Le travail de Touraine peut être divisé en trois périodes : la première est consacrée à la sociologie de l'action, la seconde se concentre sur l'étude des mouvements sociaux et la troisième porte sur le Sujet, considéré comme principe central de l'action. C'est dans cette troisième période qu'il s'agit d'inscrire l'ouvrage que nous avons travaillé.
Dans ce livre, Touraine pose la question du vivre ensemble en s'affirmant à la fois comme libres et égaux, mais différents. Cette interrogation est aussi celle de la communication entre les personnes et les cultures.
Une première réponse pourrait être donnée : à présent, nous vivons déjà ensemble ! "Des milliards d'individus visionnent les mêmes séries télévisées, consomment les mêmes boissons", etc. Mais ce n'est certainement pas assez pour dire que nous appartenons à la même société, à la même culture, car les éléments globalisés sont détachés d'une organisation sociale particulière. Ils sont partout et donc nulle part. Cette désocialisation de masse fait que nous ne vivons ensemble que dans la mesure où nous "faisons les mêmes gestes et utilisons les mêmes objets", mais sans être capables de communiquer entre nous.
Deux idées vont guider la recherche de Touraine : la première s'intéresse à la production de soi, organisée autour du thème de la dissociation qui conduit à la démodernisation ; la deuxième concerne le vivre ensemble, organisée autour du Sujet, principe non social à partir duquel doit être reconstruite une conception de la vie sociale.
L'enjeu du livre est donc de refonder une conception de la vie collective et personnelle à partir d'un principe non social. Il s'agit de nous donner des moyens de reconstruire notre capacité de gérer les mutations en cours et de définir des choix possibles là où nous sommes aujourd'hui tentés de ne voir qu'un progrès indéfini ou un labyrinthe sans issue (...)
[...] Après avoir entendu Touraine, nous pouvons donc penser que la notion de sujet s'articule sur celle d'acteur. Il se pourrait peut-être que le sujet soit une sorte de mutation plus précise de ce qu'était l'acteur. Dans ce cas, le paradigme de l'acteur s'apparenterait à la lutte sociale et le paradigme du sujet, à la lutte culturelle. La nouveauté de la notion sujet provient alors du fait qu'il n'existe plus des individus engagés qui sont déterminés par un rapport de classe ou de force mais seulement des individus qui défendent leur identité indépendamment de leur classe. [...]
[...] Bien que cela ne concerne qu'indirectement notre livre, si l'on comprend la notion de sujet comme un moi (individuel, déterminé, diversifié en fonction du contexte, et donc subjectif) et un je (non social, avec une volonté d'individuation et une liberté créatrice), il nous est difficile de croire en une extraction du je, du sujet, de ses déterminismes. Et quand bien même il le pourrait, il serait difficile de concevoir une création qui ne tire pas ses origines de déterminisme. Toute création est personnelle, subjective, et en ce sens, l'expression de déterminisme. Une telle conviction peut donc sembler utopique. [...]
[...] D'après une phrase du livre pourrons nous vivre ensemble ? qui supposait le sujet comme non social, nous voulions lui poser une double question : Quelles sont les preuves que les individus soient si libres ? Est-ce l'expérience qui vous a conduit à cette affirmation ou est-ce un a priori ? En réalité cette conviction repose, d'après l'entretient que nous avons pu avoir, sur une évidence et sur une expérience répétée qu'il a fait au cours de ses voyages. L'évidence c'est que partout où il y a des lois, c'est-à-dire, dans toutes communautés humaines, il y a de la liberté, sans quoi les lois n'auraient pas d'utilité. [...]
[...] Etre sujet, ce serait s'engager pour l'ensemble et se saisir réflexivement au sein de cet ensemble comme une subjectivité. Bien sûr, le sujet en soi n'existe pas non plus, il est une notion pure, abstraite mais qui tente de représenter l'ensemble des êtres s'engageant dans la lutte culturelle. Existe-t-il ou pas, revient à dire est -ce que la notion de sujet est représentative ou pas ? Cela, nous ne pouvons pas encore le dire. Critiques En ce qui concerne la sociologie de Touraine, il semblerait qu'elle soit excessivement positive, si non presque utopique. [...]
[...] La nation a pris conscience du fait qu'elle devait jouer un rôle de médiateur entre l'Etat et les sociétés locales, c'est-à-dire combiner la loi de la majorité et le pluralisme des intérêts. La nation perdit donc ce rôle central lors de l'émergence de la société industrielle. Quand le sujet politique est devenu un Sujet de classe (luttes ouvrières), la citoyenneté cessa d'être la forme principale de la liberté. Avec la modernisation, l'idée nationale cesse d'être le lieu du débat entre l'unité et la pluralité pour basculer du côté de l'unification. Construction de l'identité A. [...]
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