Norbert Elias n'aura bénéficié que de reconnaissances tardives : celle de l'université où il occupera longtemps un statut précaire, comme celle du public : ses ouvrages commenceront à être traduits en Français au début des années 1970.
Faire le compte-rendu de La société des individus, publié en France en 1991, pose problème du fait de la forme de l'ouvrage. En effet, il s'agit d'un recueil de trois textes, rédigés à des moments différents : le premier-qui donne le titre emblématique de l'ouvrage- l'a été en 1939, c'est-à-dire au moment où parait, pour la première fois, l'œuvre majeure de N. Elias Uber den prozeb der Zivilisation (la société des individus devait initialement constituer le dernier volet du procès de civilisation). Le second texte, « conscience de soi et image de l'autre » fut rédigé dans les années quarante et cinquante ; enfin la troisième partie « les transformations de l'équilibre « nous-je » » fut écrite en vue de la publication de 1987.
[...] À travers ces démarches, nous comprenons l'obsession Eliasienne, qui remet en cause des concepts considérés comme acquis, afin de réfléchir sans apriori sur des notions qui ont besoin que soient aplanis tous les modes de raisonnement conduisant à leur explication. Bien plus qu'outrageusement discuter les grands concepts philosophiques, notre auteur les travaille, les pense à la lumière de son XXe siècle. En les citant, et en osant y opposer sa réflexion, Elias se place en réalité dans la lignée des grands philosophes classiques. Tant d'exhaustivité et de remise en question mettent Elias à la suite de cet axe philosophique, l'imposant comme philosophe majeur du XXe siècle. [...]
[...] En effet, Elias commence par rejeter le célèbre cogito ergo sum de Descartes. Cette première manœuvre qui choque d'abord le lecteur, deviendra coutume avant de s'inscrire dans une démarche spécifique : celle de s'auto-proclamer comme appartenant à l'axe des philosophes Le je suis donc je pense de Descartes parait erroné à Elias qui voudrait le remplacer par un je suis parce que nous sommes : l'individu existant en tant que tel car se séparant de la masse, il constatera son individualité. Plus loin il remet Hegel en question ! [...]
[...] Refusant la coupure entre individu et société, il analyse la civilisation comme ensemble ordonné de modifications affectant les individus et les structures sociales. Elias impose enfin l'État comme facteur de changement social. En effet, le pouvoir engendré par l'instance étatique, le nous construit artificiellement et l'imbrication de groupes pré étatiques dans l'État sont autant d'objets qui engendrent de nouveaux modes de raisonnement, de nouveaux chemins de pensée qu'élabore notre auteur. Un individu n'a jamais une marge de décision illimitée, même si parfois celle-ci peut changer le destin d'une famille, d'une nation : ce que nous appelons pouvoir n'est dans le fond rien d'autre que l'expression d'une marge de décision individuelle particulièrement étendue Cette façon d'envisager le pouvoir découle logiquement de la notion d'interdépendance qui apparaît ainsi comme une clé de la pensée de l'auteur. [...]
[...] L'Histoire est l'Histoire d'une société d'individus, ainsi les individus, produits de la société, influencent eux-mêmes l'évolution de l'Histoire par les changements au sein de leurs structures. Ce développement des économies et des sociétés, qui s'accélère à la fin du Moyen-âge, induit une modification du processus individuel de civilisation À partir des XVI et XVIIe siècles, le contrôle de commande individuelle de comportement se renforce, les émotions sont contenues, ce qui restait d'instinctif dans la conduite humaine est progressivement inhibé. Dans le même temps, le procès de civilisation renforce l'individualisation des comportements. [...]
[...] La société est devenue un réseau d'interdépendance immense où aujourd'hui on ne peut plus distinguer la fin des moyens. Mais de nos jours, les hommes sont moins dépendants les uns des autres grâce à ce fameux progrès. Ceci entraîne isolement et singularisation des individus dans leurs relations. Nous sommes passés d'une structure de société nous pour aujourd'hui connaître la prédominance du je Elias prévoit un équilibre prochain nous-je Les contraintes d'interdépendance ont entrainé la civilisation en occident (naissance de structures d'actions). [...]
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