Musulmanité, islamité : une appartenance, une identité, mais une condition sociale avant tout

Thèmes abordés

islam, condition sociale, prolétariat musulman, revendications identitaires, pouvoirs politiques, conscience de classe, classe sociale, paix sociale, lutte des races

Résumé du document

La population étudiée (les descendants de l'immigration nord-africaine) forme, en France comme en Belgique, une « classe » particulière composée d'individus présentant une condition sociale similaire qui se traduit par plusieurs éléments : des pratiques et modes de vie, des facteurs économiques, mais aussi le rapport que ce groupe entretient avec le reste de la société. Les éléments qui sont pris en compte pour mettre en évidence l'existence d'une « classe sociale » sont principalement socio-économiques et ne correspondent pas à des facteurs basés sur la culture ou la religion.

Extraits

[...] La religion devient une fois de plus, mais d'une manière différente de ce que le décrivait le marxisme, un certain « opium du peuple ». Ainsi, le système capitaliste, après avoir fait la promotion de la mondialisation, de l'abolition des frontières économiques, des flux commerciaux et financiers ininterrompus, des échanges culturels effrénés, fait de l'identité un nouveau cheval de bataille. Il s'adapte à son temps, accompagne les tendances et le désir des populations (quand il ne les crée pas), et se trouve aujourd'hui dans un contexte de libre échange accru, qui réveille les peurs et le repli identitaire. [...]

[...] En France et en Belgique, cela fait plusieurs années que ces partis sont ancrés dans la vie politique. Il représentent aujourd'hui de réelles forces d'opposition comme en témoigne les résultats des dernières élections européennes et nationales: en Belgique, le parti Vlaams Belang est passé de 3 à 18 sièges à la Chambre des Députés et a obtenu 18,5% des voix au Parlement régional de Flandres ; l'arrivée du Front National au second tour de l'élection présidentielle de 2017 en france parle d'elle-même. [...]

[...] Ces éléments permettent de soutenir l'existence d'une classe sociale présentant des caractéristiques sociales et économiques communes. Cependant, une classe se définit également dans son rapport à soi et aux autres La classe sociale : un rapport à soi et un rapport à l'autre Une classe se définit par son rapport à l'autre dans une société donnée, mais aussi par son rapport au processus de production et à soi-même en tant que classe. Dans son rapport aux autres classes, au sein d'une société capitaliste, on remarque une domination qui se manifeste non seulement à travers l'aspect économique (discrimination à l'embauche, taux d'activité bas, taux de scolarisation le plus bas, revenus les plus bas etc) qui montre clairement une opposition (entre une classe détentrice du capital et une autre qui n'a que sa force de travail), mais aussi à travers un aspect plus « sociétal » qui pousse à revendiquer davantage de justice sociale. [...]

[...] Il faut cependant attendre une trentaine d'années pour que les communautés locales et lieux de culte soient pleinement reconnus. Cette reconnaissance légale intervient dans les années 1970 en situation de crise économique et il est vraisemblable de penser que ces considérations économiques l'aient facilité. Le contexte politique des années 1980, caractérisé par des discours plutôt discriminatoires envers les populations immigrées de toute origine mais plus particulièrement musulmanes, ne facilite pas un traitement serein de cette question et dès lors, l'immigration des musulmans a tendance à se réduire aux considérations religieuses. [...]

[...] C'est ainsi que des militants de la gauche s'affichent avec des réactionnaires religieux au nom de la défense de la laïcité. Ils veulent défendre les opprimés musulmans mais échouent en les gardant dans ce statut sans le lier à l'aspect économique. Ils ne défendent pas les principes qui sont pourtant les fondements théoriques de leurs mouvements (dont la dénonciation de l'injustice sociale créée par le système capitaliste). Les groupes musulmans extrémistes sont également à l'origine du renforcement du débat identitaire. [...]