail est, non pas de comprendre les causes d'un tel engouement pour ces pratiques mais plutôt de tenter de comprendre de façon sociologique, à travers une pratique particulière, ici le yoga (envisagée bien entendu comme une pratique parmi tant d'autres), la façon dont les acteurs arrivent à s'adapter ou à s'affranchir de ce stress, voire à le réduire et à s'en défaire, pour tous ceux du moins qui n'auraient pas le capital global nécessaire pour faire de nécessité vertu.
[...] À travers les entretiens, nous avons pu déjà cataloguer plus ou moins ces répercussions. Il semblerait que le yoga agisse sur l'estime de soi, de façon positive, qu'ensuite, cela se transforme en souci de soi (forme de narcissisme), avant d'influer sur le rapport aux autres Estime de soi : Comme nous l'avons déjà dit plus haut, il semble que le sentiment de meilleure estime de soi commence par une réappropriation de son corps. Arianne Goldet, responsable du service beauté forme à Marie-Claire note que Les gens se sont aperçus que leur corps était leur premier capital c'est de la même manière que David Le Breton écrira Le corps devient le lieu géométrique de la reconquête de soi et de la reconquête des autres.» Dans nos entretiens, l'exemple le plus flagrant est celui de notre enquêtée atteinte d'un cancer qui dit clairement : - Et c'est clair que le yoga ça m'a permis d'être debout, c'est la phrase que j'utilise ouais ! [...]
[...] Y'a pas la prise en compte du tout de la douleur psychologique, même les effets au niveau des autres, les effets quotidiens, y'a rien, c'est une calamité, j'en suis pas revenue moi, ah non, un désastre, un désespoir Avec le yoga j'étais acteur et j'avais prise sur moi Les docteurs d'hôpitaux, ils ont pas le temps, ne sont pas sensibilisés à tout ça, et ils en parlent pas Ca ne les intéresse pas, ca ne les concerne pas et ils ne sont pas concernés, de toute façon ils n'entendent pas, même si on leur parlait de gym douce, je crois qu'ils ne comprendraient pas, alors ! Si on leur parle de yoga ou du reste ! Sauf, sauf à la clinique de la sagesse puisqu'ils travaillent de plus en plus avec des profs de sophro. Mais Eugène Marquis, moi ce que j'en ai vu c'est plutôt déplorable hein ! [...]
[...] Pendant la décontraction, je rêve, j'ouvre les yeux, j'les ferme pas euh j'ai encore du mal à me concentrer hein ! Bon pour moi ce n'est pas encore ça qui est primordial, ce sont les différentes postures, dont certaines postures qui sont assez physiques, hein ! Ce sont vraiment les postures qui m'intéressent. Donc les effets ce sont des effets purement corporels en fait ? Ah ouais ! Moi les effets psychologiques ou pour me déstresser ou autres, c'est pas pour moi, c'est pas ça que je recherche, j'suis bien, cool, en retraite (rires), pas le stress d'un boulot non plus donc euh voilà. [...]
[...] - Alors pour en arriver là il y a eu déjà la découverte d'être capable de, mais aussi de ne pas l'être - Et même dans la rue je prends conscience de ma respiration - Avec le yoga j'étais acteur et j'avais prise sur moi Il y a donc une notion de contrôle de soi pour arriver à l'état souhaité et ce contrôle de soi est déjà une satisfaction. La douceur s'acquiert donc par cet autocontrôle notion développée par Norbert Elias[21]. [...]
[...] Cela contribue-t-il à une meilleure gestion de son quotidien ou cela demande-t-il un ajustement délicat, voire impossible, entre la philosophie de vie du yoga et notre quotidien d'aujourd'hui ? Nous tentons donc de comprendre dans ce chapitre la façon dont nos pratiquants, suffisamment investis dans la pratique du yoga, concilie leur philosophie de vie avec leurs conditions objectives de vie. Pratiquent-ils chez eux, sinon pourquoi ? Arrivent-ils à ressentir les bienfaits du yoga dans leur quotidien ou seulement pendant la séance de relaxation ? [...]
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