Le constat initial sur lequel repose cet ouvrage est celui d'un déclin de l'idée de société. Cette formulation entend rendre compte de l'essoufflement d'un certain mode de représentation de la vie sociale, celui qui avait été construit entre la seconde moitié du 19ème siècle et les années cinquante. L'idée de société était une philosophie sociale, une métaphore s'efforçant de décrire la société, alors que celle-ci entrait dans la révolution industrielle ; cette représentation permettait de reformuler les vieilles questions de l'ordre, de l'action... Aujourd'hui cette idée de société correspond à « un type idéal antérieur, vis à vis duquel la société contemporaine connaît une longue crise ». Les débats sociologiques ne mettent plus en avant des représentations et des théories de la totalité sociale, mais proposent des conceptions de l'acteur, du sujet. L'idée de totalité a été repoussée à l'arrière de la scène sociologique. « La société ne peut plus être représentée comme un ensemble naturel intégré autour d'une culture, d'un mode de production, de fonctions ».
[...] La première est l'exposition du Moi. L'individu est souverain, responsable de son propre malheur. Au sein de l'école, l'élève est responsable de ses échecs, il ne peut plus en appeler à l'injustice. Cette évolution du rapport à soi et à la société est difficile à vivre pour les individus et se manifeste par de nombreuses tensions. Chaque sujet craint de travailler et de ne pas réussir. Dans l'entreprise, l'individu doit s'engager personnellement, il est tenu de se motiver. Dans tous les domaines, l'appel à la mobilisation entraîne une fatigue de l'acteur. [...]
[...] Le CDI perd de son hégémonie, tandis que le travail à temps partiel progresse. L'emploi précaire fait désormais partie du parcours professionnel. A cette précarisation progressive de l'emploi répond la hausse régulière du chômage et la tendance à la réduction du temps de travail. Avec ces bouleversements du monde du travail, la question est de savoir quelle signification prend aujourd'hui le travail dans l'identité sociale des individus. Le travail a gardé un poids important dans la construction des identités, il reste un lieu d'épanouissement personnel, mais il n'a plus le rôle hégémonique qu'il possédait avant. [...]
[...] Dubet et D. Martucelli et décrite comme une épreuve de l'individu S. Paugam a mis en évidence dans son livre La disqualification sociale. Essai sur la nouvelle pauvreté (1993) la dynamique de l'exclusion. Il recense trois phases de l'exclusion, auxquelles correspondent un degré d'assistance différent : la fragilité, la dépendance vis-à-vis des travailleurs sociaux et la rupture du lien social. La fragilité consiste en l'épreuve d'apprentissage de la disqualification sociale. La première étape en est l'absence d'emploi réel et de fait l'absence d'un statut social reconnu, ce qui diminue l'estime de soi de ces personnes. [...]
[...] La société est décrite comme un enchevêtrement de combinaisons, d'ajustements partiels, l'hétérogénéité des logiques d'action succède à la vision d'une unité. Longtemps, la société française a pu être décrite selon la notion de classe sociale, mais aujourd'hui les stratifications et leurs critères se sont brouillés, les clivages se sont multipliés. Si bien que s'il y a encore des classes et des conflits, ceux-ci ne peuvent plus rendre compte de la structure de la société. Le programme intellectuel que constituent les classes sociales perd de leur capacité au fur et à mesure de la complexification de la différentiation sociale. [...]
[...] L'acteur ne peut plus se sentir protégé contre toute épreuve par sa famille, ses amis. Avec la montée de l'individualisme sociologique dans les divers groupes sociaux et notamment au sein de la famille, le divorce peut devenir une réponse satisfaisante pour l'un des conjoints aux problèmes de l'autre. L'individualisme prendrait dans les cas extrêmes la forme d'une logique où l'égoïsme et la recherche du plaisir immédiat primeraient sur la construction d'un lien social solide. R. Castel parle à ce titre d'individualisme négatif. [...]
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