Depuis plusieurs années, les époux Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot mènent des recherches approfondies sur une zone bien précise de la société: la bourgeoisie. Ces deux sociologues, spécialistes reconnus dans un domaine où ils ont été des pionniers, sont directeurs de recherche au CNRS et travaillent au laboratoire CSU (Cultures et Sociétés Urbaines) au sein de l'Institut de Recherche sur les Sociétés Contemporaines (IRESCO).
Ecrit en 2000, après de nombreux ouvrages sur le sujet, la Sociologie de la bourgeoisie reprend en format de poche les résultats des enquêtes antérieures. Ce petit livre s'inscrit dès lors dans le projet global des auteurs, dont il fait la synthèse. Ce projet vise à pallier une lacune étonnante dans la sociologie actuelle: la rareté des travaux sur la haute société. Or, comme le précisent les auteurs dans l'introduction, « on ne saurait comprendre la société sans en connaître les sommets », c'est-à-dire les catégories dominantes. En effet, comment songer à une évolution de la société française actuelle, « profondément inégalitaire », sans s'intéresser à ceux qui, justement, trouvent leur intérêt dans le maintien du « statu quo » ? Les deux sociologues s'appliquent alors à décrire et analyser la composition, l'organisation et le mode de transmission des positions dominantes. « Ces familles possédantes qui parviennent à se maintenir au sommet de la société », c'est la bourgeoisie. Dans le même temps, les deux auteurs montrent comment cette bourgeoisie, « un groupe apparemment composite », forme une véritable et sans doute la dernière « classe » sociale.
[...] Ce travail de construction permanente implique un double aspect de l'existence de la grande bourgeoisie. Elle est en effet une classe en soi en ce qu'elle occupe une place déterminée dans les rapports de production (c'est celle qui prélève la plus-value et en vit concrètement et une classe pour soi en ce qu'elle manifeste une mobilisation pour se construire comme classe, en défendant collectivement ses intérêts c'est donc une classe en soi sur le plan idéologique individualiste, et une classe pour soi sur le plan pratique collectiviste. [...]
[...] Ainsi la multidimensionnalité [de la richesse] vient complexifier l'approche d'un seuil de richesse à l'image du seuil de pauvreté plus aisément définissable, un niveau auquel commencerait la fortune La richesse est en effet non seulement diverse, mais aussi dispersée : les auteurs rappellent ici l'importance de l'écart de salaires ou de patrimoines. Noblesse et bourgeoisie : les enjeux du temps La noblesse n'existe plus juridiquement en France depuis son abolition par la IIème République en 1848. Cependant cette noblesse a pu se reconvertir dans les secteurs industriel ou bancaire par exemple. Ayant ainsi évité la détérioration de leur position sociale les aristocrates ont pu préserver l'identité noble perceptible notamment à travers l'importance symbolique des châteaux de famille. [...]
[...] Il en va de même, en proportion nettement supérieure, du patrimoine (rapport variant de 1 à 80). Au contraire du sens commun tendant à se représenter le grand bourgeois comme individualiste les grandes familles fortunées opèrent un travail spécifique de sociabilité Ce capital social est indispensable pour préserver et multiplier les pouvoirs de chacun Il se manifeste à travers des institutions (cercles, rallyes ) ou des cérémonies (galas, vernissages ) La richesse culturelle tient à un rapport légitime à la culture spécifique au grand bourgeois. [...]
[...] La mondialisation favorise ces lignées qui ont toujours été habituées à tisser des réseaux d'alliance à l'étranger. A l'heure où l'on ne parle plus que d'une société désorientée, privée de repères, la bourgeoisie reste unie autour d'un modèle qui garde cohérence et actualité. [...]
[...] Qu'est-ce que la richesse ? La signification que le sens commun donne au mot ‘richesse' est liée au seul concept d'argent, à sa seule dimension économique : dans les réponses aux sondages la richesse est caractérisée par la possibilité d'acheter des biens de valeur. Le sens commun omet d'autres aspects de la richesse, qui pourtant définissent l'appartenance à la bourgeoisie Le grand bourgeois possède ainsi une richesse multidimensionnelle comprenant à la fois le capital économique, le capital social, le capital culturel et le capital symbolique. [...]
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