A partir de diverses expériences d'accompagnement social menées auprès de personnes en situation d'exclusion sociale, il apparaît une réalité commune à toutes les structures d'accueil à savoir que nous, travailleurs sociaux sommes fréquemment confrontés, dans les différentes situations au cours desquelles nous établissons une relation d'aide à la personne, à l'expression de souffrances ou de troubles psychiques générés ou aggravés par des difficultés multiples telles que familiales, sociales, de santé, ou économiques...
Si notre mission d'éducateur se heurte à de nombreuses difficultés liées aux réalités de l'exclusion et de la précarité comme l'instabilité, la fragilité ou la mobilité des personnes accompagnées, la souffrance psychique semble apparaître alors quant à elle comme une donnée supplémentaire venant parasiter notre travail social, et rendant d'autant plus complexe l'exercice de notre pratique.
Face à ces situations, nous avons souvent le sentiment de nous retrouver dans une impasse, considérant alors que le champ de la souffrance psychique est trop spécialisé pour l'éducateur, que nous n'en possédons pas les outils requis, et qu'il revient plutôt au domaine de la psychiatrie de prendre en charge l'accompagnement de la personne manifestant une souffrance psychique.
Autrement dit, en quoi cette souffrance rencontrée au sein de la population en situation d'exclusion concerne t-elle le champ de l'éducation spécialisée ? La question revient alors à se demander si cette souffrance psychique observée est plutôt d'ordre structurelle, ce qui amènerait à considérer dans ce cas que le travail n'est pas de l'ordre du travail social mais plutôt de celui de la psychiatrie, ou plutôt conjoncturelle, ce qui reviendrait alors à considérer dans ce cas que nous, éducateurs, demeurons effectivement acteur à part entière dans le champ de la santé mentale (...)
[...] Par exemple, je pense à S.A., un jeune qui, accueilli depuis des mois à la Halte qui n'envisage rien d'autre que la vie qu'il mène actuellement entre la rue et les lieux d'hébergement d'urgence, avec qui pourtant nous étions capables d'avoir des conversations très riches, tout du moins sur le moment. - celles qui sont en situations d'errance au sein de l'espace public, mais qui sont connues des services sociaux, inscrites, et accompagnées par intermittente en fonction de leurs demandes et du fait ou non qu'elles se présentent aux services concernés. Dans ce cas, mon travail d'éducateur va consister plutôt à amorcer des pistes pour permettre à la personne d'envisager un accompagnement plus investi entre elle et moi, en tant que professionnel. [...]
[...] Etre humain et L'Accomplissement de soi Editions d'Organisation 2006 DE GAULEJAC Vincent, Le sujet manqué, l'individu face aux contradictions de l'hypermodernité in AUBERT Nicole, L'individu hypermoderne, Erès pp 129-143. HEGEL, La Phénoménologie de l'Esprit Comité de Vigilance des Alpes Maritimes rue Macarani à NICE, s'occupant des personnes sans papiers Il est intéressant de lire les témoignages sur http://webxclusion.ifrance.com/dossiers/sdf.htm notamment l'article Les 3 jours d'initiation. (auteur apparemment anonyme). ROGERS (Carl).- La relation d'aide et la psychothérapie (1942). Paris, Editions Sociales Françaises Hadji, Ch. [...]
[...] Cela permet d'ouvrir la porte à une réflexion en tant qu'éducateur : considérer que cette manifestation de souffrance psychique est d'abord plutôt d'ordre conjoncturel et liée à des évènements extérieurs. Et c'est à cette condition que l'on peut envisager une prise en charge de cette souffrance . Ainsi, trois hypothèses causales possibles ouvrent chacune à des actions spécifiques : * Si la souffrance psychique est connue comme le débordement des mécanismes d'adaptation et de défense de la personnalité, l'éducateur peut se fixer des objectifs précis tels que: - Surligner les compétences antérieures de la personne et l'aider à les réactiver si possible, aider la personne à se requalifier, à se réinscrire dans une zone de compétence - Alléger ou supprimer les difficultés existentielles rencontrées - Assurer un soutien et un accompagnement adéquats, diversifiés, personnalisés et inscrits dans la durée - Faire percevoir la possibilité d'un changement à partir des ressources propres de la personne d'une part et de l'aide apportée d'autre part - Créer une relation d'aide dans le respect de son intégrité - Restaurer les affiliations et le lien social * Si la souffrance psychique est perçue rien que comme le résultat du mode de vie lié à l'exclusion et à la précarité, des mesures et des aides socio-économiques visant à alléger et à réduire l'exclusion et la précarité sont alors efficaces, même si en général, cela reste bien souvent insuffisant : chez la personne sortie de l'exclusion et de la précarité il demeure une trace douloureuse de cette période et une anxiété d'y revenir qui , généralement, nécessite une prise en charge longue. [...]
[...] Il y a le philosophe, le suicidaire et le voyageur ne serait-ce que dans sa tête. Ce dernier, très majoritaire, piétine à la recherche d'une véritable issue, ni mortelle ni cynique Avant tout, les facteurs qui conduisent à la rue sont variables[19]. Le fait de ne pas avoir de "chez soi" est parfois le seul point commun entre un salarié pauvre en attente de logement social, un vieil homme à la rue depuis des années, une femme victime de violences, une famille migrante en attente de papiers, un demandeur d'asile débouté, un jeune en rupture familiale, un "ex-placé" dans un foyer de protection de l'enfance, un ancien détenu, etc. [...]
[...] De plus, quand les personnes sortent de l'exclusion, elles entrent souvent de nouveau dans la précarité. Ce jeu de yo-yo fragilise les personnes SDS et les exposent à la souffrance psychique et à ses conséquences. Enfin, la précarité quant à elle peut à la fois être considérée comme un état (contrairement à l'exclusion) mais aussi comme un agent déterminant. Cela permet aussi noter l'intérêt qu'il y a à intervenir en tant que travailleur social sur les déterminants structurels et environnementaux, d'insister plus particulièrement sur les évènements de vie nécessaires pour déclencher la précarité et l'exclusion. [...]
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