De Jack l'Eventreur à Hannibal Lecter, pourquoi les tueurs en série nous fascinent-ils ? D'où nous vient ce goût, ou du moins cet attrait pour le morbide, la violence poussée à l'extrême ? Jack l'Eventreur aurait inauguré l'"âge du crime sexuel", alors qu'avant lui, presque tous les crimes avaient connu des motivations économiques. Cent ans plus tard, Jack l'Eventreur est devenu un mythe et les tueurs en série nous fascinent toujours. Pourtant, c'est plus un retour qu'une continuité, il n'en a pas toujours été comme ça. Tout en évitant de faire une analyse cyclique comparant des fins de siècle, on peut voir que les tueurs en série sont plus à l'avant-plan depuis une vingtaine d'année, qu'il y a 50 ou 60 ans. Peut-être cette époque-là était-elle trop occupée par ses tueurs de masse ?
[...] Le sang, la mort, le sexe. Voilà la recette qui fait vendre. En quelques jours, la presse va devenir l'alliée du mystérieux tueur. Le 12 septembre, la Central News Agency reçoit un courrier rédigé à l'encre rouge. L'auteur expliquait qu'il était contre les prostituées, avant de se moquer de la police et d'annoncer un prochain meurtre. Et de signer: "Jack the Ripper", Jack l'Eventreur La police ne croit pas à un canular et croit avoir un moyen d'identifier le meurtrier. [...]
[...] Le but est donc bien ici de comprendre pourquoi les tueurs en série nous fascinent à l'heure actuelle. Pour cela, il fallait d'abord comprendre le "mythe Jack l'Eventreur". Mais la première chose à faire était de le replacer dans la société qui l'a vu naître, la société victorienne. Cela pour deux raisons, tout d'abord parce qu'on ne connaît pas l'identité de Jack l'Eventreur et que le but de ce travail n'est pas une x-ième tentative de résolution du mystère; ensuite, parce que c'est dans cette société qu'il faut chercher les causes de l'engouement qu'a provoqué cet événement. [...]
[...] C'est maintenant le temps des suppositions, des hypothèses, de l'imagination, de la création d'un mythe en quelques sortes Des coupables furent vite désignés: un boucher, un anatomiste en mal de dissection, un médecin fou, ou encore un "schohet", c'est-à-dire un tueur rituel patenté par les autorités rabbiniques pour garantir la mise à mort du bétail selon les prescriptions juives traditionnelles. On envisagera également que ce puisse être une personne de la noblesse, on accusera entre autres le Duc de Clarence, petit-fils de la Reine Victoria. Mais tout cela ne semble être que purs fantasmes. Le mystère reste donc entier. [...]
[...] La question est: qu'est-ce qui fait, aujourd'hui, ressurgir les peurs de la société victorienne ? Je pense que l'irruption du Sida dans les années '80 a fat ressurgir les séquelles et les fantasmes de l'époque victorienne qui avait engendré Jack l'Eventreur et Dracula. Le mythe vampirique, menacé de sclérose, était une métaphore culturelle idéale pour une maladie qui, tout comme le vampirisme, mêle le sang, le sexe et la mort. Cette métaphore apparaît clairement dans la version de Dracula de Francis Ford Coppola (1992) et explique le renouveau engendré par ce film. [...]
[...] Rappelons tout d'abord quelques faits. En 1864 et 1869, le parlement a voté des lois sur les "maladies contagieuses", destinées à combattre les risques de maladies vénériennes dans un certain nombre de garnisons de l'armée et de bases navales. Toute femme soupçonnée, en ces lieux, d'exercer la prostitution pouvait, sur ordre d'un juge de paix, être envoyée dans un hôpital, y être contrôlée de gré ou de force, et, en cas d'analyse positive, être condamnée à y être soignée pendant au moins trois mois. [...]
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