Sur la télévision suivie de l'Emprise du journalisme - Pierre Bourdieu (1996)

Thèmes abordés

Sur la télévision, l'Emprise du journalisme, Pierre Bourdieu, 1996, émissions télévisées, Collège de France, pression politique, étude sociologique, Le plateau et ses coulisses, pression médiatique, censure invisible, fast thinking, circulation de l'information, audimat, banalisation, La structure invisible et ses effets

Résumé du document

Le 18 mars 1996, Pierre Bourdieu enregistre deux émissions télévisées dans le cadre d'une série de cours au Collège de France ; la première s'intitule "Le plateau et ses coulisses", et la seconde "La structure invisible et ses effets". Ces deux conférences seront par la suite retranscrites dans un essai nommé "Sur la télévision", publié par la maison d'édition "Raison d'Agir" en 2008 à Nanterre (Hauts-de-Seine). Deux thématiques majeures sont abordées dans cet essai, à savoir le journalisme et la télévision.

Extraits

[...] Les débats faussement vrais, quant à eux, sont source de censure dissimulée omise par le présentateur : ce dernier impose les règles du jeu qu'il modifie à sa manière en fonction de celui à qui il s'adresse. Il coupe la parole et utilise le prétexte du temps pour interrompre. Le présentateur adopte également une attitude différente en fonction de son interlocuteur, à travers ses intonations par exemple. Un autre point qu'évoque Bourdieu est celui de la composition préalable du plateau, qui déneutralise le débat, mais également de la préparation en amont qui vient orchestrer et scénariser le débat. [...]

[...] L'emprise de la télévision Bourdieu expose ici sa vision de la sociologie : selon lui, le sociologue a pour but « d'éclairer » les protagonistes qui composent une société ; il exprime en outre ses idées sociologiques, à savoir les rapports de domination que les différents champs exercent les uns sur les autres. Il s'agit pour lui d'un mécanisme de structure important. Il ramène cela au champ journalistique, dominé par la logique de l'audimat. De plus, l'auteur parle des médias qui donnent des « verdicts » à outrance ; pour Bourdieu, les intellectuels se servent du champ journalistique autant que le champ journalistique se sert des intellectuels pour obtenir une crédibilité. [...]

[...] C'est en 1981 que Bourdieu devient titulaire de la chaire de Sociologie du Collège de France, ce qui lui permettra dix-sept ans plus tard de partager son étude sociologique autour du journalisme et de la télévision dans le cadre de cette émission. Pierre Bourdieu accorde beaucoup d'importance à la précision et au choix « du bon mot », ainsi, il affine ses théories autour d'appellations aux sens qui lui sont propres. Le plateau et ses coulisses Pierre Bourdieu choisit la télévision comme support de diffusion de ses idées, car il compte ainsi toucher un public large, c'est une façon pour lui de s'adresser à une grande audience. [...]

[...] Les journalistes sont à la recherche du sensationnel, du scoop, du spectaculaire. Ils font des sujets ordinaires des sujets extraordinaires qui créent des fantasmes et des peurs chez le spectateur. Bourdieu explique que les journalistes, par manque de neutralité, vont donner à l'information une dimension d'instrumentalisation de la réalité. La circulation circulaire de l'information Bourdieu évoque ici la concurrence présente entre les différents journaux et chaînes d'information qui poussent à l'homogénéisation. Les journalistes se comparent les uns aux autres et cherchent à se différencier à travers le contenu de leur journal, pourtant, les spectateurs se concentrent sur la lecture d'un seul journal la plupart du temps, contrairement aux journalistes qui construisent leur journal en concurrence permanente avec les autres journaux. [...]

[...] Enfin, l'auteur dénonce le rôle joué par les journalistes dans le choix de leurs mots, qui tendent à faire monter les partis extrémistes. Droit d'entrée et devoir de sortie Bourdieu souhaite renforcer le « droit d'entrée » à la télévision, car les sociologues, écrivains et philosophes qui sont présents à la télévision ne sont pas qualifiés dans leur domaine en tant que professionnels. Dans la même veine, ils parlent de « devoir de sortie » pour ceux qui ne sont justement pas des professionnels. [...]